─ i got no time to talk no more

I got no time to talk no more
31.03.22
Trop longtemps qu’il s’abîmait dans la contemplation d’un Bae malheureux, d’un meilleur ami qui cachait son malaise derrière des sourires et des mots doux. Trop longtemps. La rupture fut l’élément déclencheur, la goutte d’eau qui fit déborder le vase (phrase qui aurait fait ricaner sa grand-mère si elle avait été là). Il fulminait, irradiait d’une colère qu’il connaissait peu, qu’il avait peu cotoyé par le passé. Une colère liée à l’amour, de celle qui bouillonne dès que l’être aimé est touché, démuni, désemparé. Il avait déambulé dans les couloirs toute la matinée : les résultats des exams venaient de tomber, les inscriptions pour le nouveau semestre venaient d’ouvrir. Et Tianyi devait certainement se trouver devant l’un des secrétariats, à zoner dans les couloirs ou à embrasser un nouvel élu. Il avait l’air de ne jamais en avoir assez, se ravissait de ses conquêtes et du mal qu’il pouvait semer sur son passage.
Kell ne l’avait jamais aimé. Ne s’en était jamais caché. À quoi bon ? Il était piètre acteur, n’avait jamais su afficher un faux sourire sur ses lèvres à l’évocation du prénom de l’étranger. Goutte d’eau. Ouragan oui, énormes vagues que Bae s’était pris dans la gueule ces dernières semaines. ASSEZ avait crié le lynx, ASSEZ avait hurlé son âme, ASSEZ s’était déchaîné son coeur.
Il le trouva, épaule qui disparaissait au détour d’un couloir. Épaule qu’il rêvait de déboîter. Une clavicule qui se casse lui parut soudain opportun. Le lynx rugissait, d’une colère noire, réelle, qui avait du sens ; du moins pour lui. Tianyi. Prénom qui lui râpa la langue, un prénom dégueulasse pour une personne qui l’était tout autant. Il se rapprocha, se tenait tout près. Les griffes ne se firent par prier pour sortir, dégainées comme les guerrières qu’elles étaient au côté de Kell, des fidèles alliées qui ne le décevaient jamais. Il attrapa l’épaule, la serra, fermement. Aurait aimé serrer plus fort, mais cela aurait été trop facile. Et il grinça des dents, retourna l’étranger, eut une seconde de sérénité avant que son poing ne s’abatte sur son faciès répugnant. That is for Bae. Don’t EVER think of touching him again, even look at him. Understand dickhead?

I got no time to talk no more
31.03.22
Il y avait un vide qui se creusait en Tianyi, et, peut-être que c’était la première fois que c’était un vide qui lui faisait mal. Parce qu’au fond, le vide, il y était habitué, Tianyi. C’était un état qui le suivait depuis qu’il était gamin, dont il avait voulu se débarrasser tellement de fois mais il n’avait jamais abouti. À chaque fois, il essayait des méthodes variées, et la méthode la plus efficace jusqu’à présent, c’était de briser les autres. Voir que, finalement, il n’était pas si seul dans ce monde, à être brisé. À avoir mal, continuellement, comme eux, les victimes qu’il détruisait. Alors il se noyait dans cette illusion, l’illusion qu’il pouvait lui aussi appartenir dans ce monde ; et une claque. Les gens finissaient toujours par se relever, par passer à autre chose ((mais pas lui)). Lui, lui toujours bloqué avec son vide. Mais il était trop fier, trop peureux, trop lâche pour oser regarder la vérité en face, Tianyi (la peur d’admettre qu’il n’aimait pas ce vide, qu’il aimerait se sentir plein, comme lorsqu’il était enfant et que Maman lui chantait une berceuse pour s’endormir). Puisant son plaisir dans la destruction des autres, cette fois, pourtant, il ne ressentit aucun plaisir.
Il s’était réveillé le cœur las, le lendemain de sa rupture avec Bae.
Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?
Pourquoi ?
Il aurait dû être heureux, se sentir satisfait, c’était ce qu’il attendait depuis des mois ! Et ce n’était pas parce qu’il ressentait finalement quelque chose pour Bae (non, il ne referait pas la même erreur deux fois, il ne reproduirait pas ce qui s’était passé avec Neji), non : c’était parce qu’il était déjà lassé.
Il était lassé de briser les cœurs.
Mais alors, qu’est-ce qu’il devait faire pour essayer de se sentir plein ?
Qu’est-ce qu’il était, s’il ne brisait pas les cœurs ?
((s’il n’était pas un monstre ?))
Affolé, paniqué, il avait rejeté Gaia, avait brisé son cœur aussi, l’avait perdue (et aucune joie encore une fois, bien sûr, pas de joie). Gaia était censée être la personne la plus importante pour lui, et il avait osé arracher ce sourire rayonnant de ses lèvres.
La culpabilité le rongeait, mais c’était trop tard. Il était supposé ne rien ressentir, Tianyi. Il était supposé être un monstre, uni avec son vide, complaisant dans son néant.
Alors dans les couloirs de l’école, il marchait normalement, se comportait normalement, comme si rien de grave ne s’était passé ces derniers jours. Il avait eu de bons résultats, à la hauteur de ce qu’il attendait, alors il devrait être ravi (c’était la seule chose qu’il avait réussi à contrôler, ça).

« Tianyi. »
Une voix qu’il ne connaissait pas mais qu’il allait rapidement devoir apprendre à connaître.
Une main griffée lui agrippa l’épaule, son uniforme peut-être déjà déchiré ; mais tout ça, Tianyi ne le sentit pas face à la puissance du poing sur sa joue, propulsant son visage sur le côté, douleur lancinante à la mâchoire. « That is for Bae. » Bae. Encore lui ? Il l’avait pourtant sorti de sa vie, et voilà qu’il continuait de lui poser des problèmes. Lentement, Tianyi se redressa, observa le visage qui se dressait en face de lui. Un regard enragé. Tianyi lâcha un sourire. Voilà quelqu’un qui allait le convaincre qu’il était un monstre vide, sans sentiments. Quelqu’un qui allait le remettre sur le droit chemin, le gifler si fort qu’il allait réduire en miettes le peu de cœur qui restait dans Tianyi et qui lui fera se dire, ah, oui, c’est ça que je suis.
Je ne suis pas supposé ressentir quoi que ce soit.
« That wasn’t my intention. He disgusts me too much for me to touch him, even lay my eyes on him. » Et il jeta un œil à ses mains, pleines de griffes. « The same goes for you. You look like a… gross beast. Haven't you ever learned manners ? Ugh. » Et juste après avoir fini sa phrase, il leva sa main devant le ventre de Kell et abattit un vent violent, le jetant dans un fracas sur le mur derrière. Tianyi entendait les élèves commencer à s’agiter autour d’eux, et il en riait. « Should we have fun outside ? I don’t mind hurting other people, but you do, don’t you ? » Comme pour prouver qu’il disait vrai, Tianyi leva la main et invoqua une tornade de l’extérieur, pas assez grosse pour vraiment faire des dégâts non mesurés, mais assez pour briser la fenêtre à côté d’eux ; elle explosa en morceaux dans le couloir et Tianyi laissa délibérément quelques morceaux s’écraser trop proche de certains élèves qui se mirent désormais à crier, mais en arrêta certaines dans l’air, les pointes dirigées vers le corps de Kell. Il ne fit pourtant rien ; se contenta de pencher la tête. « You can go first. » Honneur aux plus faibles, de sortir en premier.

I got no time to talk no more
31.03.22
Sa mâchoire se contracta à l'entente des mots durs que Tianyi débitaient à l'encontre de Bae. On aurait dit une litanie apprise presque par coeur mais qui n'en blessait pourtant pas moins. Il n'avait pas pour habitude de laisser ses sentiments guider ses actes, et encore moins sa violence. Il était plutôt du genre discret, à emmagasiner la haine, à la retourner vers lui-même et à s'infliger ses propres blessures. Mais tout ça était de trop, pour lui mais encore plus pour son meilleur ami qui ne méritait pas telle humiliation.
Ses griffes se rétractèrent sans qu'il ne le veuille lorsque la claque des mots le prit par surprise. Gross beast ? C'était un honneur familial que d'être animagus, et se sentir ainsi rabaissé ne fit qu'augmenter la haine qu'il ressentait à présent. Il n'eut pourtant pas le temps de lever le poing à nouveau qu'il fut violemment projeté contre le mur derrière lui. Son souffle se coupa et il s'effondra à genoux l'air arrivant difficilement jusqu'à ses poumons. Le lynx ruait en lui, appelait le sang, criait VENGEANCE VENGEANCE ! Kell était sonné, son regard noir ne put rien contre les nouveaux propos de l'être détesté et il vit avec effroi les brisures de verre se rapprocher de son visage.
Les cris des élèves qui les avaient entouré s'étaient transformés en brouhaha et il se releva tant bien que mal, ne quittant pas le Kaze du regard avant d'aggripper son col d'une main. Il serra fort, tournant légèrement le vêtement de manière à couper le souffle de ce connard. Et les griffes sortirent l'une après l'autre, venant effleurer la peau fine juste là, sous le menton. My hideous monster claws will always inflict more damage than your miserable glass. Et pour appuyer ses dires, il serra encore plus fort et fit avancer Tianyi tant bien que mal pour passer la fenêtre désormais ouverte. Let's go together, shall we?
Les battements de son coeur assourdissait les bruits environnants, et il ne pensait plus qu'à frapper l'autre, encore et toujours. La rage, la soif de sang ne s'était jamais faite aussi vive qu'aujourd'hui et il poussa le Kaze en arrière une fois arrivé à l'extérieur, ses griffes allant se planter dans l'épaule avec que l'autre ne tombe, déséquilibré. Il serrait. Fort. Toujours plus fort. Sentait qu'il avait transpercé la peau, qu'il laisserait des cicatrices, des marques indélébiles. Is that all you have in your belly, little air wizard? Ricanant, il relâcha la victime et la vit perdre l'équilibre. Come on, show me how you make other people suffer. That's all you're good for anyway. Didn't get enough love when you were a kid, did you? Typical of assholes like you.

I got no time to talk no more
31.03.22
ILe chaos sévissait, les élèves s’enfuyaient, et certainement que les professeurs allaient rapidement être prévenus de la bagarre qui était en train de se créer, alors Kell et Tianyi n’auraient peut-être pas beaucoup de temps pour se battre avant qu’un professeur n’intervienne et les sépare de force. Mais peu importe au final : Tianyi ne pensait pas à ça, dans l’immédiat. Dans l’immédiat, il voulait détruire Kell, lui qui avait osé lever la main sur lui. Plus puissant que lui, Kell agrippa le col de Tianyi et le souleva d’une main, la force d’une bête l’accompagnant. Tianyi sentit son souffle se faire couper et il grimaça (quelle ironie, de manquer d’air en étant un kaze). Il sentit les griffes effleurer sa peau, capables de laisser des marques indélébiles sur sa peau (car ça ne se soignait pas facilement, les traces magiques laissées par une bête). Dans les airs, manquant d’air, Tianyi était complètement à la merci de Kell, et les voilà à passer tous les deux par la fenêtre ; ce serait pourtant innocent de penser que Tianyi allait s’en sortir avec simplement une chute sur le dos, qu’il pourrait facilement amortir grâce à son godai. Non, évidemment, Kell vint planter ses griffes dans l’épaule de Tianyi, arrachant un cri de douleur à ce dernier. Les griffes envoyaient des décharges électriques partout dans son corps, la douleur se propageant telles des ondes, réveillant chaque parcelle de sa peau, qui s’étouffait, criait, pleurait. Ça brûlait, brûlait, brûlait, mais Tianyi n’avait pas d’eau pour apaiser sa souffrance, et aperçut le sang qui gicla quand Kell le relâcha. La vue se faisait trouble, mais il distinguait encore les couleurs, distinguait encore plus Kell, à présent. L’ennemi à abattre. Humilié, il grinça des dents, serra sa mâchoire, la rage explosant dans son estomac. « Didn’t get enough love when you were a kid, did you ? » Comme s’il allait bientôt mourir, les souvenirs fusèrent devant ses yeux : sa mère répétant le nom de son père qui les avait abandonné à sa naissance, sa mère qui le couvait d’amour, et puis son regard de glace quand elle avait compris qu’il était un sorcier, les yeux complètement indifférents quand il était parti parce qu’elle l’avait oublié, et enfin, la solitude, la solitude, toujours rien que de la solitude ; mal aimé. « Typical of assholes like you. » Tianyi serra le poing, levant le bras de l’épaule non endommagée, l’autre si endolorie qu’il ne la sentait même plus. « You fucking bastard, » marmonna-t-il. Et dans un accès de colère, Tianyi utilisa un sort qu’il ne maîtrisait pas encore tout à fait : la capacité de réduire ou d’augmenter drastiquement la température de l’air dans un espace cantonné, de sorte à rendre toute vie impossible. Parce que oui, c’était ça : à ce moment précis, Tianyi avait envie de voir le cadavre de Kell devant ses yeux, enragé par ce qu’il lui avait fait, par ses mots, par sa nature de bête. Alors il fit bien plus froid d’un coup, la végétation mourant subitement autour de Kell ; mais parce qu’il ne maîtrisait pas encore complètement le sort, la vie restait encore possible, la température pas suffisamment abaissée pour que ça ait de graves conséquences pour un être humain. Ça restait tout de même difficile de respirer avec un air aussi froid, alors Tianyi se mit à ricaner (c’était bien lui le monstre à la nature de bête ; pas Kell). « Do you like it ? I thought the cold could remind you of your homeland, » réussit-il à articuler malgré la douleur à l’épaule. Il pourrait sortir sa baguette pour essayer de soigner ça, mais il savait que s’il le faisait, ce serait donner une ouverture pour que Kell l’attaque et ça, c’était hors de question. Il préférait saigner que de baisser sa garde, et pourtant, le monde paraissait bien flou.

I got no time to talk no more
31.03.22
Il ne pensait pas en arriver là aujourd'hui, dans un tel état de rage qu'à la seule vue de l'autre, il frémissait de dégoût. Il n'était plus seulement question de Bae désormais, Tianyi l'avait blessé lui, lui balançant des saloperies qu'il ne souhaitait pas entendre. Et lorsqu'il avait relâché l'ennemi de ses griffes, il avait réellement cru que le combat s'arrêterait là. Mais c'était sans compter sur un godaï bien trop dangereux à son goût.
Le froid l'entoura soudainement, et ses yeux sondèrent les alentours pour comprendre cette différence de température et cette soudaine envie de s'effondrer sur le sol, de se rouler en boule pour se réchauffer. You really are.. mais les mots moururent sur ses dents qui claquaient entre elles. Le regard noir qu'il jeta à l'autre n'allait sûrement pas l'arrêter, mais c'était la seule action qu'il pouvait effectuer, à défaut de parler et de l'insulter de tous les noms. Les mains se tendirent, les articulations douloureuses mais les griffes toujours sortis. Un pas après l'autre, il tenta de se rapprocher de l'adversaire, gémissant sous cette douleur nouvelle. Fucking hell expira t-il dans un nuage de buée blanche, you never learn bégaya t-il. Et il s'effondra, tomba à genoux sur un sol glacé et dégaina sa dernière carte : griffes qui partirent à l'assaut, se plantèrent dans les chevilles, pour destabiliser plutôt que blesser réellement. Il voulait seulement avoir moins froid. Fuck you! Et il s'effondra. Attendant avec espoir que la douceur printanière l'entoure à nouveau, son animagus mugissant de douleur au creux de ses reins.