shadows and regrets (jovan)

Pour les apparences, rien de plus. Pour les galions, pour éviter quelques cris, liberté maintenant acquise, elle a les pieds sur le marbre devant la maison. La porte d'entrée qui fait peur. Cette envie de disparaitre en fumée dès maintenant et se dissimuler dans un coin, loin des conversations stupides. Il y a les souvenirs d'enfance un peu trop douloureux. Ce sentiment d'avoir les poumons compressés par le manque d'oxygène. Rentrer dans le manoir c'est perdre encore un peu plus de lumière, de vie dans ses prunelles. Hi, home Elle ignore combien de minutes elle reste ainsi, jusqu'à finalement pousser pour rentrer. Silence cuisant, personne dans le champ de vision sur le coup, elle attend déjà sa mère qui pourrait revenir d'un moment à l'autre. Les commentaires qui fuseront : Lili qu'est-ce que tu portes ? Lili, pourquoi as-tu encore des blessures ? Lili rentre à la maison. Mais Lili elle est loin maman. Le sac contre l'épaule, elle gravite les grands escaliers. Les chambres, cage horrible dorée. C'est pas les tapisseries qui rendent le monde plus beau. C'est pas les objets de luxe, les tableaux des ancêtres qui donnent envie d'y rester quand tout ce qu'il reste c'est l'odeur âcre de la solitude et de la famille qui ne s'assume pas. Enfants horribles, quelle honte pour les Dragović. Elle retrouve sa chambre, à sentir la nausée qui lui remonte jusqu'à la gorge. Le corps qui voudrait partir en fumée en une micro seconde, mais elle reprend le dessus, jusqu'à entendre des bruits en fond. Oh oui, elle les connait tes sons. Jovan, seul fils, héritier déchu, héro de jeunesse, accumulant les déceptions pour la plus jeune. Tu n'es plus rien à ces yeux. Alors dans le cadre de porte, elle le juge déjà, les grimaces. La langue vipère a pourtant du mal. Seule victime qui échappe aux pires courroux de la benjamine. Si tu savais comment je t'en veux d'être parti comme ça. Tiens...toujours le même scénario au final. Les bras qui se croisent, l'épaule qui prend appui contre le cadre. Franchement tu fais de la peine à regarder. Parce qu'ils savent bien tous les deux qu'ils sont de la même veine. À se révolter haut et fort. Mais si pendant que Lilijana hurle, Jovan finit toujours par revenir en rampant et ça la dégoute. Il a tellement mieux à gagner s'il s'efforçait.

---

«Ça te trouerai le cul de m’aider à chercher toi ?» pestiférait le fils Dragović, son regard ancré sur son molosse à demi-endormi. «Les bonnes femmes, on peux rien leurs demander.» Ses doigts fins passaient de fioles en fioles, faisant tinter le verre à tout va, ses deux éclats de mithrils quittant l’animal pour se poser devant des étiquettes rendues illisibles par le temps. «On peut vraiment rien laisser dans cette baraque de merde.» Perdu dans son organisation désorganisée, le blond s’impatientait devant le feu crépitant sous le cul de son chaudron installé à même le sol de sa chambre d’enfance. Son compte en banque était tombé à zéro galions, pas d’autres choix que de retourner chez Papa et Maman s'il ne désirait pas finir à la rue. Le pieds à peine posé au sein du manoir qu’il avait déjà été prit au piège d’un conflit familial, agressé par sa banshee de cadette puis par des parents mit en rage par le nouvel état de sa chambre. 27 ans et voilà qu’il se faisait encore gronder pour les bêtises de leur petite préférée, à quand cette injustice s’arrêterait t-il ? Il prit une profonde inspiration avant de se retrancher dans sa chambre en en claquant la porte. S’il devait rester dans ce fichu manoir le temps que ses parents renflouent son compte en banque, alors il le ferait d’ici. Jovan était persuadé que moins il verrait ces pétasses peroxydées qui lui servaient de sœurs, mieux il se porterait. Retranché dans sa chambre, il s’y faisait servir ses dîners ainsi que ceux de sa fidèle amie à poils que sa famille n’avait encore prit le temps de rencontrer. Le blond n’avait quitté sa chambre qu’une trentaine de minutes au cours de la nuit dernière pour piller cette salle d’alchimie où il avait passé une bonne partie de son adolescence. «Ah ! Voilà !» qu’il s’exclama en soulevant du sol la fiole d’ingrédient tant recherchée. Il y glissa ses doigts et se disputa avec des feuilles séchées qui ne semblaient pas vouloir sortir du contenant en verre. «Allez … Fille de pute !» L’impatience qui pulsait sur son front. Jovan Dragović dans toute sa splendeur, assis à même le sol d’une chambre bousillée de toute part, occupé à se battre avec un paquet de feuille, sous le regard désespéré d’un canidé épuisé. Le blond mettait tout son cœur dans cette décoction, c’est qu’il jubilait déjà à l’idée de glisser quelques gouttes de sa mixture dans le thé de Divna, cette potion purulente serait de loin sa plus belle vengeance. Les sourcils de l’épouvantard se froncèrent lorsque la voix de la dernière née Dragović retentit contre les murs de la chambre. Il soupira en relevant les yeux vers elle et soupira à nouveau en la voyant, là, accoudée au battant de sa porte. Durant une fraction de seconde, il s’était dit qu’il aurait préféré avoir eut une hallucination que de devoir supporter l’importune. La chienne releva la tête et dévisagea la petite blonde, sa babine tressauta, la canidé ne semblait guère apprécié l’aura de la nouvelle venue. Et Jovan se mit à grogner, en même temps que son amie. «Génial, une chieuse de plus. Comme si j’avais pas déjà assez à faire avec cette pétasse de Divna. T’viens défoncer ma piole, toi aussi ? Désolé, mais elle ne t’a pas laissé grand-chose à briser.» Il ajouta un nouvel ingrédient à sa mixture qu’il se mit à remuer. «Tu veux quoi au juste ? Magnes toi, j’ai pas que ça à faire. Et j’suis pas d’humeur à supporter tes conneries. Ma potion va pas se faire toute seule.» Maintenant que la petite peste de service était là, l’étudiant raté allait peut-être changer de cible.

---

À leurs yeux elle n'est qu'une chieuse de plus. Un gâchis en tout point d'une fillette précieuse qui leur a glissé entre les doigts. La majorité avait été un danger précieux. On ne pouvait plus la garder sous une cloche. Et à partir de moment que les ficelles se sont relâchées, le retour en arrière n'a jamais été possible. Et pourtant, il le sait ce goût de liberté qui devient vital, une drogue bien vivante. Il s'est éclaté plus d'une fois. Mais elle préfère agir comme s'il n'était pas pareil. Elle ne peut pas accepter sa lâcheté dont il fait preuve. Comment il rampe au sol devant les géniteurs, à réclamer les galions. Elle ne voulait qu'un allié pour gueuler ensemble contre les envahisseurs s'efforçant de croire qu'ils n'étaient pas des montres. Pas une honte dans l'arbre généalogique pour quelques anomalies dans leurs sangs qui les rendait simplement différemment. Et leur ressemblance pue à leurs nez, suffit de voir comment il se bat pour pourrir la vie de la première victime de lili. La chambre délabrée qui ne lui saute pas aux yeux tout de suite. Elle préfère le détailler de toute part, cherchant les traces de ses dernières querelles contre sa propre personne. Les bas-fonds dans lesquels il traine pour l'emmener directement aux enfers. Le sourcil qui se hausse, les bras croisés contre le cadrage de prote, le regard océan détaille enfin les débris. Elle a toujours eu si peu d'imagination. Si je voulais te faire chier, je ferais mieux que défoncer ta foutue chambre. En plus ça demande trop d'efforts pour si peu de réaction de ta part. Tu peux tout ranger en un coup de baguette. Les prunelles qui trouvent une nouvelle cible, la potion qui fume dans le chaudron, elle s'intéresse peu au chien qui n'apprécie pas sa présence pour autant, envahissant l'espace de l'ainé en moins de deux. Humf pourquoi autant de mal pour une potion stupide. Et dans une gestion rapide, elle lui arracha les feuilles tant voulues de ses mains, les examinant entre ses doigts un sourire en coin, s'approchant de l'immense fenêtre l'ouvrant après quelques mots glissés. Et il se passe quoi si je les fais disparaitre ?. Fais pas le choquer, tu vas devoir me supporter encore tout le week-end. Ça serait triste que tu t'emportes déjà. dit-elle les doigts toujours tendus dans le vide en le défiant, le sourire si insolent. Cette peste qui ne s'arrête pas. Ils sont désespérants à voir, à se détester quand il pourrait s'allier.

---