HEAVY IN YOUR ARMS (charon/atlas)

30.08.1997 ; à l'aube à peine des vingt-quatre ans.Naissance & Âge :

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— 24.05.2021 —
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Il ne sut combien de temps il avait marché.
Longtemps.
Sans but. Les pas de celui qui portait sur des épaules trop frêles et pourtant si lourdes le poids du choc, et du deuil, et du coeur en plaie béante.
Vide.
Les larmes étaient fanées depuis des heures, cours d’eau tari sur les joues pâles. Rien que de la brume, autour d’un fantôme.
Est-ce c’est ce qu’il était, à présent ? Un fantôme ?
Est-ce que Hanini allait en être un ? Le voile noir dont il s’entourait déjà tous les jours, à chaque enjambée ?
(Et dans le soleil du début d’été, il retrouvait son rire. Dans le bruissement des voitures, il entendait sa voix.
Et dans le vide du silence, il comprenait la perte.)
La soudaine réalisation, brutale, de ce qui s’en était allé. Comme l’impact avant la chute, qui touche la poitrine en premier.
Atlas n’avait la tête qu’aux mauvaises idées. Puisqu’il n’avait plus rien, l’envie de fusionner avec le vide. Cerveau hurlant à la mort, animal blessé qui jamais, au grand jamais, ne tendait la main. Tout le monde devait être occupé ou épuisé de le ramasser à même le sol. Il leva la tête, pour retrouver l’arrêt de bus où Pandore était venue le chercher, il y a une éternité. Un rictus passa le temps d’une averse, sur ses lèvres. Il ne pouvait pas lui imposer ça. Pas encore. Les mondes dangereux causées par une empathie trop profonde, l’inquiétude, et l’impression de peser trop lourd sur ses épaules à elle. Il soupira, une main sur sa nuque, se rappelant de la dernière fois qu’il avait mis les pieds dans ce quartier. Désespoir et envie gravés sous la peau, la force d’être audacieux et les regrets, et le nom d’un autre.
Son fantôme à lui. Le cygne qu’il n’était pas.
Les mois avaient passé, les excuses répétées sur écran rétroéclairé. Il avait lu, sur le deuil, qu’il connaissait pourtant. Ce n’était pas pareil, avec Sloane. Il croyait avoir été amoureux, avoir été déchiré, d’un manque qui lacère le coeur et qui laisse la culpabilité au fer rouge sous la peau. Il avait laissé faire le temps, sans succès. La rancœur était toujours là. Elle était simplement remplacée temporairement par l’agonie et le manque.
Non, le besoin.
D’avoir quelqu’un qui pourrait peut être le comprendre.
Alors lorsque ses pas, en voyage imbécile de celui qui voulait tout gâcher, le menèrent jusqu’à chez Charon, il sut que la malédiction était ancrée, autant que la souffrance. Il s’en fichait. Pas aujourd’hui. La douleur était trop grande pour regretter. Et les secondes furent longues avant que la porte ne s’ouvre. Corps désiré, détesté, embrassé dans une étreinte presque urgente. Mais cette fois, pas de lèvres qui cherchent ou de tentatives désespérées de l’avoir pour lui. Il n’était pas à lui, et il ne se ferait pas cygne. Il avait juste besoin de bras.
« I won't kiss you this time, and I'm not ready to forgive. just... hold me tight. »

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(( 24 mai 2021 ))

Elle reste là, immobile. Enroulée en statue de marbre autour d’un pilier chair. La peau diaphane sous les anneaux. Mais elle reste là, sa tête délicatement posée sur les détails des muscles roulant sous la chair. Fourche de sa langue en caresse d’une seconde, un éclair tendre aussitôt disparu. Et lui résiste. S’inflige et s’impose ne pas la toucher. D’un simple contact, le particulier d’un index frôlant le museau d’une certaine manière pour qu’ils soient les seuls à comprendre. Le signal d’une agonie lente et douce, de délires incertains. D’une vie qui fout le camp mais d’un cœur qui se remplit de battre trop fort. Des mirages de ces lui enchaînés à son monde. De ces deux devenant parfois un seul dans les brumes de ses envies, les traits de l’un effaçant ceux de l’autre pour n’être qu’unique. Revêtir les noirceurs et les lumières d’un astre voué à tomber.
De ces erreurs que l’on commet et qui restent. Elles qui effacent alors les possibles pour en faire des impossibles. De jamais et des interdits.

Alors perdu dans ces douloureux délires, l’envie au fond de la poitrine, l’aguille transperce. Le rappelle au monde vivant, l’extirpe de ses chimères dans un souffle rage. Un claquement de langue de ceux qui se retiennent de jurer mais qui crèvent de le faire. Perle de sang, elle glisse du doigt sur le tissu. Trop pâle pour cacher la bévue, Charon lâche son ouvrage et porte le doigt traître à ses lèvres. Recule et s’abandonne dans les contemplations absurdes d’un chiffon seulement là pour l’occuper. Lui faire oublier qu’il ne parvient pas à garder ses pensées en laisse.
Le venin. Le manque. La violence.
La solitude.
Des pièces d’un puzzle amer, elles se soudent et se défont pour le contraindre à jouer à l’infini.
Aux amertumes d’un vide de plus en plus béant, celui du cœur aux pleurs mis sous silence pour ne pas sombrer et recommencer, à flirter avec le précipice au bord duquel il a failli chuter, des mois en arrière. Et disparaître. Le rejoindre. Puisque personne ne le regrettera ici.

Comme un tambour venu d’ailleurs, les coups sur la porte l’extirpent des pensées marées. N’attendre personne et se sentir menacé. Charon tend le bras au-dessus du lit défait, les doigts perdus dans les vagues de draps pour laisser la vipère s’y glisser. La baguette la remplace et le sanctuaire s’ouvre sur une bourrasque si soudaine qu’il n’en fait rien.
Reste immobile, en déjà-vu violent coupant le souffle. Le corps adoré échoué contre le sien. Si la scène a déjà été jouée, elle ne ressemble en rien à la version précédente.
Ca ne va pas.
A le ressentir malgré le silence, ça hurle si fort qu’elle le prend aux tripes. La détresse. Celle que l’on tait mais qui s’insinue dans la moindre faille.

« - I might just give you a spare key, so you won’t have to wait for me to open the door next time. » Brise d’un humour à peine soufflé, l’esquisse d’un sourire aussitôt perdu. Charon se décompose sans même savoir pourquoi. Il ne sait plus, comment on enlace quelqu’un. Comment des bras peuvent se muer en sanctuaire et protéger du monde.
Il ne sait plus mais ils agissent pourtant. S’enroulent en serpents d’acier autour de l’astre tombé. A le presser si fort, contre lui. Aspirer à l’y voir s’y confondre, transférer le mal pour qu’il en devienne l’unique réceptacle.
« - I am truly sorry Atlas… » Sans même le savoir. Charon comprend, qu’un drame vient de se jouer. Et le cœur lui sait, que leurs peines vont se confondre et se faire communes. Alors il serre plus fort, des doigts contre la nuque, d’un menton déposé sur le crâne baissé. D’une tendresse à en éventrer les folies du monde si elle peut seulement le sauver un instant.
L’épargner.

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— 24.05.2021 —

Étreinte salvatrice-destructrice qui fait remonter contre la gorge les torrents qui semblaient s’être taris. Mais rien ne sort, le dernier voile de fierté pèse sur les épaules comme un fardeau, barrières trop hautes pour être franchies -il les a détruites d’un coup, la dernière fois, allure suppliante des baisers fiévreux, brisé ses murs par envie de lui. Plus jamais. Promesse tacite faite à lui-même, et pourtant, Atlas foulant le sol de cet appartement de nouveau, c’est déjà un signe de faiblesse. Se montrer en lambeaux et quémander l’étreinte est peut être même plus significatif qu’un corps à corps. Deviner le coeur arraché entre les bras. Mais lorsque Charon resserre les siens autour de lui, il expie un souffle qu’il ne pensait pas avoir retenu. Peut être en apnée depuis des mois, déjà. Couperet en pleine gorge depuis qu’il avait entendu un nom qui n’était pas le sien. La cicatrice brûle encore, sous la peau, mais la douleur est diffuse. Fait moins mal que le coup de poing dans le ventre qu’il a reçu, il y a quelques heures de ça. Endeuillé, plus assez de force pour jouer à l’égoïste. Peu importe les fantômes. Le coeur de Charon bat contre sa joue, le raccroche au monde des vivants. Celui qui brûle à feux et à sangs, mais qui sait connaître les trêves.
C’est ce qu’il demande.
Une trêve.
Prison dorée quand il l’enlace, il reste en silence. De longues secondes, des minutes, peut être. Tournis de désespoir et de manque, les émotions se bousculent sans laisser place aux regrets. Il n’a pas le courage de regretter, pas la lâcheté de fuir à nouveau. Alors, il reste.
Relève un peu la tête, sans affronter ses yeux, geste tendre de la paume encore gantée de plastique chirurgical qui se pose sur sa joue. « You already said that. » Dans d’autres circonstances, et pour d’autres raisons. Mots-poussières sur l’écran rétroéclairé, alors qu’il lui jurait qu’il ne le prenait pas pour un autre. Il ne le croit toujours pas, mais il est revenu. Dans les embruns d’un deuil qu’il n’est pas prêt à faire. « I could accept some tea, this time. »

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(( 24 mai 2021 ))

L’étreinte semble irréelle. Prise dans un entre-deux où rien ne compte, ne semble exister. Seulement eux. L’illusion d’un instant perdu mais pourtant retrouvé. A vouloir donner, tout ce qu’il a, pourrait avoir et ce qu’il ne possède plus, simplement pour rester là, encore. Plus longtemps.
Avant que ne se rompe le charme, la pause dans les chaos de leurs vies vouées à se percuter sans jamais vraiment se lier. Il ne lui appartient pas, Atlas. Lui échappe en courant d’air depuis que la faute a été commise. L’erreur, la sienne. Celle qui reste, là sous la peau et près du cœur battant plus fort. Silence d’or sur un pas de porte, dans un couloir vide où rien ne bouge. Eux figés, aux seuls doigts qui épousent la nuque, caressent doucement. Soufflent dans leur mouvement des murmures de tendresse, d’une communion un peu étrange mais qui s’invite entre les corps. Sans mauvaise pensée, seulement là pour le soutenir. Le garder.

D’une paume contre sa joue, gantée toujours en une sensation gênante et pourtant Charon se laisse aller. Repose sa tête contre cette main posée là, dans un geste qu’il s’imagine tendre et qui lui manquait tant. De ces simples marques d’affection ou de compassion que l’on offre, sans rien attendre en retour. Il en soupire, lentement, faussement apaisé. Sourire éclipse, si triste sur les lèvres. Il le sait. Le dira encore, jusqu’à l’infini puisque c’est sûrement la meilleure chose qu’il pourra faire.
Ce n’est pourtant pas ce qui est dit dans les moments de malheur ? Etre désolé même sans savoir pourquoi, ni comment. Simplement prétendre partager une peine ou un mal étranger. Le thé posé entre eux comme un signal de fin. Une ironie cruelle en rappel de cette dernière fois, où ils se sont retrouvés là, dans ce studio. Se seront aimé pour mieux pour se déchirer.

« - Then, I’ll make some. » Douceur dans le timbre, l’étreinte se défait doucement, comme à contrecœur. De sa main cherchant celle d’Atlas, s’arrête au poignet pour l’entraîner à l’intérieur. Fermer la porte, le tombeau. Le sanctuaire.
« - Make yourself at home… » Elle semble si étrange cette phrase venant de lui. Charon qui n’a jamais vraiment ouvert sa porte à quiconque. Pudique. Au fond, ils ne sont que deux à être venus en invités désirés. Le cygne et l’astre. Deux pôles d’une vie.
Il ne lui appartient pas, Atlas.
D’un attrait charnel en obsession malsaine, rien de plus. Si seulement.

« - Do you want to talk about it ? » Pose la question tout en sachant que la réponse sera négative. Personne ne veut parler des choses qui blessent. Il lui tourne le dos alors qu’il s’affaire à préparer le thé. Bouilloire sur le feu et tasses s’entrechoquent. Les feuilles de thé dans la théière.
Et le moment hors du temps sur le pas de la porte semble envolé. Brise de malaise souffle entre eux et d’étranges frissons viennent glisser le long de son échine.

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— 24.05.2021 —

L’étreinte se desserre -trop tôt, trop tard. Trou noir dans la poitrine alors que la porte se referme, il a plus que jamais l’air d’une poupée de chiffon. Sans envie, ni pensée propre, l’instant d’une tendresse lorsqu’il pose sa main et qu’il regarde, une seconde à peine, ses lèvres. Il n’a pas envie de l’embrasser -il avait tout le temps envie de l’embrasser -il ne savait plus pourquoi il était venu -il ferme les yeux. Inspire. Charon et le goût de l’interdit étaient toujours alliés -mais il n’était plus amant. Il se l’était juré. Alors qu’est-il venu chercher ? Un ami ? Un mentor ? Un soutien, sans doute. Une épaule. Quelqu’un, mais pas n’importe qui. C’était lui dont il avait besoin -malgré la mauvaise idée. Charon et ses bras. Charon et ses mots. Charon et ses fantômes qu’il maudissait pourtant toujours autant.
Il se laissa entraîner à sa suite, la gueule du loup qui se referme a des allures de cocon. Il ne se sent pas vraiment mieux. Mais il se sent moins vide. Ca suffit, pour l’instant.
« Maybe later. » Il se surprend à ne pas énoncer un non ferme et catégorique, remparts d’acier pourtant d’ordinaire si haut qu’on en voit jamais la cime -la réponse est hésitante, sans doute pour palier au malaise qui s’installe, pour promettre un semblant de conversation, pour lui-même aussi. Déni qui transpire et choc encore auréolé de non-dits, il ne réalise pas, et dans sa tête ornée de trous béants, rien n’est grave -la douleur est là, mais Atlas souffre bien trop souvent pour y prêter attention, maintenant. Il pourrait, s’il le voulait, effacer les pensées. Anesthésier les questions. Mais le visage d’Hanini revient sous les mémoires floues, en vie d’abord, le sourire contagieux rempli de malice, décédé ensuite, pâle et vide. Tout est vide. Atlas secoue la tête, comme pour s’extirper d’un cauchemar. Quand il s’assoit sur le rebord du lit, c’est le poids du monde qui ploie avec lui- il a certainement l’air ailleurs. D’un geste presque machinal, sans expression, retire les gants. Tend la main vers la vipère curieuse qui s’approche vers lui sans siffler. Créature pour créature. Il n’a pas peur.
Le serpent s’enroule autour de son bras. Ne lui fait rien. Immobile. Et les yeux d’Atlas ne cherchent pas -il a déjà détaillé l’appartement. Avant. Dans un flashback qui semble d’un autre temps et qui pourtant brûle encore comme un coup de poignard. Rien n’a vraiment changé, sinon le mannequin de bois trônant près du lit. L’étoffe en moins, celle qui avait accueilli leurs amours. La ceinture en plus. La sienne.
« You didn’t sell it, after all. »
Il voudrait sourire et adopter un ton léger -essaye, sans y arriver certainement. Conversation qui semble banale, pourtant remplie de sens qu’il n’essaye même pas de feindre. Évoquer ce qu’il s’est passé. Il a d’autres choses à éluder ce soir, et n’a pas la force de porter le masque en entier, celui qui retient les larmes et les rictus mauvais qui pointent le bout de leur nez.

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(( 24 mai 2021 ))

Poupée chiffon debout au milieu d’une tempête rage. Même le timbre semble éteint, ailleurs, malgré la promesse d’un peut-être qu’il offre sans réellement y croire. Mieux qu’un refus cage emprisonnant le cœur et ses malheurs, le maudit n’en dit rien. Respecte le silence, la pudeur. Soumis à la sensation de ne pas être à sa place, un refuge éphémère que sa présence offre au porteur du monde écroulé quand pourtant il est l’un des éléments ayant participé à sa chute.
Le silence n’est pas d’or mais bien lourd, un cadavre entre les vivants qui se fracasse sous le chant de la bouilloire. La théière se remplie en un ultime répit avant de faire face, tasses entre les doigts que le maître des lieux vient poser sur la table basse encombrée. En rempart entre lui et le petit astre effondré. Il s’assoit, dans le siège face au lit, laisse une distance malgré l’envie brûlante de le rejoindre. Non. Droit perdu, envie déchue. Amant parjure, indigne. Ami foutu sûrement. Le cœur s’abime mais il fera avec, c’est mieux que rien. A l’instar du sourire tendresse sur les lèvres, éclipse d’un rien devant le serpent enroulé autour du bras.

« - She likes you. » Fait rare pour le remarquer, la vipère d’ordinaire si peu encline à se laisser approcher, toucher. A le protéger lui, son sorcier. Comme si elle avait compris, que l’intrus n’en était pas un pour lui. Plus maintenant. Il est tellement de choses Atlas. Un besoin violent, une évidence assassine. Un malheur arrachant le cœur lambeaux, il n’est pas fait pour ça Charon. Pour subir. Lui, il provoque les déceptions, les chutes. Pas l’inverse.
Il se penche pour servir le thé, geste figé au-dessus du vide et le regard vient se poser sur le mannequin fatigué. La relique de leur folie commune, amour étincelle, elle reste. Et s’il a pensé à la vendre, le couturier n’a pas pu s’y résoudre.

« - I couldn't. It's a nice piece of work and, maybe, I was hoping you'd come to take it back someday… » Triste excuse pour le revoir le temps d’un mirage. Et si l’esprit parfois s’est laissé surprendre à dériver, imaginer des possibles retrouvailles au détour de moments hasardeux, il n’avait jamais prévu que les routes se recroiseraient sous des auspices certainement plus malheureuses que celles qui les ont séparées.
La tasse se pousse doucement sur le bois fatigué vers Atlas. L’autre est ignorée et Charon se repousse dans le fond de son siège. Se retient de faire peser le poids de son regard sur des épaules qui semblent encore plus affaissées que d’ordinaire. Stand tall Atlas. Don't bow down. Il hésite, cherche ses mots mais tous semblent faux. Gueulent trop fort ou murmurent trop doucement. Les doigts se glissent sur la nuque, chassent le malaise. Se perdent au détour d’une oreille, l’habitude, mais la croix n’y est plus. Rangée, avec la bague et les autres morceaux du cygne qu’il ne peut pas se résoudre à abandonner. Les conserver mais ne plus les chérir, les sanctifier.

« - If you need a place to hide from the world for some time, my flat is yours, I’ll manage to leave you all the space you need, you won’t see me I promise. It’s not the five-star type but in crisis time, it can be a safe haven. » Il se dégage un inédit dans le timbre. Des douceurs tendresses. Un soutien fort. Une distance souffrance. Une dévotion hurlante.
« - Even for tonight, if you want to sleep here, please do. » Et le regard se pose, enfin, sur l’Atlas perdu. Il ne sera pas amant mais il se veut aimant.
Il ne veut pas le voir sourire mais crève de faire exploser sa peine. Qu’elle disparaisse, au moins le temps d’un souffle. D’une nuit. D’un jour. Porter le monde est déjà trop dur, une vie de tristesse, c’est bien trop long.
Il le sait.

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— 24.05.2021 —

Il voudrait être capable de savoir tendre la main. D’accepter le vide avant la chute, le dernier rempart du précipice. Lui.
Ce n’est pas le cas.
Et Atlas ne dit rien, lorsque la distance s’installe, physique, mais pas que, dans les silences, et dans les mots, dans les regards voilés de tristesse. Il ne dit rien, lorsque les mètres les séparent, alors qu’il se sent déjà vide de leurs étreintes. Sentiment étrange d’abandon chronique, jamais ressenti. Lui qui avait toujours fui, abhorré le moindre contact, la caresse d’une plume en sursaut de panique, le voilà à soupirer à l’ombre de bras qui l’avaient pourtant maudit. Hasard funèbre. La vipère continue sur son bras le semblant d’une danse langoureuse, et s’approche, lentement, de son cou. Il ne sait si elle l’étranglerait, mais il s’apaise. Rien ne pourrait arriver de pire. « She won't bite me, won't she ? It could hurt her. » Son sang maudit d'un poison qu'il sait danger. Plus enclin à protéger l'animal que lui-même -comme d'habitude. Atlas en altruiste invétéré qui ne pense pas à sa propre sécurité. Mourir sous les crocs d'une vipère semble dérisoire -il avait toujours été une proie. C’était peut être la moins pire des fins, au milieu de tous ses scénarios catastrophe. Le visage sans vie lui revient, en un clignement d’yeux. Il inspire. Expire. Souffle sur la tasse de thé que Charon pousse dans sa direction. Son regard regagne la rive -pièce de tissu pourtant symbole de noyade. Les couches effeuillées sur le sol, et les soupirs perdus. Un nom autre que le sien. Il ne le regarde plus. « Were you going to sew me something ? » Question aux airs d’innocence, mais teintée d’un espoir de celui qui a tout. L’habitude des habits cousus sur mesure et des liserés dorés -opulence qui lui avait toujours fait défaut en cuillère aurifère sous la langue. La phrase sonne légère, presque moquerie, mais le plomb retombe et ricoche dans la poitrine, lorsque Charon se fait havre. La proposition altruiste, dénuée d’un sens charnel. La nausée monte presque.
« I- I wasn’t expecting that. » Les yeux scrutent et même le serpent enchaîné à son épaule semble déceler la tension soudaine. Ce n’est pas que la proposition ne le touche pas. C’est qu’il ne comprend pas. « Why… Why would you offer me that, after everything that happened ? » L’épilogue inutile. Ils savaient tous les deux que les souvenirs étaient gravés sous la peau -et tous deux avaient sûrement essayé d’oublier. Atlas ne chérissait qu’une partie, infime, de cette nuit là. Le reste était calvaire. Les yeux baissés vers le breuvage sombre, il murmure. « You should kick me out, instead of letting me stay. » Une vie plus paisible, sans le plus maudit des deux.

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(( 24 mai 2021 ))

It could hurt her.
And you ? What could happened to you ? L’altruisme touche et blesse. D’une caresse tendresse sur les lèvres, l’esquisse de sourire se fait mélancolie. Elle ne mord pas Sthéno, elle embrasse. Les douleurs et les peines, elle les fait disparaître dans ses étreintes. Celles qu’il quémande à s’y perdre, la plus belle des délivrances. La plus abrupte aussi.
« - Only if you’re becoming a threat to me, otherwise she knows she’s not allowed to. » Et il ne voudrait pas Charon, que le venin détruise et abime. Elle comme lui. Possède le remède pour l’un mais n’a pas encore trouvé la clé pour l’autre, quand bien même l’arôme du sang ténèbres reste ancré à ses papilles. Des nuances de mort et de vie, l’âpre d’une beauté outrage que l’on s’échine à cacher.

« - I was actually, I have ideas for things that would suit you… » Des délires de couturier, des rêves d’amant foutu, à le vouloir roi d’un univers fracassé. Le sublimé au-delà de tout ce qui pourrait l’abîmer, le voir sortir de ces ombres qu’ils chérissent tant tous les deux. Atlas étincelant au milieu du vague morne d’une populace aveugle à tout. Seulement entichée du rien. Et sous ses doigts, il serait si beau, le porteur du monde, Charon en a cette certitude des égoïstes caprices.
Le regard scrute enfin, s’abime dans les contemplations d’une statue qui s’étiole. Le marbre se fissure, malgré les efforts pour colmater. Retenir. De ces instants perdus qu’il connait si bien. De ce ver dans le fond du cœur qui se tortille méchamment, soumis à des pulsions de compassion hurlante. Il meurt Charon, pour ceux qu’il aime. Se tuerait volontiers pour seulement avoir l’assurance que mal et menaces disparaissent. De cette évidence lourde de sacrifice sans réflexion, ancrée en lui depuis l’origine de sa vie. Les autres bien avant lui-même, caché derrière ses remparts d’égocentrisme cynique.
Les mots blessent. Les regards ricochets tuent. Dans le fond de l’âme abimée, l’incompréhension se devine. C’est inédit, même pour l’écossais, de s’offrir jusque dans les secrets de son logement. D’autoriser une âme autre que la sienne à s’y échouer. Le cygne avait gagné ce droit. Le petit astre l’a mérité dès l’instant où la brume les a enveloppés de ses menaces.

Alors peut-être devraient-ils n’être que des étrangers l’un pour l’autre. Un gouffre entre eux comme cette distance imposée, presque réflexe mais qui blesse et ravive le besoin. Le manque.
L’évidence. Se renier et s’oublier comme il faudrait oublier les ravages de cette nuit passée, les amours fracassés voués à ne jamais exister à nouveau. Ils devraient mais le faire semble bien pire que d’affronter les erreurs et le souvenir brut d’une bêtise ancrée à même la chair. « - Friends help each other don’t they ? » Une épaule se hausse doucement, désinvolture façade d’une amitié elle aussi bafouée. Existe-t-elle seulement ?
« - I mean… My words will probably kick you out but well, forgive me. » Le corps serpent se déplie dans le siège, il aimerait se lever et approcher mais s’oblige à rester là. Entrelace ses doigts alors, inspire et expire, il regarde ailleurs pour se protéger de cette tempête qu’il s’apprête sûrement à invoquer. La couverture et l’armure qu’il va arracher, sans anesthésie ni douceur.

« - I can not tame what my heart feels, just mute it as much as I can. I know I fucked things up with you and I’ll live with it, that’s ok, it’s already been broken so many times, one more is almost nothing to endure. I can do with the one way feeling thing but I don’t want you out of my life, not anymore. And if your friendship is all I can get from you, I’ll take it gracefully. » Le souffle se reprend dans une brève pause et il ose, Charon, revenir heurter son regard à celui d’Atlas. « - I let you stay because I want to protect you and help you as much as I can. My loneliness and my pain are a choice, I don’t want it for the ones I care about. And now more than ever, you seem at the edge of breaking, I won’t let you. » L’aplomb du timbre vacille sur les dernières notes, une seconde battement de cœur. Charon immobile pourtant suspendu au-dessus de la table rempart, peu importe, sa main est venue se poser sur le genou du porteur du monde.

« - I can’t. » Let it happen again. Perdre quand il aurait pu agir.
Empêcher le drame.

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— 24.05.2021 —

La menace ne plane pas, elle se diffuse. Serpent sirène sur les veines sombres, zigzague. Il devrait avoir peur, après tout la menace, c’est lui. Il se rappelle des mots écrits dans la honte. De l’aveu en demi-teinte de quelque chose de brisé. Confiance. Tendresse. Et pourtant, tous deux semblent intactes. Les silences ont bon dos.
La vipère semble se désintéresser et glisse, sans bruit, sur les draps trop blancs. Le souvenir d’une nuit tout aussi blanche sous les paupières closes. Celui, plus récent, d’un visage également pâle. Et tout se mélange, fantôme et confidences. Charon a le sien. Lui aussi. Pourtant, l’amertume ne passe pas. L’incompréhension. L’impression d’avoir été pris pour un autre, et que personne ne l’aimera comme Charon a aimé son cygne -qu’il n’est bon qu’à être la copie d’un être qu’il n’a jamais connu, se changer en ombre. La plaie est béante, dans la poitrine, sertie de sel et de diamants, rien ne passe, rien ne passe, et Atlas se rend compte trop tard qu’il serre les dents. A la mention d’une amitié qu’il ne leur connaissait pas. Il savait la distance, la traque, l’envie, la défiance, le désir, le gâchis. La tendresse. Les mains liées. Les barrières fissurées. Les regrets. Jamais l’amitié. Alors, il ne répond pas, ne répond rien, les yeux en lueurs effrontées qui scrutent, retient son souffle, une mise en garde avant les mots. Charon ne parle pas beaucoup, encore moins que lui. Et lorsqu’il se redresse, délie les secrets, en provoque d’autres dans les sous-entendus, c’est le coeur entier qui se serre, pas uniquement la douleur, pas uniquement la peine. Quelque chose qui ploie sous le poids d’un interdit qui lui semblait facile à accepter. C’est la lutte pour ne pas sombrer, et sentir tout de même la chute. L’impression de lames acérées au creux du ventre. Atlas garde le silence, d’interminables secondes, la bouche entrouverte puis fermée. Les phrases se bousculent avec les questions et les reproches. Les pièces sont déjà brisées et tombées au sol, là où Charon ne voit que des fissures et des éclats -il ne lui dira pas, pas tout de suite. Et tout semble injuste, sourd et violent, lorsqu’il sent monter près des paupières l’effroyable torrent.
Lorsqu’il parle, les mots sont bas, mais ont l’air d’une mer agitée. « Did I ? Broke your heart ? »

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(( 24 mai 2021 ))

Did I ? Broke you heart ?
La main se retire et le corps se replie. Réintroduit la distance entre ces deux pôles sculptés pour ne pas se rencontrer. Ils l’ont fait pourtant, défiant les lois et les raisons. Ils l’ont fait pour se brûler sous les auspices d’un feu sacré et en ressortir meurtris. Conséquences d’une bravade folle que l’on crève de reproduire pour se sentir exister ne serait-ce qu’au détour d’une heure. D’une nuit. D’un instant gravé entre dans leur folie pour se dire que les routes ne se séparent pas sur du mauvais mais du beau et du cruel.
Charon s’enveloppe de silence, ne laisse que les battements de son cœur envahir le calme factice de sa poitrine. L’esprit en échafaud, troublé des mots qu’il a eu l’audace de lancer en tirades d’un personnage maîtrisé par un autre. Des écrits tracé sur du rien, sur un écran en message jamais envoyé, aussi effacés. Ses sentiments sont une tempête, une rage en fond de ventre. Des inconnues dans l’équation de sa vie pourtant maintenue en laisse. Il y a eu Billy, première désillusion. Il y a eu Swann, la collision brutale d’incendie fait pour se détruire.

Il y a Atlas. La majestueuse erreur que l’on s’était juré de refuser. Les abimes et les sublimes. La destruction et la renaissance. Il inspire et soupire, ferme les paupières au gré de l’air quittant ses poumons. Ne reconnait plus vraiment son propre chez lui, lourd de ces aveux ayant franchi le seuil de ses lèvres ingrates et d’ordinaires muettes.
« - Surprisingly, yes, you did. » Quand il pensait que rien ne pourrait plus ébranler la chose ridicule pendue dans sa poitrine. « - But not as much as I broke yours. Like you said, mine is already made of ashes scattered in the wind of my mistakes, there is not much left to break. » Mais ce n’est pas le cas. Parce que la douleur reste, forte, malgré les tentatives pour la faire taire. L’ignorer. Se persuader qu’il continuera d’exister, lui, Charon, dans l’ombre et le chaos.
Qu’il ne sera jamais fait pour se créer aux côtés d’une âme autre que la sienne.
Ils furent deux, les amours d’une vie perdue.

Ils sont honteusement devenus trois.
And you didn’t even saw it coming.

30.08.1997 ; à l'aube à peine des vingt-quatre ans.Naissance & Âge :

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☽. this is not delivrance
this is not a love story
this is heavy and rough
and sad
and true

— 24.05.2021 —

Les mots gravés au fer rouge, dans l’attente après une question qui saigne. Le oui est fatal, au creux de la poitrine déjà partie en lambeaux. Charon a le coeur brisé, mais Charon est injuste, coupable de la faute impardonnable de l’avoir pris pour un autre. Il semble le reconnaître, mais Atlas n’en tire ni réconfort, ni soulagement. What now ? Il ne peut pas réparer ce qui a été rompu brutalement, et qui ne tenait déjà qu’à un fil. Ne peut pas danser avec son fantôme, maintenant qu’il en porte un autre sur son dos. Peut le comprendre. Ça, il peut. Le comprendre. Mais les sourcils sont froncés dans une expression étrange -incrédulité, frustration. « It’s unfair. » It’s not supposed to go like this. « You’re not supposed to be the broken one, and you’re not supposed to make me want you back, and you’re- » Il se lève, force de faiblesse dont les membres ont été dispersés au vent, fait les cent pas, l’esprit-torrent et les mots qui débordent. « It’s not supposed to hurt like this, and I was supposed to be mad at you and I am, I really am, I don’t know what to do but I’ve lost so much and you say I’m breaking but I’m already in pieces, more than you know, and I wanted all of this » un vague geste pour représenter l’appartement. Lui. « to be gone and forgotten but when I hit the ground earlier I didn’t know what to do and all I could think about -all I can think about- is you and I hate it, I hate this, I didn’t mean to need you like this, and I’m trying to understand you and now I have ghosts too and I’m fucking scared, ok ? » Peur de trop donner. Peur de tout perdre. Peur du coeur en lambeaux qui faisait encore ravage. Des envies démentes et de leurs folies conjuguées. D’être déjà foutu. « I’m scared. » Les joues trempées se découvrent trop tard, enfant perdu au milieu du néant. Il a le souffle court, coupé par les mots.

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HEAVY IN YOUR ARMS (charon/atlas)

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