six feet under

Le tonnerre grondait au loin, venant assombrir l’esprit torturé du sorcier-maître de l’eau qui ne pouvait s’empêcher d’espérer ne faire plus qu’un avec son élément naturel plutôt que de se perdre encore et encore dans les douleurs fantômes et meurtrières qui étaient bien trop présentes. Pourtant, il faisait face à un soleil radieux en cet instant, n’appréciant pas que le temps soit aussi radieux alors même que son cœur ne demandait rien d’autre que d’exploser en mille morceaux. La douleur accumulée dans le corps, dans les muscles, dans les os et veines ne cessait de s’accentuer de minute en minute tant il retenait tout ce qu’il ressentait et qu’il refusait de partager ses émotions. Pourtant, une partie de cette douleur a su se dissiper la veille, lorsque ses actes et paroles étaient venues faire face à ce que lui avait fait son père. Ce n’était pas suffisant, cependant. Cela ne serait jamais suffisant, il en était persuadé, et il avait besoin d’exprimer tout ce qu’il ressentait. Ce qui avait certainement poussé le jeune mizu à réfléchir un peu trop, à se perdre dans les songes éternels et les rêves impossibles. Parce que sa vie était loin d’être un conte de fée parfait où le prince charmant, ici Tianyi, l’aimait de tout son amour et qu’il n’était pas du tout entouré d’une famille parfaite, bien que Moon et leur tante étaient certainement les seules à apporter une perfection aproximative dans la vie de l’étudiant. D’une certaine manière, il vivait sûrement dans un cauchemar tant la souffrance était réelle dans tout son corps.

Réfugié depuis plusieurs heures dans un logement qui avait appartenu à l’un de ses anciens amants, il avait pris le temps de se remettre des émotions de la veille et de ses blessures bien trop nombreuses avant de prendre une décision. Il ne pouvait plus se permettre de souffrir pour les autres et ferait mieux d’écouter les conseils avisés de ceux et celles qui avaient toujours été à ses côtés pendant des années et qui avaient toujours dit qu’il méritait mieux. Peut-être avaient-ils raison quand ils disaient qu’il avait le droit au vrai bonheur et que ce n’était pas auprès de Tianyi qu’il le trouverait. Il en était même certain à présent, s’étant rendu compte qu’il souffrait plus à ses côtés que jamais auparavant et qu’il n’était heureux qu’en la présence des autres hommes (du seul homme) de sa vie. Alors, il avait quitté le quartier de l’eau pour rejoindre celui de l’air, là où il était certain de croiser son petit-ami actuel. Entrant dans les dortoirs sans même s’interroger sur son droit de se trouver là, il grimpait les étages pour venir toquer à la porte de celui qui avait sûrement été son plus grand amour mais qui était à présent celui qui représentait une fois de plus sa plus grande souffrance. Le visage grave, il observait la porte avec attention avant de la voir s’ouvrir devant lui. " — Tianyi." Que c’était dur de lui faire face alors même qu’il commençait à peine à être certain de lui-même et de ses envies. " — Can I come in ? I think we'll be better off at your place." Essayant cependant de paraître ne serait-ce qu’un petit peu doux, histoire de ne pas dévoiler ses intentions dès le début, il croisait les bras avant de reprendre la parole. " — Do you have anything to make me a tea, by the way ? Or even a hot chocolate, that would be ideal."

Assis sur le canapé, en pleine lecture d’un livre en rapport avec ses études, Haruka dans sa chambre au téléphone avec quelqu’un (peut-être sa petite-amie, vu le ton mielleux qu’il prenait). Qu’importe. Tianyi se concentrait à finir ce livre, lecture obligatoire mais qu’il avait repoussé jusqu’au dernier moment. Il aurait pu trouver un résumé sur Internet, mais ça n’en existait pas, alors il devait tout se taper (d’autant plus que ses camarades n’étaient pas très coopératifs avec lui, étaient plutôt sur ses gardes, et on se demandait pourquoi). Soudain, quelqu’un toqua à la porte et Tianyi poussa un lourd soupir. « Tianyi, can you open the door ? » Tianyi poussa un autre soupir. « Alright, » grogna-t-il et il lâcha son livre sur le canapé, se leva pour marcher vers la porte. Il n’avait prévu d’être dérangé par personne ce soir, alors si c’était quelqu’un que Haruka avait invité, Tianyi aurait aimé être prévenu (audacieux de sa part, quand lui ne prévenait pas Haruka quand il invitait l’un de ses coups d’un soir chez lui). Et puis, si c’était un invité de Haruka, Haruka aurait sûrement voulu être celui qui ouvre la porte. C’était donc un invité mystère, parce que ni lui ni Haruka n’avaient commandé à manger. Tianyi aurait aimé ne pas lui ouvrir la porte du tout, ayant la flemme de faire face à qui que ce soit maintenant, mais dans le doute, si c’était Gaia… (Gaia lui aurait laissé un message, ce n’était pas elle).

Tianyi ouvrit la porte, et tomba sur Bae. Ah, Bae. Son petit-ami. C’était vrai. Ils auraient dû ne plus être en couple maintenant, mais quand Bae était revenu vers lui, il avait pensé qu’il y avait le potentiel pour blesser Bae davantage, alors il avait sauté sur l’occasion. Faire tourner Bae en bourrique, lui donner le moins d’attention possible pour que Bae soit celui qui rompe. Tianyi pourra alors lâcher de fausses larmes, tout blâmer sur Bae et le faire se sentir coupable de tout ce qui s’était passé dans leur relation. C’était ça, le plan. Alors voir Bae aussi peu ravi devant sa porte, c’était un plaisir. Peut-être que leur rupture était aujourd’hui. « Oh, hi Bae. I wasn’t expecting you, what brings you here ? » Bae demanda à entrer et si Tianyi allait faillir le faire, il entendit soudain la voix de Haruka. « Who is it ? » Ah, il était encore là… Tianyi soupira. « Wait a minute, » dit-il à Bae avant de lui fermer la porte et de se tourner vers Haruka. « Can you like, go out for half an hour ? I’ll be quick. » Haruka fit une mine dégoûtée, pensant probablement que Tianyi allait coucher avec le nouveau venu. Il enfila rapidement un manteau et ouvrit la porte, jeta un coup d’oeil à Bae avant de partir. Tianyi apparut derrière lui et fit signe de la main à Bae. « Okay, now come in. » Il le laissa fermer la porte derrière lui et disparut dans la cuisine. « I can make you tea. What do you want ? » Il aurait aimé ne rien dépenser pour Bae mais bon, il devait prétendre ne rien savoir et agir un minimum poliment. « So why are you here ? »<:tia> redemanda-t-il, faisant chauffer l’eau, toujours dans la cuisine, ne jetant même pas un regard à son petit-ami.

L'enfant de l'eau mentirait s'il disait qu'il s'était attendu à un meilleur accueil de la part de celui qui était son petit-ami, de celui qui possédait son cœur depuis presque toujours malgré tout ce qu'il pouvait penser et croire. Tianyi avait été l'un des premiers, sûrement l'unique homme, auquel Bae avait appris à tenir si fortement qu'il en penserait presque la vie impossible sans lui. Mais le cœur, ainsi que le corps, étaient bien trop meurtris par les événements précédents et il ne ressentait plus aucunement l'envie de s'attarder dans une relation qui lui faisait bien trop mal. Pourtant, face à cette porte qui gardait l'entrée du logement de son amant, il ne s'était jamais senti aussi... éloigné de toute cette histoire. Les sourcils se fronçaient cependant lorsque le kaze ne semblait guère heureux de le voir. " — Can't I come visit my boyfriend ? Is it forbidden ?" La voix se fait presque ironique alors qu'il s'apprête à entrer. Mais une seconde voix se fait entendre, une voix masculine, et la porte se ferme, se claque limite contre son nez alors qu'il ne comprends pas ce qu'il se passe. " — Is that fucking bastard cheating on me again ?" Murmure adressé à lui-même alors que la porte se rouvre, dévoilant un visage inconnu qui se retire du logement après lui avoir lancé un bref regard. Il n'a le temps de ne rien faire d'autre que de lever le regard lorsque Tianyi vient lui dire de rentrer, ce qu'il fait sans se faire attendre. " — Is he your new fucking one night stand ?" L'honnêteté tranche déjà le silence alors qu'il le suit dans la cuisine, s'installant sur une chaise avant de répondre. " — Vanilla and hazelnut tea, if you have it." Il se fiche pourtant du thé, ayant simplement besoin d'une tasse à tenir entre ses doigts lorsqu'il viendrait prononcer les mots qui font saigner son cœur depuis un bon moment. " — I told you, I just came to say hello. Aren't you happy to see me, baby ?" Riant doucement, il lève de nouveau le regard vers l'homme qui lui tourne le dos, osant se demander comment ils avaient pu en arriver là. " — Could you look at me when we talk, Tianyi ?" Simple demande qu'il espérait voir satisfaite alors qu'il croisait les bras. " — Have you ever loved me ?"