❀ papillons de fumée (uji・aki)

Accalmie nécessaire, pour survivre au reste de la soirée. Le corps lové contre le marbre précieux cerclant l'un de ces points d'eau factices, tout du long des jardins. Réfugié, là contre son élément, loin du tumulte des corps enhardis par l'alcool et le désir. Son esprit à lui aussi n'était que chaos. Assailli par des sentiments contradictoires, houleux. Le bonheur, aux côtés de certains. Et la terreur, face à ceux qui empruntaient un sentier dangereux. Visage anguleux niché au bord de cette fontaine, faisant danser ses doigts machinalement par dessus l'imperturbable courant. Indomptable, pour le commun des mortels ((sorciers)), mais pas pour lui. Maître des flots, des marées et tempêtes. Besoin de déverser sa peine, sa douleur. D'agiter l'eau, pour faire écho à son mal être intérieur. Une première onde, douce, vint fracasser la tranquillité de la surface. Puis plusieurs. Bientôt des formes, s'élevaient des profondeurs. Papillons et autres féeries entamant une valse impromptue. Un spectacle saisissant. Follement beau. Que personne n'avait le plaisir d'observer. Que personne ne devait découvrir. Car voir l'eau ainsi se déchaîner, c'était comprendre les travers de son esprit torturé. Inacceptable. Et pourtant, il continuait. Criait en silence. Se servant de son art, subtilement, pour communiquer. Espoir sourd qu'on vienne le sauver. Qu'on daigner le regarder. Et comprendre.

Un instant. Ou une éternité. Aucune idée, du temps passé. Mais il fallait y retourner. Assassiner cette moue boudeuse, fatiguée, pour refaire naître la glace. Erreur fatale, que de se révéler avant même d'avoir éteint toute émotion. Collision inévitable avec cette frêle nymphe. Himari. Ce jouet, qu'il ne voulait plus. Qu'il n'avait, jamais, vraiment voulu. Trop cruel, que de l'utiliser pour en affliger un autre. La rage incarnée, qu'il adulait plus qu'il détestait, tout compte fait. Ujinori sentit, qu'il perdait le contrôle. Face à une bienveillance si prégnante qu'elle l'illuminait. Des mots prononcés parfaitement. Parfaitement comme il le voulait. Parfaitement pour qu'il sente toute force l'abandonner. Le sourire était triste, beau. Sincère, pour la première fois à ses pieds. - Himari-san. La politesse retrouvée, enfin. Elle ne méritait rien d'autre que ça. Que son prénom soit prononcé, avec la déférence nécessaire. L'alcool agissait, violemment, mais pas suffisamment pour justifier ce qu'il était sur le point de faire. S'effondrer. Le visage tombant, venant rencontrer dans une délicate chute le front de son interlocutrice. - I need everything. But you can't give me anything, can you ? Souffle contre souffle, le petit prince comme aspirait ce bonheur qui lui était présenté. Voyait son visage s'illuminer, de candeur. Un chaton transi, apaisé d'enfin retrouver sa maîtresse (([Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien])). - Thanks. For being a decent fucking human being.

Les basses frappent en écho contre son front, et la musique de la soirée s’alourdit dans un son qui remue tout son torse. Les ailes ont disparu, abandonnées dans un coin de cet olympe éthéré, débarrassé de leur gêne pour mieux enchaîner les excès. Les verres se multiplient et anesthésient sa trachée, alors qu’il se laisse emporter par une agitation dans laquelle il se fond ; énergise ses passions et ses démons. Tout autour de Akira s'amplifie un élan qui le happe, qu’il fait sien, qui repousse les limites et que rien n’arrête.

Fièvre de la nuit, brûlure de l’alcool, effervescence qui l’encense. Baignant dans ce bouillonnement ambiant, de ceux épris par les mêmes ardeurs, laissant le teufeur prendre le dessus. Entre rires trop bruyants et hurlements de défis, les verres qui s’entrechoquent et les shots qu’il ne compte plus. Les pensées ont coulé sous les litres d’alcool, la raison lénifiée par les degrés, Akira incarne une énergie débordante, une chaleur ardente et il les laisse s’épandre dans la foule.

Second souffle, air presque froid lorsqu’il s’éloigne par besoin de se désaltérer, attrapant une bière. Le verre frais et humide qu’il vient faire rouler contre son front dans un geste réflexe. Mais lorsqu’il relève les yeux pour répondre à Seiya, ce n’est pas son meilleur pote qu’il voit. Derrière lui, plus loin, il distingue les reflets clinquant d’Ujinori. Instant de flottement où il n’entend plus rien, comme un profond sifflement qui retient tout autre son de trouver ses tympans. yo, wait, d’une main pressée, il interrompt Seiya et s’écarte. i’ll be right back, la voix érayée par la soirée tombe dans l’oreille du frère laissé sur place. Mais guidé par ses colères, Akira ne réfléchit pas.

Tornade qui échappe à toute prise, se fraye un chemin dans la foule sans perdre de vue ce que ses yeux lui ont imaginé. Une veste d’or et – cette toge blanche, qui ressort dans l’obscurité de la soirée. Tunnel vision qui le laisse pantin de ses instincts, et en quelques pas il avale la distance, et les doutes ne sont qu’une évidence. Coups d’épaules rageurs qui ne mesurent pas leur force, et ignore les protestations jusqu’à atteindre sa cible. Les plumes disparaissent derrière la carrure faite de richesse, surplombée par celui qui fait face. Himari Mais il sait déjà. Il sait déjà, et c’est trop tard.

Ne s’entend plus penser, ne s’entend plus respirer et pourtant Akira fulmine sans être capable de se l’expliquer – cède à cet état second incontrôlé, et attrape brutalement les épaules de l’enfoiré qui a déchaîné sa fureur pour l’éloigner. You son of a – Amorce un pas en le poussant avec force pour le faire reculer, frappant son torse. Voit rouge, mais n’oublie pas de la voir elle, quand il attrape le poignet de Himari sans hésiter, l’attirant avec lui. The fuck you doing ?!, tempête dans ses mots à l’adresse du molosse glacé.

Pour l’avoir trop de fois confronté dans ces soirées qui ont mal tourné, pour se retenir plus qu’il ne le voudrait quand le cadet le fait vriller dans ses jeux mauvais. C’est une fois de plus, une fois de trop, quand il s’en prend à elle, sous ses yeux. Leave her the fuck alone, hear me ?? les récentes révélations d’Atlas ne font qu’amplifier sa rage, et le démon engourdi retrouve son incendie en sentant cet Autre face à lui. Show yourself and you’re so dead.

Tout espace vital envolé, par cette excursion aux abords des lèvres de cette presque inconnue. Délicat visage connu seulement au travers du prisme de cette haine-amour qu'il vouait au démon. Rien de tout cela ne comptait, pourtant, en cet instant. Fatigue et tristesse le faisaient ployer. Devant ce soleil. Sur ce soleil. Pourquoi était-elle si gentille ? Pourquoi ses gaucheries rayonnaient d'une telle manière ? Incompréhensible. Désintérêt, de comprendre. Car cela ne changeait, changerait, rien. Cette lumière le réchauffait. Le pourquoi du comment n'avait que peu d'importance. Litanies résonnant toujours aussi délicieusement dans le creux de ses oreilles. Voix douce comme de la soie, venant instiller bonheur et candeur au plus profond de son âme. Instant privilégié, doré. Désir coupable de rester contre elle, à s'abreuver de son éclat. Mais rien n'était éternel. Pas pour elle. Encore moins pour lui. Et certainement jamais avec celui qui faisait palpiter chaque cœur, d'ardeurs bien différentes. Surprise, en la sentant s'éloigner. En voyant le soleil se coucher, pour que la nuit reprenne enfin ses droits. Violence trop soudaine, rapide, pour la saisir parfaitement. L'air expulsé de son corps, par l'adresse de ce coup de poing furtif. Tout tournait. Le souffle était rauque, désespérait. Plus rien n'allait, et c'était de sa faute. Toujours de sa faute. La gangrène n'avait jamais été aussi belle que sous les traits d'Akira. La bataille, savamment planifiée, s'enclenchait enfin.

Pitoyable. Oui, de la pitié. Voilà ce qu'Ujinori ressentait, en les observant l'un contre l'autre. Celle qui pâmait devant celui méritant la potence. Celui qui défendait ce qu'il cherchait autrement à avilir. Éclat de rire en plusieurs temps, découpés par les quintes de toux provoquées par le précédent coup. La douleur lui brûlait le torse, mais le petit prince se sentait vivant, d'ainsi souffrir. Sentait enfin la chaleur l'inonder. - What the fuck is wrong with you ? Introduction nécessaire, entre vulgarité et dégoût. Difficile de savoir précisément ce qu'il se passait, mais Ujinori pouvait deviner. Supposer, ce qu'il se tramait réellement ici. Entre eux. Eux deux. Eux trois.  - How stupid can you get ? She is not your propriety. And even if she was, nothing was happening. La glace revenait, doucement mais sûrement. Lui permettait de prendre ses distances. S'élever au dessus d'eux, et les juger. Les accabler, pour avoir osé mentir aussi piètrement. - You're such an hypocrite. Treating her like your plaything all the time. Humiliating her in front of everyone. And now you're her knight in shining armor ? Protecting her from what ? Me ? She needs protecting from you, asshole. Ujinori jouait, souvent, mais pas en cet instant. Pour la première fois depuis bien longtemps, ce qu'il disait n'était que le reflet de sa propre vérité. Atterré, face à cette injustice. Cette bêtise.

- I did nothing. Would have done nothing. Hors de question de sacrifier qui que ce soit, surtout pas Himari, dans cette quête puérile de défaire son ennemi. Unique possibilité de fuir, de tourner le dos à cette situation qui, au fond, ne le concernait pas vraiment. Mais pourquoi rater une aussi belle occasion de le remettre à sa place ? De le faire déchanter, lui qui derrière ses airs de mauvais garçon, semblait perdu dans un conte de fée. - So what's the deal ? Are you jealous ? N'était-ce pas ça, la raison de ce conflit ? Aucune certitude, mais c'était l'hypothèse la plus censée. Et Ujinori faisait dans la logique. Ne laissait plus son cœur parler. Car quand il s'exprimait, son monde tout entier finissait par s'écrouler. - Getting hard bullying her ? You fucking freak. L'insulte de trop, sûrement. Déplaisir évident, dans son timbre, sa posture. Prêt à en découdre. Prêt à lui faire comprendre, coup après coup, à quel point il était monstrueux. Presque aussi monstrueux que lui. Si Akira n'était pas déjà venu explorer son épiderme, de son poing, les choses auraient peut-être, peut-être, pu en finir là. Quelques insultes jetées au vent. Mais il avait osé. Osé s'approcher. Osé faire fleurir le rouge sur lui ? Inacceptable. Alors les doigts dansaient. De cette même danse entonnée quelques minutes auparavant. Celle agitant l'eau. Celle faisait naître un courant entre ses paumes, aussitôt projeté sur celui qui brûlait, et risquait d’entraîner dans son incendie le reste de la société.

Regards hostiles braqués sur lui, comme si à travers sa rage on en distinguait l'oni. aura du maudit qui s’attire toutes les infamies, les yeux incendie qui appartiennent aux enfers, brûlent de colère. les mots amers sont tout ce qu’il récolte à peine arrivé, venu chambouler leur intimité, ce moment qu’il a saccagé plutôt que de savoir le voler. sous la rage qui gronde dans sa voix, il n’y a que celle d’ujinori qu’il perçoit. la protestation d’himari ricoche dans le vide, sous les accords violents des deux chiens qui s’aboient dessus. la frappe arrive assez tôt pour écarter cette proximité qui l’a fait vriller.

Il voudrait l’envoyer plus loin, le foutre dans un coin et le terrasser contre le mur, si fort qu’il finisse par s'éclater dessus, ou se fondre dedans, hors de sa vue. les envies de violences lui fracassent l’esprit et l’oni s’en gorge, gavé par la haine qui l’enflamme. Ce n’est plus seulement la fièvre de l’alcool qui s’empare de ses efforts, mais celle d’une magie qui frissonne sous sa peau, lui arrache des brûlures dans tout le corps. elle est bien loin, la voix de himari, qui supplie presque, mais se veut vaillante. tentative échouée qui ne lui arrache qu’une grimace de dégoût. yeah i’d be sick of myself too if i was him. et elle ne comprend rien putain, persiste à vouloir s’opposer à toute offense, se dresse en bouclier malgré elle. ça lui tord le ventre, plus encore lorsque son poignet lui échappe et qu’elle quitte sa prise, quitte sa main. les yeux encore bruns se précipitent sur le visage irrité de himari qu’il foudroie malgré lui – comme si il était seul à détenir l’évidence. go back to your girlfriend, please. et la demande ne fait aucun sens, se répercute à sa propre figure défaite par la [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]. what the shit are you talking about ?, les sourcils toujours froncés sous les nerfs, il lui faut quelques secondes pour percuter. ain't got no fucking girlfriend, c’est quelle genre de tentative pour l’envoyer chier, ça ? putain.

Et si elle préfère tenir la distance, il n’en a rien à foutre, du moment qu’elle la maintient aussi avec l’autre enfoiré qui ne manque pas une miette de leur échange – désordre qui ne fait qu’amplifier le chaos de ses pensées. c’est toute cette situation qui lui fout les nerfs. de voir ujinori tourner trop près d’himari, et de savoir quelles crasses il a plein les mains. and his mouth’s full of shit. ce crevard la ramène, attisant le brasier. nothing was happening. de quoi l’enrager davantage persuadé du contraire, l’accablant des pires intentions. cut the bullshit, you're just a fucking prick sicking attention and problems. ça lui demande un effort de taré de pas lui attraper le col direct et de lui en coller une. Lui enlever son sourire d’insolent et lui faire fermer sa gueule.

you're such an hypocrite. croit avoir mal entendu, et s’avance plus près, le pas lourd et le regard défiant pour contrer l’audace qui lui fait face. i’m a what ? come again ? les mots adversaires s’enchaînent d’un calme glacé qui exalte sa colère. treating her like your plaything all the time. Humiliating her in front of everyone. la figure se mue en dégoût sans rien rétorquer. and now you're her knight in shining armor ? – you don’t know shit. – protecting her from what ? me ? she needs protecting from you, asshole. un pas de plus, et la menace se rapproche. shut the fuck up.

Et si en surface il ne transparaît qu’une palpitante haine sur le point de déborder, à l’intérieur, quelque chose s’est fracturé. il fulmine et son souffle et à deux doigts de trouver celui de ujinori, tant il ne peut retenir davantage la vague de lave qui l’assène en lui-même. mais cette même fureur, elle le consume tout autant, d’une vérité qu’il est le seul à entendre en réalité. parce que ujinori ne sait pas à quel point il a raison. mais akira, si. et en toute sobriété, il préfère encore se le cacher. he’s the real danger. they’re the real danger. i don’t want to hurt her. mais les provocations se poursuivent, dans un affront qu’il n’a plus la patience d’encaisser. plus du tout. à chaque nouvel écho de la voix sifflante qui le fait vriller, il vient le chercher au plus près. incapable de réfléchir. seule la colère tourne en boucle. et la violence au goût rance, qui lui dévore les tripes, galvanise l’oni. so what's the deal ? are you jealous ? – shut up. – getting hard bullying her ? la main vient trouver le col ouvert, les richesse de l’étoffe froissées dans sa poigne enragée. shut – – you fucking freak. up.

Et le poing décolle, phalanges serrées, blanchies par la pression qui les resserre dans une fureur qu’il lui colle au visage. le nez de ujinori s’éclate sous les jointures, qui se couvrent de sang. fuck it feels good. une bouffée d’air qui s’engouffre dans ses poumons, galvanisé par le geste qui lui tarde déjà de relancer. s’en offre le luxe une deuxième fois, toujours en le retenant à sa prise par sa veste rutilante, sentant les mains – glacées – du gamin s’éprendre à celle qui le tient. le relâche sans qu’il ne trouve le sol, comme par lassitude d’avoir obtenu ce dont son cœur crevait de désir. you’re worse than me.

pas le temps de se détourner pour trouver le regard de himari – quoiqu’il n’a même plus envie de discuter, en réalité. la croiser pour quoi, après ce qu’il vient de se passer. alors qu’ils ont l’air de se parler sur deux fréquences différentes. le temps [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] – mais c’est déjà trop, juste assez pour le distraire et laisser le temps au crevard de faire exploit de ses talents ; en un instant, akira est projeté d’un jet dans l’eau de la fontaine derrière lui.

l’ultime affront, sans déconner. c’était pas suffisant de lui jeter un verre dessus, ou de l’insulter, il fallait qu’il l’humilie jusqu’au bout. y’a rien de pire que l’humiliation, surtout avec un ego de mec mal placé comme le sien. akira se relève de faire trempette aussi vite que ses fringues collantes lui permettent, essuyant son visage d’un geste sec (quelle ironie). pas le time de formuler la moindre menace, qu’il se précipite vers l’arroseur, détrempe le sol sur son passage, tandis qu’il l’attrape par le col une fois de plus, mais cette fois assure sa prise des deux mains, pour venir l’éclater (enfin), contre une colonne tout près. goutte à goutte, pas à pas. crache l’excès d’eau qui trouve ses lèvres aux pieds de ujinori – injure à moindre mesure. listen up you little shit – here is not the place, but the moment you’re out, you’re fucking dead. pressant de toutes ses forces ses deux poings sur le torse du garçon ; l’étouffer le temps de parler. watch your steps, ‘cause i’mma fuck you up the moment you least expect me. you gonna pay for what you did. brûlure au fond des mots, mêlant le présent et les secrets, quand le regard s’assombrit, voilé de celui de l’oni.

that’s what it feels like to face one of them. what he has done. what he saw. haine-dégoût. perdu entre les provocations impliquant himari, et les horreurs qui se terrent en lui.

Ça pourrait s’arrêter là. ça devrait s’arrêter là. mais akira ne le lâche pas. encore trop imprégné par ses élans destructeurs, les envies brutales de loger brusquement son coude dans ses côtes, ou son genou dans ses boyaux. muscles tremblants sous l’appétence des violences qui le rongent. son feu intérieur qui le consume un peu plus.

Les mots s'abattaient contre lui, comme une pluie d'été, torrentielle et brûlante. Mais de cette rage bouillante, qu'Akira essayait d'instiller en lui, Ujinori ne ressentait que glace. Et le glas de son existence sonnait, violemment, au creux de ses tympans. Les injures ne comptaient pas. Cinglaient, de la bouche de ce cinglé, mais ne marquaient pas. Qu'il l'accable, l'agresse, il était sans importance. Une nuisance. La nuisance de trop. La plus visible. Mais ainsi allait la vie. Les échanges de ses interlocuteurs ((agresseurs?)) le laissaient pantois. Confirmation implicite de ce qui les liait. Himari toute aussi jalouse. Peut-être même plus que lui. De l'amour, alors ? Ou quelque chose dans ce genre là ? Éclat de rire sonore, moqueur, sans même expliciter la cause de son hilarité. Visage transformé par le dégoût. Mauvais choix, que de s'être immiscé dans cette situation. Regret immédiat, car au fond tout cela ne l'intéressait pas. Plus qu'à soutenir cette lâcheté, ce danger. Faire face au démon. Trop d’ego, pour s'incliner. Pour reconnaître ses torts. Mais le petit prince n'avait même plus envie de défendre ses intentions. A quoi bon débattre ? Opinion qui ne changerait pas. Pas ce soir. Sûrement jamais. Pourtant son enfant intérieur criait, dans l'espoir que peut-être un jour la lumière les inonderait de nouveau. Se battre, par contre ça, ça lui parlait... Parfait.

Intervention d'Himari laissant un goût amer dans les tréfonds de sa gorge. Elle était en train... de le défendre ? De le rassurer ? Son mépris, glacial, n'était né au départ que pour rabaisser son ennemi juré. Mais là... C'était trop. Le commentaire de trop. Gaucherie de sa part, sûrement. Mais Ujinori se montrait intransigeant, devant celle qu'il aurait pu, voulu, défendre. Celle qui se jetait maintenant, bêtement, dans la gueule du loup. Alors ses prunelles, froides, méchantes, tombèrent ultimement sur les contours de son visage à elle. Pas le moindre mot prononcé. Juste un rictus illustrant parfaitement ce qu'il pensait ((pitoyable)). De la pitié oui. Car elle ne méritait pas, d'ainsi souffrir. Et elle ne méritait pas, surtout, d'espérer, en s'inféodant à ce monstre. Ce n'était pas son problème. Plus son problème. Si elle voulait être entraîné dans l'inévitable chute du démon, soit. Toute bêtise méritait une punition appropriée. Existait-il une peine suffisamment lourde, pour son affront ? Celui d'aimer, et mettre en danger tous les autres, d'un même mouvement ? La décision ne lui revenait pas. Le destin s'en chargerait, inévitablement. Dernier coup d’œil, avant de perdre tout intérêt pour elle. De se concentrer uniquement sur ce qui comptait, désormais : celui qui l'accablait. Celui qui représentait un véritable danger.

Le moment tant attendu était là, enfin. Le début de cette danse. Ode à la violence. Poings dansant, dans les airs. Martelant la chair, quand les corps se trouvaient. Inerte, face aux assauts du démon. Même quand le nez explosait, et que ses lèvres se teintaient de son carmin. Trop habitué, à être le réceptacle de ce besoin humain, dégoûtant, de faire mal. Son épiderme en était la preuve vivante. Cicatrices et hématomes épousant chaque recoin. Œuvre d'art. La douleur était bien présente, lorsqu'Akira s'appliquait à le violenter. Douleur sourde, sauvage, venant lui couper le souffle. Mais il était hors de question de lui offrir le moindre signe de faiblesse. Après l'enfer qu'il avait vécu, et continuait de vivre, tout cela était bien secondaire. Oui... Si secondaire. L'étreinte bientôt plus qu'un souvenir. Accalmie intimée, probablement, par la présence d'Himari à ses côtés. Ujinori n'en voulait pas, de son aide. Aurait préféré se faire battre, tout le reste de la nuit, plutôt que ça. Alors il était temps, enfin, de reprendre la parole. De signifier tout son dégoût. - Funny how you're so desperately trying to convince yourself you're not as bad as me. You are. Le sourire revenait, entaché par le rouge. Akira ne pouvait s'en prendre qu'à lui même. Car si le petit prince était ainsi, c'était de sa faute à lui. - Or maybe you are, worse ? Worse than me. I don't play people like you do. Who knows. Ultime crise de rire.

Passif, jusqu'à présent, dans cet guerre sans intérêt.  Aucune résistance offerte. Blessures infligées de par cette autorisation, implicite, de ravager son épiderme. Confiance absolue. Celle de pouvoir le défaire, un souffle glacé à la fois. Sans même savoir qu'il était sa moitié infernale. Le feu de son givre. Trop ignare, sur ce qui habitait réellement Akira. Une discussion, révélation, pour une autre fois. La fois de trop, fort probablement. Une seule envie, lui prouver que ses choix n'importaient pas. Qu'il était là, parce que le petit prince en avait décidé ainsi. Alors ses doigts dansaient. Danse de la pluie. Faire appel à l'eau, son élément. Constituer un torrent, pour emporter son ennemi jusque dans la fontaine, un peu plus loin. Trempé comme il l'était, le congeler jusqu'aux os aurait été d'une facilité déconcertante. Mais Ujinori devait-il vraiment s'abaisser à son niveau ? Question rhétorique. Bien vite emportée par le retour furieux, fumant, du damné. Ses menaces ne lui faisaient ni chaud ni froid. Mais surtout pas chaud. - Care to explain, what you think you could actually pull, against me ? You have no idea what I'm capable of. And you know what ? I know everything about you. Guess you should learn how to save your punches. You're the most predictable asshole of the entire island. Persuadé de connaître l'entière vérité. Il se fourvoyait, si cruellement... La faute à eux. Et à lui, pour l'avoir si lâchement abandonné.

Les digues se brisaient. Faute à l'alcool. A la douleur. Et à la proximité de cet homme. Les appétits de celle aux contours gelés s'éveillaient. Elle s'éveillait, tout court. Réclamait, déjà, de sa voix captivante, glacée... malveillante. Elle l'intimait, lui son enfant, son protégé, à glisser son visage contre le cou de l'ennemi juré. Chercher un peu de chaleur. Sa chaleur. - Brûler de colère sera ta perte... Candeur étrange, déplacée. Qui ne collait aucunement avec ce qu'Ujinori inspirait, habituellement. - Ta perte entre mes bras, Akira... Et les lèvres s'approchaient de là où tout son prenait vie, chez l'oni. Et plutôt que de répondre à l'appel de la chair, insoupçonné, au milieu de cette guerre, il ((elle?)) se décida à rire. Voix métamorphosée. Pas la sienne. Mais celle de la dame qui siégeait en son cœur. Ricanement glaçant. Féminin, dans ses intonations. Plus rien ne faisait sens. La folie les gagnait. Le petit prince savait, que s'il ne se révoltait pas en cet instant, il consumerait entièrement cet abruti. Et il ne voulait, en aucun cas, goûter sa chaleur à lui. Y arriverait-il ? Faible, face à son pouvoir. Faible, dans sa puissance. Le regard restait vide. Possédé. Mais dans son for intérieur, les hostilités commençaient. Nul doute que ses spectateurs étaient en mesure de l'aider. S'ils le voulaient bien, évidemment. Et ils ne voulaient pas, non ?

Il n’y a jamais rien eu de plus puissant que la colère. Peu importe les mots, peu importe les blessures, peu importe la violence. C’est pour toujours la colère qui gagne sa raison et l’emporte dans ses passions. Sang dans le torse qui pulse plus que ses pensées dans son crâne, conflits dans ses gestes. Et plus rien n’a d’importance que ce feu qui le brûle de l’intérieur.

it’s not true, don’t listen to him Non, plus rien n’a d’importance. L’urgence, c’est de se laisser aller au carnage, l’évacuer assez pour respirer à nouveau.

Les coups mis à exécution, parce que c’est trop bon. Ujinori se fait réceptacle de ses vices, les attise et c’est presque comme s’il les réclamait, sans aucune riposte. Le laisse frapper jusqu’à ce que Akira tempère son incendie, muscles tendus prêts à repartir en rafale. Ce sont pourtant les mots qui partent les premiers – et ils sont glaçants autant que glacés. funny how you're so desperately trying to convince yourself you're not as bad as me. you are. Le crâne qui ricoche sous les balles. Chaque syllabe lui écorche l’âme, vient s’immiscer sous ses cicatrices, grignote ses limites, fait trembler les remparts. Étincelles pernicieuses qui enflamment une haine à ne plus savoir où la braquer. Contre Ujinori, ou contre lui-même. or maybe you are, worse ? stop talking worse than me. Son esprit retourné par ses propres démons. Maux à double tranchants – une vérité qu’ils ignorent tous. Cette culpabilité qui le ronge, de n’avoir sauvé que lui-même, au prix de tout ceux restés crevés là-bas. Et peut-être est-il pire, alors. Lâche égoïste, crevard, clébard qui ne pense qu’à sa survie. who knows. i know. i know. she doesn’t instinctivement le regard se détourne pour trouver celle qui le voit à travers l’ombre. Raison anéantie par ces milliers de voix qui donnent écho à Ujinori. i might be worse.

Le poing ne desserre pas de rage, mais un seul regard a suffi à ce que tout vacille – attention branlante, parce qu’elle le rend fragile, et il déteste ça. S’en veut immédiatement d’avoir faillit à lui-même, juste pour un regard d’elle, quand il finit plongé dans l’humiliation. Fontaine qui noie ses pensées parasites, eau trop froide pour sa peau toujours brûlée – aussitôt, il retrouve ses esprits, chasse les doutes et fond droit sur le maudit glaçon qui joue un peu trop avec ses nerfs et le danger. Les menaces en effusion, promesses de vengeance – pour lui, pour elle et surtout pour eux. Il est trempé, mais donne l’impression de fumer encore, emporté par une fièvre qui ne fait que gagner sur sa conscience, sur ses limites. Déjà trop loin dans ses délires enragés pour entendre la supplique. just stop it, quand seul compte le chaos, qui le galvanise.

Mâchoire serrée à s’en faire péter les dents, il pourrait presque lui arracher la jugulaire pour combler ses désirs de l’éclater. care to explain, what you think you could actually pull, against me ? La poigne s’enfonce contre son torse pour toute réponse, suffisamment en lutte avec son démon pour ne pas céder trop vite aux regrets de le laisser l’emporter. you have no idea what I'm capable of. – i don’t care. Mais il ne cesse de l’ouvrir. stfu stfu stfu stFU and you know what ? I know everything about you. Court instant de terreur qui se consume aussitôt sous l’éveil de l’oni. Malgré l’alcool, malgré le lieu, malgré les risques. Ujinori appuie sur tous ses boutons en même temps, menace d’un gouvernement malade qui l’épie et le surveille sans cesse (ce ne sont pourtant pas nécessairement ses mots, mais bien ce que comprend Akira, ses vieux instincts en alerte, les traumas en éveil et l’oni sur le qui-vive comme un mécanisme de défense prêt à prendre le relais). Sensation crasse d’être à découvert, d’être su, d’être nu devant la menace qui ne faisait que planer. you're the most predictable asshole of the entire island. eh c’est trop il la ferme jamais sa grande gueule ce fdp. le coup de tête dans la mâchoire de Ujinori part tout seul, sans crier gare. Akira relâche d’une main son col, pour s’essuyer le front après le choc. y’saw that one coming, i’m sure. Mais pour toute réponse, le connard dont il ignore tout, en réalité, se fend d’un sourire insolent, du genre de celui qui fait bouillir son sang. Si seulement il savait, Akira, tout ce qu’il a déployé dans le passé pour le protéger. Pour aujourd’hui finir par être celui qui désire le briser.

Un étrange souffle s’empare de celui que rien ne semble atteindre – Ujinori au-dessus de lui, au-dessus de tout, trop loin dans ses délires et ses sourires morts. Ce visage figé d’arrogance, ce corps aussi froid que son cœur. Quelque chose change dans ces airs, une nouvelle lumière froide passe à travers ses paupières – et dans ses tripes, Akira sent qu’il perd la main. Que si l’alcool a fait s’endormir la bête, il le prive aussi de tout son contrôle dessus, lorsque l’oni semble gronder en-lui. what now quelque chose, une étincelle, un appel qu’il ne perçoit pas le premier, mais que ses instincts ont bien capté. Brûlant de tout son être, le souffle gelé d’Ujinori est presque une douleur, lorsqu’il à l’audace de s’approcher de trop près. the fuck – – brûler de colère sera ta perte... un ton qui n’a rien à voir avec celui qu’ils échangeait un peu plus tôt. Akira se fige à son tour, sans comprendre. Même si au fond de lui, il sait. ta perte entre mes bras, Akira... Cette fois, les poings se relâchent doucement, déconcerté par cette voix qui hante Ujinori. Il plante ses yeux chargés d’orage dans ceux du taré qui lui fait face, reculant imperceptiblement son visage quand il le sent s’approcher davantage. C’est alors qu’un rire s’échappe des lèvres pâles, un rire qui lui glace son sang d’ordinaire bouillant.

Ce rire d’ailleurs, ce rire maudit, ce rire froid – appelle l’oni. here it is. Comme un chien de chasse ayant perçu l’odeur de sa proie, prêt à se ruer pour l’attraper. Des instincts sauvages qui lui échappent, alors que ses muscles voudraient agir seuls, venir soulager leur rage sur la peau froide, sortir ce funeste présage du corps hanté de Ujinori. Des pulsions qui manquent de le gagner, jusqu’à – please just let him go

Au-devant un monstre de givre qui se tapit dans le corps d’un sorcier – lorsque derrière deux mains s’apposent sur sa taille pour le retenir de s’y perdre, deux mains de celle qui ne sait rien, mais déjà trop, et que tout expose à des dangers qu’elle ne devrait pas connaître. Et lui se tient là, entre les deux. Figé par cette réalisation, retenu par une prise minuscule qu’il pourrait balayer d’un revers du bras. Tandis qu’en face de lui s’anime une entité qui menace de déborder, de lui exploser au visage et de tout emporter dans son passage. Elle aussi. just like me

Courte réalisation, quand il sent les mains de Himari se serrer sur lui, tenter vainement de le faire reculer, de le détourner d’un conflit qui ne fait pourtant que le nourrir et qu’il crève de dévorer toujours plus. Mais sa présence lui rappelle où ils sont – davantage ce qu’ils sont. Un type du gouvernement, avec des propos glaçants – un mec recherché, qui devrait moins la ramener – deux hensokus en proie à leur magie qui les dépassent. Et tout un gala pour observer le moindre écart. Mais surtout Himari, qui ne devrait pas se retrouver entre eux deux feux.

C’est beaucoup trop long. i know y’a vraiment pas le temps de s’éterniser fuck i know ! surtout avec l’oni qui a bien sentit l’autre hensoku en face de lui. he’s one of them et qui n’en a rien à foutre des conséquences we’ll deal with him later Repousse ses pensées qu’il combat et s’insinuent sous sa peau, manquent d’ébranler ce qu’il est. not now et son souffle furieux est presque vaporeux lorsqu’il s’échoue entre Ujinori et lui. fuck off. grondement plus rauque qu’il ne l’aurait pensé prononcer, tandis qu’il ravale le démon au fond de sa trachée. ain't got time for this bullshit. liar Alors que la voix pourrait trembler tant il se contient de céder à ses instincts. Qu’il lutte pour défaire ses doigts de la veste dorée. Qu’il se fait violence pour l’ajuster et la défroisser d’un geste sec, dégoûté de lui-même, en conflit avec ses envies. wake up man – il fait en lui mettant deux petites (bonnes) tapes sur la joue, comme pour le ramener à lui-même – i’m not into dicks. drop it. Allusion à peine voilée à cet état second dans lequel Ujinori se trouve. Bien maigre effort pour retenir son yokai de le submerger, mais suffisamment pour rompre cette proximité qui risquait de l’exposer – de les mettre en danger.

D’une main dans son dos, il vient attraper Himari – enfin, ce qu’il peut et vite, un bras ou une épaule – et recule tranquillement pour laisser suffisamment d’air envahir l’espace, mettre de la distance entre eux et Ujinori. Un ou deux pas, l’entraînant dans son mouvement, sans accorder un regard à celle qui l’a maintenu ancré, préférant rester aux aguets si jamais l’autre décide de s’emporter malgré tout. Le collier-muselière est à chier, il sent encore la rage grouiller sous sa peau – et peut-être serre-t-il trop fort le bras de Himari, et peut-être son regard n’est-il pas redevenu totalement le sien, et peut-être que tout son corps lui crie encore – reviens, d’une soif de poings.

Au venin, Akira répondait par la violence. Le petit prince essayait à tout prix de l'accabler... ou plutôt ne faisait que verbaliser des banalités. Ils étaient faits du même métal. Frères, de fer. Deux engeances essayant, tant bien que mal, de protéger leurs aimés. Ils ne méritaient rien. Pas l'amour. Surtout pas le sien, pauvre hère pendu à son dos. Trop solaire. Au dessus de la moyenne, loin parmi les astres, quand eux se trouvaient plus bas que terre. Dans les contreforts des enfers, au pied du trône de Lucifer. Ujinori n'était plus trop sûr, de ce qu'il voulait. Il était en colère. Voulait se nourrir. Il la sentait, au plus profond de son cœur, se débattre pour revenir à la vie. Car si l'humain savait se maîtriser, et redoutait les conséquences de ses actes, le monstre ne réclamait que vengeance. Se fichait bien de tout le reste. Juste un baiser, un simple baiser, pour que la glace se répande entre ses entrailles. Puis le briser, d'un claquement de doigt. Mille et une manières d'instiller l'effroi par le froid. Inconscient, face à cette potentialité qu'elle puisse prendre le dessus. Son quotidien n'était qu'une lutte intérieure, constante. Mais sans jamais avoir perdu, à ce point là, comment aurait-il pu deviner l'horreur qu'il pouvait, allait, semer.

La vue embrumée, soudainement, par un voile gelé. Son esprit sommait à son corps de bouger, fuir. Rien ne se passait. Plus aucun contrôle sur son existence. Ne restait plus que ses pensées. Et son rire, au loin. Quelque chose grondait, en son démon. Deux faims. Affamée de vie, de deux façons tout à la fois. Ces sources abondantes, fertiles. Ujinori cherchait à comprendre, ce qui suscitait un tel intérêt chez sa dame, la reine cruelle de son blizzard intérieur.. Pourquoi Akira ? Sale rat, indigne. Pourquoi ? Pourquoi l'attrapait-elle comme ça, lui susurrait avec toute l'indécence du monde ces quelques mots au creux de l'oreille ? Pas même la mine déconfite de son ennemi ne lui faisait plaisir. Le petit prince ne demandait qu'à mourir sous ses coups. Sous l'opprobre. Mais voir ce soupçon d'inquiétude, cette terreur, dans ces prunelles si délicieusement sombres, le mettait mal à l'aise. Akira n'était pas, n'avait jamais été, comme ça. Même lui, ne méritait pas ça. S'il méritait de mourir, ce n'était pas comme ça. Instant oisif, au goût d'éternité. La panique le gagnait, doucement. Hors de question qu'elle en ressorte victorieuse. Dernière inspiration, silencieuse, dans son for intérieur. L’énième, et peut-être dernière, lutte de la soirée était sur le point de commencer.

Tout se jouait sur ses intuitions. Perdu au milieu d'un océan froid et dangereux. Chaque bataille était livrée à tâtons, sans jamais être sûr de l'issue. Ujinori était prêt à tout, tout, pour la chasser. Sa vie était déjà bien assez pitoyable. S'il grillait sa couverture, et tuait quelqu'un en prime, ce serait la fin, pour lui. Après avoir espéré, toute sa vie, trépasser, le jeune homme se sentait bien bête, face à une telle éventualité. L'annihilation au bout des doigts. Ces phalanges qu'il ne reconnaissait plus, quand pourtant elles étaient siennes. Glace contre glace. Tout se jouait à laquelle des deux était la plus froide, la plus tranchante. Son pouvoir ne lui était pas inféodé, pas entièrement. Le petit prince s'était échiné, depuis toujours, à dépendre de ses propres talents. Alors il faisait appel à l'esprit de sa maison, hurlait, repoussait le givre vicié. Quelque part, il essayait aussi de lui prouver l'inutilité des maigres bienfaits qu'elle lui prodiguait. Guerre sur tous les fronts, jusqu'aux tréfonds de leurs âmes. Elle ne se laissait pas faire, certes. Mais par sa faute, sa victime s'était préparée, inconsciemment, depuis ses premiers cris à ce moment. En le détruisant, elle l'avait rendu capable de lui résister. Et le goût de la victoire, totale, ne fût bientôt plus loin. Mais se mélangea, aussitôt, avec l’âpreté de son propre carmin. On venait de le frapper. Encore.

Regard courroucé en direction du seul suffisamment bête pour le toucher, encore, malgré ce qu'il venait de subir. Akira. Là toujours pour le pire. Et ce, depuis le début. - Don't touch me you idiot. Ruade parfaitement maîtrisée, pour installer une distance respectable entre eux. Aucune envie de sombrer, à nouveau. Et le sanguin semblait être uniquement capable de le tirer vers le bas. - Your dick must be nasty af. I don't even think you bathe. You don't look like it. Fuck off. Unique manière de réagir, pour garder la face. Ujinori se sentait bête, faible. Ne voulait plus jamais le voir. L'entendre. Le sentir aussi proche de lui. Premier pas, dans l'espoir de détaler, enfin. Un dernier coup d'oeil lancé à ce couple qu'il méprisait, de tout son cœur. - Sorry about what ? Him ? What he did ? Or what you didn't do ? Either way, you are despicable. Both of you. Et sur cette ultime tirade, le petit prince fit enfin volte-face. Pas l'envie d'en entendre plus. Se justifier. Pleurnicher. Ujinori voulait tout casser. Se casser. De là. Son corps. Tout, oui. Vraiment tout. Et sa silhouette disparaissait, enfin, parmi la foule. Offrait une accalmie à ces deux abrutis, pas même capables de s'avouer la plus évidente des vérités : qu'ils s'aimaient. Un peu ? Beaucoup, sûrement.