you'll go on with the show | ft. natsuki

Seitokai's office
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Le corps entier de Natsuki tremblait, oppressé par ce poids invisible qui pesait sur ses épaules. Des épaules si fragiles qui devaient porter la responsabilité de se marier avec quelqu’un de bonne famille (quelqu’un qu’ils avaient choisi) et de donner naissance à un enfant, et puis, de se tenir droite, avoir l’air douce, gentille, sage, parce que c’était ça, qu’on attendait d’une femme. Une femme devrait aussi baisser le regard face à un homme, l’homme au pouvoir, la femme dominée. Inconsciemment, Natsuki respectait ces stupides règles, le regard baissé face à Felix, mais uniquement parce qu’elle n’osait pas rencontrer son regard. Elle ne voulait pas le voir triste, elle ne voulait pas le voir désolé pour elle (voilà, elle aurait dû se taire et faire comme si tout allait bien ! Elle gâchait toujours tout !).

Mais le contact sur son épaule la tira de ses pensées et son souffle se coupa, avant qu’elle ne morde sa lèvre inférieure, toujours sans relever sa tête, se faisant violence pour ne pas craquer. D’un coup, debout, elle réalisait à quel point elle était fragile, à quel point ses jambes pouvaient céder à n’importe quel moment. Elle était si fébrile qu’une pichenette sur le front serait capable de la faire s’écrouler au sol et la faire éclater en larmes, de tristesse. Mais elle s’en empêcha, elle soutint le contact de Felix, ne se laissa pas avaler par sa douceur (montre-toi forte Natsuki, comme on s’attend de toi ; il ne faut pas pleurer). Elle secoua sa tête en boucle, comme pour dire à Felix que non, il n’avait pas besoin d’être désolé, de trouver ça injuste ; ce n’était pas grave. De toute façon, il ne pouvait rien faire. Natsuki n’avait pas compté sur Felix pour lui fournir un elixir magique contre les mœurs de sa famille sexiste, et elle savait très bien que le seul réconfort qu’il serait capable de lui apporter, c’était un « désolé » (et après, ils reprendraient leurs vies, parce qu’ils ne pouvaient rien y faire).

« Il y a quelqu’un d’autre, pas vrai ? » La tête de Natsuki vira vers le haut, la surprise écarquillant ses yeux. Comment ? Comment est-ce qu’il avait su ? Les yeux larmoyants à découvert, elle ne les cachait plus, ne se fit plus violence pour se cacher, ne pas céder sous la main de Felix. Elle le laissa la redresser alors que ses propres yeux se perdaient dans ceux de Felix, qui semblaient si sincères, si gentils. Elle était convaincue que c’était impossible de faire bouger les choses, mais là, dans cette pièce, face à Felix, elle avait l’impression que tout était possible. Elle pourrait en parler avec Haruka, elle pourrait finir heureuse avec lui, oui ! La deuxième main de Felix vint rejoindre son autre épaule, et puis. « T’es pas toute seule, Natsu. »
T’es pas toute seule, Natsu.

Pétrifiée, Natsuki se laissa complètement faire, soudainement blottie dans les bras de Felix, pendant à peine une seconde, trop court pour vraiment profiter du réconfort, assez long pour comprendre que c’était réel. La voix de Felix était réelle. Il lui avait vraiment dit qu’il pouvait l’aider. Qu’il était là. Qu’il le ferait, pour elle. Qu’elle n’était pas toute seule.
Elle se sentit soudainement profondément touchée, si touchée qu’elle le ressentait au creux de son estomac, serrer sa gorge, peser dans son cœur. Toute force l’abandonna, ses épaules se baissant, comme laissant tomber tout le poids de ses épaules, le laissant s’écraser au sol.
Elle éclata en larmes.
Son dos se courba de nouveau, ses mains se plaquant sur ses yeux, ses sanglots bruyants dans cette salle sans aucun bruit. Oh non, elle avait encore craqué, elle avait encore pleuré, elle n’aurait pas dû — mais bordel, ça faisait un bien fou. « Je suis… Je suis désolée, Felix… » gémit-elle entre deux sanglots, le visage plongé dans ses mains. Et puis, elle prit une grande inspiration, lâcha son visage et releva le regard dans celui de Felix, forçant un sourire (un hoquet la trahissant). « Merci… » Les sanglots reprirent de plus belle et elle se noya dans sa tristesse ; se raccrochant fermement à la main tendue de Felix.

Seitokai's office
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Entre ses bras solides, qui tentent de faire de leur mieux, elle devient comme une feuille, la délicate Natsuki. Légère, mais surtout tremblante. Qui s'effondre, tombe et tombe encore, jusqu'à toucher le sol s'il n'était pas là pour la retenir, Felix. Mais il est là. Juste là, exactement comme il l'a assuré. Quand les larmes montent et éclatent, quand les décibels résonnent dans la pièce, il saisit ses mains pour les retirer de ses yeux, les pousser juste un tout petit peu. « T'excuse pas. T'as plus besoin de te cacher, Natsuki, ça va aller. ». Et il lui sourit d'une chaleur un peu âpre, trainant ce poids dans le cœur qui restera encore quelque temps. Une dernière étreinte après son merci pour éponger les pleurs, murmurant à plusieurs reprise, Vas-y, il faut que ça sorte, ça va te faire du bien. Pour qu'il se sente mieux, il faudrait qu'il aille tenir le même discours à 13 000km d'ici ; alors pour ce soir, il se contentera de la petite victoire de voir Natsuki s'autoriser enfin à craquer, s'ouvrir. Crier, juste un peu, sa frustration qu'elle n'exprime pas à cause de stupides bienséances.

Après quelques minutes à rester simplement là, attendre dans le silence que le calme revienne, les épaules ne sursautent plus sous les larmes. Sa respiration redevient longiligne. Felix offre un verre d'eau en se rendant dans la pièce d'à côté, et comme les bosses de la plage de sable fin qui s'effacent sous les vagues et l'écume, Natsuki retrouve sa droiture et son visage sans larmes. Quelques sourires, quelques mots réconfortants, et sous les émotions qui se mélangent, ils décident rapidement qu'il n'est plus utile de rester encore longtemps enfermés dans la salle du seitokai à présent. Quant au projet de ballet, il attendra. Teintée d'amertume, plongée dans des non-dits qui ne resteront que derrière les portes de Mahoutokoro, juste entre eux, la danse a perdu un peu de sa superbe dans chacun des deux esprits. Peut-être que dans quelques mois, l'idée semblera plus douce voire même que l'un comme l'autre se retrouveront sur les planchers cirés de la scène pour se tenir la main et enchaîner les pirouettes.

En attendant, Felix raccompagne Natsuki hors des murs, là où elle lui dit que c'est suffisant, que ce soit un devant de porte ou le début du trottoir pour transplaner chacun chez soi.
Il est grand temps de rentrer, cœur lourd mais esprit enfin libre.