we all broke our rules for someone ft. keita

we all broke our rules
for someone
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Elle s’était arrêtée devant le miroir un peu plus longtemps que d’habitude sous le regard amusé d’Haiko qui observait son manège depuis plusieurs minutes déjà ; elle avait passé plusieurs coups de brosse dans sa chevelure déjà lisse, tenté de rassembler ses mèches blondes dans une queue-de-cheval pour finalement se rétracter en marmonnant, elle avait vainement réajusté un uniforme qu’elle portait déjà depuis des années avant de remonter un peu sa jupe sous le joug moqueur de sa colocataire. « Quoi ? » marmonna-t-elle sans quitter son reflet des yeux. Elle n’attendait pas de réponse de la part de la brune qui semblait simplement s’amuser de ses doutes. « Miroir, miroir, qui est la plus belle ? » demanda-t-elle au reflet qui lui faisait face et dont elle essayait avec peine d’être satisfaite. « Pas toi ! » sa colocataire avait répondu à la question tout en se préparant à recevoir un lancer d’un quelconque objet sur elle de la part de Somi. « Bon j’y vais, en même temps que la chanteuse prononçait ses mots elle fit léviter plusieurs cahiers qui se rangèrent dans son sac, à ce soir ! Enfin si t’es là. » Référence discrète à toutes les nuits que la kasai passait ailleurs qu’au dortoir.

Sur le chemin jusqu’à la salle de musique la japonaise avait eu le temps de ressasser les drames bizarres de ces derniers mois : elle avait perdu une précieuse colocation avec une amie de longue date dans une suite d’événements qu’elle n’arrivait pas encore à comprendre – Rose avait été si bizarre, des lettres à chaque fois plus dérangeantes continuaient à atterrir sur son bureau et l’impression d’être épiée s’accentuait chaque jour – qui était donc l’expéditeur ? – et son retour d’Afrique du Sud avait un amer goût depuis qu’elle avait repris le chemin de l’école alors cette unique journée était ce à quoi elle s’était raccrochée pour se motiver.

En entrant dans la grande salle Somi retrouva instantanément ses repères et les habitudes qu’elle avait prise après tant d’années de participation au club de musique. La japonaise avait posé son sac pour s’installer automatiquement derrière le piano à queue fermé. Elle avait innocemment planifié cet après-midi autour d’un cours de musique mais tout s’était intensifié rapidement durant la golden week jusqu’à créer une certaine appréhension envers cette leçon qui s’apparentait à présent à un date. La chanteuse jeta un coup d’œil vers les cahiers étalés devant elle sur le dos de l’instrument : des pages de solfèges remplies à la main côtoyaient des gribouillis raturés, des bouts de paroles et des notes de différentes couleurs parmi lesquelles elle seule arrivait à y retrouver un sens logique. Elle posa finalement les doigts sur les touches noirs et blanches de l’instrument pour entamer un début de mélodie sans perdre de vue la page de solfège. Elle accentua au fur et à mesure la pression de ses doigts déliés jusqu’à ce qu’une note dissonante n’interrompe son jeu. L’étudiante soupira avant d’ajouter une rature de plus, une énième correction, sur la page déjà remplie et ses mains reprirent leur course légère sur le clavier. Le petit poids dans son ventre avait disparu en même temps qu’elle avait réussi à se perdre dans les sons de cette mélodie qu’elle essayait de retranscrire depuis plusieurs semaines – ça restait un exercice périlleux pour elle de transmettre une émotion précise avec une simple suite de notes mais ce travail compliqué était toujours satisfaisant lors du résultat final. Elle en aurait oublié l’heure et la raison de sa venue ici si le bruit de la porte ne l’avait pas prévenu de l’arrivée de celui qu’elle attendait.

La musique s’était interrompue en même temps qu’elle avait rangé ses mains sur ses cuisses. « J’étais en train de jouer un peu en t’attendant » expliqua-t-elle en sachant pertinemment qu’il avait dû comprendre ça tout seul. Elle se leva pour rejoindre l’étudiant au centre de la pièce. « Tout s’est bien passé ? elle lui adressa un sourire avant de se rendre compte que sa question manquait de précisions, à la boutique, c’est là que tu travailles, non ? » Pas la peine de mentionner que cette information lui avait été livrée par une amie qui avait compris l’intérêt qu’elle portait au garçon face à elle. « J’ai pas vraiment prévu de trucs particuliers alors, hm… » Elle lui fit signe de la suivre alors qu’elle s’installa à nouveau sur le banc du piano assez grand pour deux mais cette fois-ci l’idole referma le couvercle sur le clavier sans avoir l’intention de jouer. « Tu sais ce que tu veux ? » Et pour la première fois vraiment elle prit la peine de détailler Keita à côté d’elle alors elle laissa ses yeux vagabonder sur les traits fins de son visage avant de s’éclaircir la gorge pour préciser sa question. « … ce que tu veux faire au club, je veux dire. » Elle détourna les yeux et fit mine de réfléchir à une autre possibilité. « sauf si c’était vraiment qu’une excuse pour me voir. » Remarque – presque - innocente qu’elle lâcha avec un air faussement détacher finalement trahi par un rire taquin.

we all broke our rules
for someone
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Jamais Keita n’a eu aussi hâte de se retrouver dans ce qui s’apparente à une salle de classe. Pourtant il ne pense qu’à ce rendez-vous depuis quelques jours. Depuis son séjour aux États-Unis, depuis qu’une jolie blonde a réussi à remettre un sourire sur ses lèvres alors qu’il était sur une pente glissante. Il s’était promis de rester célibataire après sa dernière rupture, ou plutôt sa non-rupture puisqu’il s’agissait en fait d’une disparition. Ghosté comme s’il n’était personne, comme si l’homme qui partageait sa vie depuis près de quatre mois n’avait pas bouleversé sa vie entière. Disparu du jour au lendemain, laissant simplement un mot au jeune Tolkien amoureux. Seul un mois est passé depuis ce jour honni et pourtant ce souvenir semble désormais loin. Grâce à elle. C’est étrange comme le regard que l’on pose sur quelqu’un peut se transformer, sans raison particulière. Car Somi n’est pas étrangère du quotidien de Keita, il la côtoie même régulièrement depuis le début de l’année, aux entraînements de quidditch. Andréa lui en a également parlé à de nombreuses reprises car ils sont de proches amis. Pourtant jamais il n’avait fait attention aux doux sourires, au rire contagieux et aux terribles lancés de cognard qui contraste avec l’image de jeune femme sage que dégage Somi. Sans doute parce qu’il était trop occupé alors à succomber aux charmes du disparu. Extrême regret.

C’est pour les petites doses de bonheur qu’elle lui transmet, et pour l’envie constante de passer plus de temps avec elle, d’apprendre à la connaître, que Keita a demandé son numéro à Andrea et qu’il n’a de cesse, depuis, de chercher à attirer l’attention de la blonde. Il souhaite sortir du lot, se faire remarquer, se faire apprécier. Conscient que la belle pourrait choisir parmi des centaines d’hommes qui l’adulent, il reste confiant quant à ses chances de la séduire. Tout semble bien se passer en ligne mais il est désormais temps de passer à la réalité, au vrai terrain de jeu de Keita. C’est pourquoi, dès son service à la boutique terminé, il retire son tablier et se rend vers la salle de musique. Skate au sol, il donne plusieurs coups de pied pour se lancer jusqu’aux bâtiments principaux de l’école. Il affectionne tout particulièrement ce moyen de transport moldu qui lui donne l’impression de mêler vol et danse pour se mouvoir. Quelques minutes suffisent à ce qu’il arrive à destination. Il prend le temps de miniaturiser le skateboard qu’il glisse dans sa poche et enfin, il pousse la porte. Ses yeux se posent alors immédiatement sur Somi dont les doigts frôlent les touches du piano. La mélodie est parfois hésitante mais la joueuse ne s’arrête pas et Keita ne peut s’empêcher de sourire avant de fermer la porte, la laissant se rendre compte de sa présence. « Hey.. » lance-t-il alors qu’elle se retourne vers lui. C’est alors qu’elle lui demande comment sa journée de travail s’est passée. Surpris qu’elle sache où il travaille, il ne s’en formalise cependant pas. « Oui, c’est ça. C’était chargé, on a toujours beaucoup de clients les premiers jours de l’année… Les nouveaux aiment bien acheter l’arsenal complet de leur maison. » Explique-t-il en passant une main dans ses cheveux pour s’empêcher de la tendre vers celle de la pianiste. Envie, besoin de familiarité avec celle qu’il a l’impression de déjà connaître. Fort heureusement, elle repart vers le piano et il la suit pour s’installer à ses côtés, à califourchon sur le banc. Ainsi, la distance entre eux est plus grande et il peut la regarder autant qu’il le désire sans que cela ne semble trop étrange.

« Tu sais ce que tu veux ? » Cette question le fait sourire, sans doute un peu trop car elle ajoute rapidement des précisions derrière. Il était à deux doigts de lui répondre simplement, « Toi ». Keita ne veut pas se donner l’air d’un homme trop séducteur, trop direct mais il semble que la jeune femme lui tendre une seconde perche dont il se saisit cette fois. « C’était une excuse. » répond-il simplement. « J’ai rejoint le club de musique un peu par hasard… Parce que j’aime rapper parfois, parce que je suis sensible aux mélodies. Je n’ai cependant aucune intention d’apprendre le piano, sauf si cela veut dire passer du temps avec toi. Pour ça, je pourrais apprendre tous les instruments du monde. » C’est bateau, c’est clairement ridicule et pourtant il le pense sincèrement. Allongeant ses bras sur le dos du piano, il vient y apposer sa tête sans lâcher la batteuse du regard. « Quelque chose me dit que tu t’en doutais, pourtant tu es quand même venue. » Sourire amusé, Keita sait qu’elle n’est pas immune à son charme. Il faut dire qu’Andrea a joué les espions pour lui, sans même qu’il n’ait à le demander. « J’espère que tu ne te fais pas aussi jolie pour tous les membres de ce club. J’aime avoir une certaine exclusivité. » Lance-t-il encore en se redressant, ponctuant la phrase d’un léger rire pour lui faire comprendre qu’il ne s’agit pas là des prémisses d’une possessivité nocive. C’est simplement sa manière, peut-être un peu maladroite, de lui faire comprendre qu’il n’a pas envie de n’être qu’un parmi les autres.

we all broke our rules
for someone
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Tout s’était particulièrement accéléré durant la Golden Week à travers leurs échanges virtuels. Elle s’était surprise, au départ, à guetter l’écran de son téléphone en espérant y voir apparaître le pseudo du kasai. Puis petit à petit elle avait fini par se confier à Ingrid et Sofia dans des longs échanges de sms ou des conversations nocturnes, la tête posée sur l’oreiller, à propos de l’intérêt nouveau qu’elle portait à Keita. Elle avait bien en tête tous les conseils que ses deux amies lui avaient prodigué car, Somi en était persuadée, la combinaison de leurs trois caractères très différents donnait un résultat plutôt stable et cohérent. Le mot d’ordre officiel avait été de rester naturel ; c’était quelque chose de facile et à la fois compliqué. Retrouver Keita dans cette salle de club la plongeait dans un décor familier et rassurant tandis que la thématique de leur après-midi autour de la musique lui permettait de discuter avec lui de sa passion principale. Là où ses doutes persistaient c’était sur la meilleure façon de procéder tant leurs échanges virtuels n’avaient été qu’une suite de sous-entendus – elle en était arrivée à la conclusion que son tutorat était relégué au second plan et que l’envie de connaître d’avantage le garçon primait. Et quand il arriva enfin Somi ne douta plus un seul instant de cet ordre de priorité.

« Ah je vois, commenta-t-elle, c’est vrai que j’avais aussi fait la même chose… » Elle se remémora quelques souvenirs lointains de ses premières années à Mahoutokoro, de sa chambre ornée de rouge et d’accessoires liés à la maison du feu. Au fil du temps la décoration avait évolué pour quelque chose de plus sobre même si sa fierté d’être chez les kasaï demeurait la même. Une lueur de malice anima ses pupilles alors qu’elle se rappelait avec nostalgie l’excitation de ses premiers mois dans le dortoir. « Ça fait longtemps que j’ai pas été dans cette boutique mais j’ai enfin une raison pour y retourner. » Elle sourit de son sous-entendu puis elle incita le sorcier à la suivre jusqu’au piano. Elle s’installa sur le banc avec la prestance d’une musicienne habituée avant de s’atteler à lui poser quelques questions. La japonaise se sentait observée alors que son propre regard avait du mal à se poser sur quelque chose en particulier. Ses prunelles sombres essayaient de trouver de l’intérêt dans la contemplation de ses propres mains, du mur face à elle chargé de décorations ou encore des quelques cahiers ouverts sur le dos du piano. Cela semblait plus simple que soutenir le regard du sorcier. Pourtant les mots de Keita la firent instantanément tourner la tête vers lui : elle ne s’attendait pas à une approche aussi franche mais sa moue de surprise se transforma vite en une expression satisfaite. « Wow, elle rigole face à tant d’honnêteté, t’as pas besoin de faire tout ça pour qu’on passe du temps ensemble, promis. » La chanteuse esquissa un sourire coupable lorsqu’il sous-entendit à demi-mots avoir conscience de l’intérêt qu’elle lui portait. « C’est vrai » admit-elle finalement après avoir attendu quelques secondes. Le jeu auquel ils avaient joué durant ces dernières semaines ne laissait aucun doute sur le fait qu’ils en attendaient certainement autant l’un que l’autre de ce rendez-vous.

« Ah, le rap… , elle grimaça, un peu gênée de constater que le domaine qui intéressait le kasaï était un terrain inconnu pour elle, c’est pas vraiment quelque chose que je connais mais je suppose que la base d’écriture reste la même ? » L’étudiante se leva de quelques centimètres pour se pencher sur l’instrument imposant afin d’éplucher les carnets posés en vrac devant elle. Sa main se posa sur l’un des moins abimés qu’elle fit glisser vers Keita en s’arrêtant à mi-chemin. « Ça te sera peut-être utile du coup » supposa-t-elle en se rapprochant finalement du garçon comblant ainsi la distance entre eux. Elle sentait ses genoux frôler le tissu de sa jupe.

Il la trouvait jolie. Elle le savait déjà. Alors pourquoi son cœur avait-il décidé de s’emballer autant à cette phrase ? L’entendre clairement une nouvelle fois suffisait à la mettre dans tous ses états alors elle avait besoin de se concentrer sur une tâche précise pour se calmer. Sur la première page du carnet quasiment neuf qu’elle venait d’ouvrir, des lettres rondes et féminines formaient un « propriété de somi hanaoka » de couleur rose pâle tandis que des dessins fleuris habillaient le reste de la feuille. La blonde tapota de sa baguette le livre et les lettres ne tardèrent pas à changer d’ordre et de formes. On pouvait y lire à présent « propriété de keita tolkien » sur une page beaucoup plus sobre dont seule [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] personnelle tout en bas laissait percevoir la touche féminine de Somi.  « Si tu veux vraiment l’exclusivité, elle releva les yeux du carnet pour soutenir le regard du kasai, il suffit de la demander. » Elle se sentait bizarrement à sa merci d’attendre une phrase ou un geste de sa part pour conclure le jeu qu’ils avaient commencé il y a plusieurs mois.

we all broke our rules
for someone
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Ils s’amusent l’un de l’autre, jouant à celui qui parviendra à dérouter l’adversaire le premier. Somi s’avère être plus redoutable que prévu à ce jeu et cela ne fait que renforcer l’attirance que Keita ressent. Il aime qu’on lui tienne tête, qu’on ne rende pas les armes trop vite et s’il a déjà pu constater que sa belle était plutôt du genre battante à travers l’écran, il apprécie qu’elle soit la même face à lui. Il est trop facile de jouer un rôle lorsqu’on se pâme sur instagram, trop facile de retoucher ses photos, de s’inventer une personnalité. Bien sûr, il avait déjà eu l’occasion de la voir lors du match où ils se sont rencontrés, il avait déjà eu un échantillon de ce qu’elle est. Pourtant quelques doutes subsistaient et ils disparaissent tous lorsqu’elle entre dans son jeu sans lui laisser mener la danse pour autant. Accoudé au piano, toujours face à elle, il se perd dans la contemplation de la beauté féminine. Il lui arrive trop souvent d’oublier qu’elle n’est pas une femme parmi tant d’autres et bien qu’il se soit évidemment vanté auprès de ses amis d’avoir un rendez-vous avec l’idole de la nation, il ne pose pas sur elle un regard différent. Face à lui, elle n’est pas définie par son métier, pas définie par sa popularité. Elle n’est qu’elle et c’est déjà bien assez pour qu’il sente ses sentiments s’emballer lorsqu’elle lui précise qu’il n’a pas besoin de faire tant d’efforts pour passer plus de temps avec elle. Cela le fait sourire, qu’elle le prenne ainsi à sauter à pieds joints dans les phrases toutes faites, dans les phrases que n’importe quel homme peut dire pour séduire la femme qu’il veut. Le rire de Somi résonne aux oreilles de l’Américain et son coeur tremble. Le piège qu’il essayait de tendre se referme lentement sur lui et il n’essaye même pas de s’échapper.

Le visage de son aînée change lorsqu’il mentionne le rap et il ne peut s’empêcher de noter une pointe de déception. Ne sait-elle pas que le rap se marie à la perfection avec le genre qu’elle pratique ? « Effectivement, la base reste la même. Ce sont des mots posés sur la musique. Ils sont simplement exprimés de manière différente. » répond-il. Il se doute qu’elle connaît la réponse mais il ressent ce besoin irrépressible de répondre à chacune de ses allocutions, pour montrer qu’il s’intéresse, pour montrer qu’il l’écoute. Ses soeurs lui ont bien trop répété qu’il était important d’écouter, qu’il suffisait presque de ça pour qu’une femme se sente épaulée. La suite le surprend et cela se voit sans doute sur son visage. Peu habitué à être celui qui reçoit des cadeaux au premier rendez-vous, il s’en trouve gêné et pourtant infiniment touché. Lui n’a rien apporté et il se sent soudain stupide, se promettant de ne pas oublier la prochaine fois qu’ils se voient. Car il y aura une prochaine fois, il en a la certitude. Une certitude qui ne fait que se confirmer lorsqu’elle se rapproche de lui. Alors il ose. Il n’est de toute façon pas réputé pour sa patience, ne serait-ce pas un mensonge que d’en faire preuve devant elle aujourd’hui ? Ils ont déjà attendu assez longtemps avant de se voir.

Elle ne répond pas tout de suite, jouant de sa baguette pour changer la couverture du carnet qu’elle lui offre. Propriété de Keita Tolkien peut-il lire sur fond rose, accompagné d’une annotation qui le fait sourire un peu plus encore mais qu’il n’a pas le temps de commenter à voix haute car Somi reprend la parole. C’est une phrase inattendue qu’elle prononce. Une phrase qui donne des ailes à l’attrapeur. Alors il pose sa main sur celle de la pianiste et se rapproche d’elle, venant déposer un doux baiser sur les lèvres rosées de celle qui joue un peu trop avec les effluves de son adolescence. Quelques secondes de contact à peine qu’il aimerait prolonger encore longtemps. Il recule pourtant et observe Somi en souriant avant de simplement lui dire « This is the beginning I want today. »

we all broke our rules
for someone
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Elle sourit sincèrement intéressée par ses mots. Il ne se doutait pas de la curiosité qui l’envahissait à cet instant et des dizaines de questions qu’elle se retenait de poser. Il y en a une pourtant qui osa se frayer un chemin entre ses lèvres. « Tu as déjà commencé à écrire des textes ? » La suivante, plus personnelle - est-ce qu’il la laisserait lire des extraits ? - resta cependant coincée dans sa gorge. Mais l’étincelle qui animait l’éclat de ses pupilles suffisait à laisser deviner toute la passion qu’elle essayait de contenir, comme toujours, lorsque quelqu’un était assez brave pour parler musique avec elle. Elle avait le sourire contenu et les gestes contrôlés d’une personne trop habituée à ne pas retrouver le même enthousiasme chez ses interlocuteurs lorsqu’elle se décidait à parler de ses passe-temps. Elle avait mis longtemps, trop longtemps à son goût, pour finalement trouver refuge dans ce club de musique qui contenait des gens animés par le même amour qu’elle. Mais malgré leurs intérêts communs l’adolescente, qu’elle avait été, avait mené une deuxième lutte, plus minime, mais tout aussi frustrante ; celle d’être prise au sérieux. De faire oublier un peu son étiquette d’idole pour crédibiliser celle de musicienne. Parce qu’elle restait, au fond, cette adolescente qui prenait sa guitare comme confident et trouvait du réconfort derrière un grand piano. Et tout le reste : le maquillage, les vêtements colorés, les chorégraphies, les mimiques, ne formaient qu’un petit écrin qui abritait tout son travail, un peu trop oublié, de musicienne. Alors avec le temps l’artiste avait fini par prendre l’habitude de se censurer, de rester silencieuse quand bien même son regard criait pour elle son envie de parler. C’était un peu différent aujourd’hui. Le kasai avait, consciemment ou non, touché dans le mille en lui proposant ce tête-à-tête autour de la musique. Et plus encore en lui demandant son aide au moment-même où elle sentait germer l’idée de quitter ce club qui l’avait vu grandir. « Tu sais, avant que tu me demandes de l’aide, un sourire mélancolique illumina furtivement son visage alors qu’elle hésitait à continuer ce qu’elle s’apprêtait à dire, j’étais dans une période où je pensais vraiment à quitter le club. » Elle s’accouda à son tour contre l’instrument. Elle se sentait au fur et à mesure beaucoup plus à l’aise à l’idée de soutenir le regard percent de Keita. « En vrai j’aurais conseillé à n’importe qui d’autre de demander de l’aide à Sasha, l’ancienne présidente, plutôt qu’à moi. » A n’importe qui d’autre sauf lui. Dans cette déclaration elle confirmait à demi-mots la place spéciale qu’il occupait. Ce n’était plus la peine de nier car elle sentait qu’ils venaient au bout du jeu auquel ils avaient pris plaisir à jouer depuis le début de l’année.

Pour la dernière manche rien n’avait été calculé. La sorcière avait sorti sa baguette pour changer la couverture d’un de ses carnets auquel elle avait ajouté une courte annotation qui pouvait en même temps signifier beaucoup. Simple décoration pour ne pas maladroitement oublier la provenance du livret, phrase porte-bonheur pour encourager la confiance du sorcier ou… souhait intime de la jeune fille qu’elle précisa, comme si c’était encore nécessaire, en comblant la distance qui les séparait. Le jeu était terminé et elle rendait enfin les armes sans se sentir perdante. Il pouvait avoir l’exclusivité. Elle lui donnait un dernier un aval, lui soufflait qu’il n’avait qu’à demander, qu’il n’avait qu’à faire un dernier pas vers elle pour l'atteindre et l’avoir complètement. Et la manière dont il répondit alla au-delà de ses attentes à partir du moment où elle sentit sa main se poser sur la sienne et qu’il se rapprocha d’elle pour venir chercher un premier baiser.

Elle avait fermé les yeux pour mieux savourer le bref contact qui venait de réveiller en elle des sensations qu’elle avait depuis longtemps oubliées. Son cœur battait si fort, pour ce moment qu’elle avait attendu depuis longtemps, qu’elle avait peur qu’il puisse l’entendre. Elle rouvrit les yeux en sentant un immense sentiment de vide s’emparer d’elle lorsqu’il quitta ses lèvres pour se reculer et l’observer. Pouvait-il voir son trouble ? Les mots qui suivirent achevèrent la musicienne qui se débattait déjà avec l’envie d’un nouveau baiser. Elle s’agita un peu sur le banc qu’ils partageaient.  Tout allait si vite aujourd’hui sans que cela ne lui paraisse pour autant précipité. Mais quelques doutes, quelques interrogations, sur ce qu’ils étaient en train de faire, essayaient encore de se frayer un chemin dans sa tête alors elle céda. A cette envie qui était venue embraser son cœur lorsqu’il avait quitté, bien trop vite, ses lèvres. Somi se pencha, trouvant appui sur la cuisse du kasai, mais se figea avant d’atteindre sa bouche. Quelques secondes à peine. Le temps de combattre cette hésitation, cette prudence, qui stoppait habituellement ses actions précipitées et l’aidait à maintenir l’illusion d’un contrôle parfait de sa vie. Mais tout était différent aujourd’hui. Pour ce baiser elle préférait, pour une fois, se fier à son instinct alors elle combla les quelques centimètres qui séparaient leurs lèvres. Elle entrouvrit les siennes pour un échange plus profond, plus confiant et curieux dans la découverte de l’autre. Elle voulait retrouver les sensations qu’elle avait à peine eu le temps de goûter quelques minutes auparavant pour s’assurer qu’elle ne les avait pas rêvées. Elle lutta pour maintenir sa main inerte au lieu de la perdre sur la nuque du kasai et se força finalement à rompre en douceur le contact. Elle sentait encore son cœur pulser fort dans sa poitrine alors qu’elle avait regagné sa position initiale pour parler.

« Ce sera pas… » Facile, avait-elle envie de dire. Qu’être avec elle c’était loin d’être l’idylle parfaite qu’elle promettait dans ses chansons. Que les aléas de sa vie d’idole impacteraient toujours sa vie personnelle et qu’elle serait à lui mais aussi un peu à d’autres. « Officiellement j’ai pas vraiment le droit de sortir avec quelqu’un. » Ses traits prirent une expression inquiète même si un rouge taquin empourprait encore ses joues. Elle avait l’impression de devoir passer par cette explication, cette mise en garde, pour le protéger de toute déception. « Mais pour moi, ça – elle désigna du regard la main de keita sur la sienne - vaut vraiment le risque de tenter. » précisa-t-elle en souriant pour réaffirmer son envie d’être avec lui. Parce-que ce désir avait éclot depuis le match où elle avait appris à le connaître et qu’il n’avait fait que grandir au fur et à mesure de leurs échanges. Parce qu’elle avait vingt-et-un ans et qu’il était temps qu’elle pense un peu à son propre bonheur et parce qu’elle se sentait prête à lui offrir d’elle tout ce qu’elle ne montrait pas aux autres.

we all broke our rules
for someone
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Dès le début de leur échange, Keita sent Somi sur la réserve. Comme si n’osait pas se laisser entièrement aller. Comme si elle contrôlait la dose de passion qu’elle laisse paraître. Alors il tente de lui faire comprendre qu’il veut la mettre à l’aise avec ses mots et de petites attentions. Peu habitué à des discussions si sérieuses, il se laisse porter par l’engouement que la musique lui procure et par les questions de celle qu’il voudrait sienne. « J’écris un peu… Parfois... » avoue-t-il à demi-mot alors qu’il veut déjà changer la discussion. Il est mal à l’aise de parler de ses écrits, de tout ce qu’il couche sur papier et qu’il n’ose jamais dire. Ce sont des choses qu’il ne s’avoue parfois pas à lui-même. Il les écrit pourtant, prétendant que ce ne sont que des pensées imaginées, chimères d’un autre. Fort heureusement pour lui, Somi ne s’attarde pas trop longtemps sur la question, pour l’instant du moins. Elle se confesse et il sourit. Encore. Toujours. Elle a cette façon de s’exprimer et de le regarder qui fait qu’il ne peut simplement pas répondre autrement. « J’ai bien fait de te demander de m’aider, dans ce cas. » Une aide dont il ne pensait pas réellement avoir besoin. Une excuse pour apprendre à la connaître, pour passer plus de temps avec elle, seul à seule. « Je suis bien content de ne pas être n’importe qui… Je n’aurais de toute façon pas cédé si facilement, tu sais ? » Il échappe un léger rire, sans gêne de l’aveu qu’il confesse. Elle ne le connaît pas encore bien, mais elle apprendra vite que lorsqu’il se met une chose en tête il est difficile de le faire changer d’avis. Il apprécie qu’elle ne le voie pas comme étant un parmi les autres, qu’elle le détache du reste de la foule. Car cela valide le jeu de séduction dont ils font preuve depuis quelques semaines. Cela valide qu’il n’est pas le seul à être sous le charme de la personne qui lui fait face et cela lui donne le courage d’amorcer un nouvel échange.

Nouvel échange qui propage en lui une douce chaleur de confiance. L’enfant terrifié d’aimer à nouveau se mue en un adolescent sûr de lui, en un jeune adulte confiant. Il se sent à sa place, là, contre elle, à goûter sa bouche délicate. Son coeur bat si fort contre sa poitrine qu’il s’en étonne l’espace d’une seconde. Il est habitué à ce genre de relation futile, à ses baisers que l’on ne partage qu’un instant tout en sachant qu’ils sont l’amorce d’un échange plus poussé qui ne signifie rien. Avec Somi, tout est différent car à ce baiser qui pourrait être si simple, il associe la promesse d’une relation qu’il compte chérir et dont il compte prendre soin. Il n’est qu’un enfant mais il se meut d’émotions et d’envies adultes. Prendre soin d’elle, la rendre heureuse, l’accompagner et la soutenir. Somi n’est pas une parmi tant d’autres et a bien des égards, elle est la première.

Il aurait pu lui dire autrement, mais par la phrase gravée sur son cadeau, elle lui permet de continuer à la charmer, de continuer à aligner les jolis mots qui pourraient sembler peu sérieux. Pourtant il pense chacune des syllabes qu’il prononce et Somi semble réceptive. Perturbée par la rapidité des choses, sans doute, mais réceptive. Elle hésite, elle s’approche à nouveau et Keita pourrait aisément rompre les quelques centimètres qui les séparent pour l’embrasser à nouveau mais il préfère attendre qu’elle vienne à lui cette fois. Il préfère qu’elle choisisse pleinement de valider ou non ce premier baiser. Les secondes semblent être des minutes et le stress grandit, comme si elle risquait de renoncer, se redresser et le laisser là. Parce qu’il a été trop pressé, parce qu’il n’a pas plus réfléchi. Et il semblerait qu’elle succombe à la tentation plutôt qu’à la raison car la patience de Keita n’a pas le temps d’être mise à rude épreuve. Somi revient pour un baiser plus sérieux, plus puissant et le jeune attrapeur se perd dans l’échange. Il laisse sa main gauche venir courir sur les hanches de la batteuse et jusqu’à ses reins, tandis que sa main droite vient se glisser sur la nuque de la blonde. Pour quelques secondes, elle est à lui. Pour quelques secondes, il se permet des gestes possessifs qui ne disparaissent qu’avec la séparation de leurs lèvres et la rupture du baiser.

Le silence s’installe quelques secondes, comme si chacun d’entre eux avait besoin de se remettre de l’échange. C’est finalement Somi qui reprend la parole pour avouer un côté de son métier que le cadet Tolkien déteste déjà profondément. Pourtant ce n’est pas la colère qui gronde le plus fort en lui mais bien l’envie de la protéger et la promesse qu’il ferait de son mieux pour ne pas mettre son secret en danger. Pas un instant il ne se pose la question de savoir s’il veut de cette relation dans ces conditions. Pour elle, aucune contrainte ne sera trop dure à supporter, il en est absolument certain. La main de Keita qui avait quitté la nuque de la jeune femme vient se poser sur son crâne et le tapote doucement alors qu’il lui offre un sourire qu’il espère rassurant. « Pour moi aussi. » dit-il d’abord avant de continuer « Jamais je ne te demanderais de faire passer ta carrière au second plan. Je ferais attention, nous ferons attention. » promet-t-il en essayant de faire taire son côté jaloux. Lui voudrait déjà dire au monde entier qu’elle est sa petite amie, qu’il a la chance d’avoir une femme comme elle à ses côtés. Pourtant il s’est promis d’être sérieux et cela commence par un sacrifice. « C’est excitant de se cacher, même si c’est clairement du gâchis... Et que je ne vais pas aimer voir d’autres hommes te tourner autour. » Il hausse les épaules, espérant qu’elle comprenne qu’il plaisante à moitié.

Bien que l’envie soit plus aux étreintes qu’à la concentration, Keita se recule légèrement pour reprendre en main le carnet offert quelques minutes plus tôt. L’ouvrant à la première page, use de sa baguette pour y inscrire la date et la mention « Premier jour » dans le coin gauche. Puis il traîne la pointe jusqu’au centre de la page pour y placer le titre de ce qui sera sa prochaine composition « Butterflies ». Gêné, il reste immobile quelques secondes, hésitant à effacer les lettres tracées. Au lieu de ça, il finit par regarder la musicienne et déposer sa baguette sur le haut du piano. « Peut-être pourrais-tu m’aider à trouver l’inspiration pour de nouvelles paroles ? » demande-t-il en espérant qu’elle soit réceptive à ce genre de phrase pouvant sembler un peu trop romantique pour certains.

we all broke our rules
for someone
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Quand sa question trouvait une réponse c’était une autre interrogation qui prenait le relais de sa curiosité sans fin. Alors quand Keita partage écrire lui aussi, ce sont deux prunelles brunes qui le fixent intensément pour une bouche qui reste pourtant close. Il y avait une certaine tempête qui se déroulait dans sa tête – elle se demandait quels étaient donc les sujets sur lesquels il composait, s’il partageait ses textes ou les gardait pour lui – comme des pensées secrètes couchées sur papier. Elle le toise plus longtemps qu’elle ne l’aurait voulu avant que ses lèvres ne se fendent en un sourire discret en guise de réponse finale. Somi sait que tout le monde n’est pas comme elle. La chanteuse l’avait bien compris que la grande majorité des personnes n’était pas aussi confortable qu’elle pour partager leurs sentiments, alors ça fait longtemps qu’elle a appris à le faire à leur place. Elle chante, confesse, ses émotions les plus pures, ses peines les plus lourdes et ses joies les plus précieuses dans des chansons écoutées par des gens qu’elle ne connait pas mais qui se reconnaissent dans ses textes et ses expériences personnelles. Alors c’est sa vie et une grosse part d’elle-même qu’elle partage avec facilité sur scène autant qu’en privé. Et ça attire autant que ça effraye. Alors elle se retient, aujourd’hui, de trop se livrer d’un coup et fait attention à ne pas trop l’envahir parce qu’ils auront tout le temps qu’ils veulent pour apprendre à se connaître.

Elle acquiesce vivement à ses mots. Il avait bien fait de la contacter pour lui demander de l’aide même si tous les deux savaient que cette approche avait caché bien d’autres intentions. Et ça lui faisait bizarre aussi de penser qu’elle aurait à remercier Andrea d’avoir fait le relais entre les deux kasai. Elle avait bien quémandé les avis de ses deux meilleures amies au sujet de Keita mais elle avait aussi senti l’approbation de l’anglais qui l’avait encouragé à maintenir son intérêt sur l’attrapeur des gsp. Elle avait alors joué le jeu du chat de la souris pendant plusieurs semaines – c’était assez de temps pour vérifier qu’il ne s’agissait pas que d’une passade, pour éviter la déception d’un flirt sans lendemain. Elle répond alors du tac-o-tac lorsqu’il affirme qu’il n’aurait pas facilement abandonné : « Je sais, il y a peut-être un trop plein de confiance dans le ton de sa voix, je veux dire… que je m’en doute, corrige-t-elle avec retenue, et c’est pour ça que here i am. » Elle lève les paumes de ses mains vers le plafond et hausse les épaules d’un air coupable et résigné. Mais tous les signaux sont là pour annoncer la suite.

Un premier baiser. Pour compléter ce qu’ils n’osent pas dire. Un geste que la blonde sentait venir mais qui la prend quand même de court. Il est furtif et elle sait qu’elle doit répondre quelque chose. Elle sait qu’elle doit rassurer Keita, lui montrer qu’ils sont sur la même longueur d’ondes, mais il lui faut plusieurs secondes pour calmer son cœur. Elle cherche quoi dire mais sa tête est désespérément vide – et c’est un comble pour elle de ne pas savoir mettre les mots sur ce qu’elle veut partager. Alors elle s’autorise à se rapprocher de celui qui l’a mise dans cet état et, après une courte hésitation, c’est à son tour de venir chercher ses lèvres. Puis vient le temps des avertissements, des mises en garde, qu’elle se sent obligée de partager avec lui mais il a ce sourire et ce geste réconfortant qui viennent tout de suite l'apaiser. Elle cligne des yeux et met un certain temps pour s’assurer qu’elle a bien entendu car elle a cette impression agréable, mais bizarre, de se retrouver des années en arrière dans la peau de sa version adolescente. C’est bon ? C’est officiel ? He's mine ? – Les questions restent et sa drôle d'incertitude aussi alors elle a presque peur de le quitter des yeux et le voir disparaître : tout a l’air trop simple et trop beau pour que cette journée soit vraie.

Elle sourit encore et encore lorsqu’il parle de sa carrière mais ses mots lui rappellent subitement leur écart d’âge. Rien de dramatique. Mais si l’assurance de Keita est un réconfort pour la chanteuse, elle ne peut s’empêcher d’y voir une naïveté. Parce qu’elle n’est pas sûre qu’il ait conscience de ce qu’une carrière, qui a besoin de passer avant tout pour subsister, peut avoir comme impact sur eux. Elle se tait pourtant et essaye de cacher son inquiétude – elle aurait mille avertissements et mille précautions à lui expliquer mais ne voulait pas donner l’impression de vouloir le décourager. Elle veut alors simplement croire ses derniers mots, s’accrocher sur l’espoir qu’ils feront attention et que ce sera suffisant.

« C’est excitant… au départ, elle rigole doucement pendant que sa main gauche s’amuse à mimer une mélodie silencieuse sur le bois du piano, après ça devient surtout… frustrant, voix douce pour un message subtil, de pas pouvoir faire ce qu’on veut, quand on veut. » Elle s’avance et s’autorise un long regard sur le sorcier – plus besoin de se cacher pour le contempler, plus besoin d’excuse pour l’admirer alors elle laisse ses yeux papillonner et s’attarde involontairement sur ses lèvres qu’elle veut réclamer. Encore. Elle soupire alors de sa lutte vaine à garder les idées claires – elle comprenait maintenant pourquoi Sofia lui avait conseillé un endroit plus intimiste. Elle se sentait stupide d’avoir à faire des efforts pour penser à autre chose que… lui. Et, comble de l’ironie, elle savait que cet état ne se dissiperait pas tout de suite. Elle esquisse un petit sourire embarrassé et secoue la tête de gauche à droite. « On me tourne pas vraiment autour, en vrai… » essaye-t-elle d’objecter sans être réellement certaine de ce qu’elle avançait.  

Elle l’observe prendre le carnet qu’elle lui a offert, curieuse de voir ce qu’il va en faire. Elle reste silencieuse quelques secondes après sa lecture du mot « butterflies » mais ses deux yeux ronds font des allers-retours entre la page et Keita : il lui demande son aide pour trouver l’inspiration.  Pourquoi était-elle surprise alors qu’elle pensait s’auto-proclamer professeur de musique l’espace de quelques heures ? Pourtant… les choses semblent avoir changé car c’est un autre titre auquel elle aspire. Elle avait une autre idée en tête qu’elle lui partage sans attendre : « Un peu comme une muse alors… ? » Elle ponctue sa phrase d’un rire léger avant de croiser les bras sur le dos de l’instrument pour y cacher son visage. Quand elle se relève elle essaye de reprendre son sérieux en ramenant l’un de ses cahiers devant eux puis ce sont des discussions animées, des rires, des œillades et des mots griffonnés qui rythment le reste de leur après-midi. Et, pendant qu’il écrit dans ce carnet si spécial, Somi sent ces fameux papillons lorsqu’elle pose une énième fois les yeux sur lui : He’s really mine. Elle se le répète jusqu’à se permettre d’y croire. For now, veut préciser sa tête, Forever ose espérer son cœur.