why am i so blue,,

le cœur a éclaté en mille morceaux sous le silence débordant ; l’incompréhension puis la colère ont fait vriller ses nerfs qui, eux, ont fini par lâcher. ça émerge et lui échappe, c’est terminé, elle ne sait plus comment gérer, comment se calmer, comment faire pour passer outre les sautes d’humeur de jp. les notifications qui ne viennent plus, l’ignorance assourdissante lorsque la gamine s’est peut-être un peu trop accrochée à ce qu’il restait d’eux.
et que restait-il vraiment d’eux, au fond?

une amitié écorchée par les non-dits et le début de sentiments malmenés par la rancoeur et une pointe de jalousie. la savage a tenté d’oublier tout ce qu’elle n’a su assumer mais, aujourd’hui, tout lui semble différent alors que tout rentrait dans l’ordre. illusion évidente quand les deux ne savent se contenter d’une relation paisible.

pourtant, c’est probablement la pire des idées que de le confronter maintenant mais la boule de feu ne pourra s’éteindre qu’en se consumant par la haine de ses mots qu’elle a envie de lui cracher au visage - le trop plein d’émotions en éruption, elle est inarrêtable dans le couloir souterrain, trop concentrée sur ce qu’elle lui dira, sur tout ce qui lui fait mal à l’intérieur tant elle a l’impression de tout retenir depuis trop longtemps. et si khalis était encore là, peut-être que tout serait différent, et si khalis était là, peut-être que ça ferait moins mal.

oui, c’est si douloureux qu’elle ne prend pas la peine d’admirer l’obscurité percée par les étoiles qui scintillent sur les parois du couloir. “jones, are you fucking kidding me? why are you ignoring me AGAIN? i swear to merlin you’re a fucking pain in the ass.” si douloureux qu’elle se fout de s’immiscer dans l’intimité du denki en s’engouffrant là où tout a commencé un jour - ce jour où, par un baiser partagé, tout s’est détruit violemment entre ses mains. “fuck you. fuck you a lot.” les mots sont incontrôlés et le ton est sûrement trop fort quand elle le pointe du doigt en s’avançant vers lui jusqu’à ce qu’un soupire coupe son avancée, comme si c’était tout ce dont elle avait besoin : de crier.

Les insultes fusent au moment où il s’apprêtait à entrer dans l’eau. L’orteil frôle le bassin alors que Jojo sursaute d’incompréhension. “Uh, mind you?” fait-il planer avec impertinence. Il cache son torse nu et ses muscles saillants par sa serviette. Non pas que JP déteste exubérer son corps ; il ne voit aucun problème à cacher une si belle œuvre d’art mais l’intrusion dans son intimité lui fait monter sa garde. Elle a l’air dans un état second, la belle rose. Et là, tout de suite, il a pas envie de gérer les crises d’une gamine. Son humeur n’est pas aussi flamboyante qu’à leur dernier échange. Et si d’habitude, son tempérament de feu l’amuserait pour la soirée, il n’est pas d’humeur à jouer avec elle. Elle a le fuck you trop facile et oh, comme c’est laid sur ses jolies lèvres. Il récupère son short qu’il enfile d'un mouvement – couvrant ainsi sa nudité totale. Complètement ébahi par ce qu'il se passe. S'il comprend bien : elle pénètre dans la nuit dans un endroit qui lui est interdit pour le priver de son moment détente. En plus de ça, elle l’insulte ? Qu’elle aille se faire foutre. Il s’est comporté comme un véritable nice guy avec elle alors qu’elle s’amusait à bercer ses canines dans son cou et là, elle joue la victime effarouchée. Boo-hoo, cry me a river. Le texan a envie de la pousser dans l’eau et la regarder se noyer mais il soupire. Garde ses esprits au calme et jauge la situation. Que vaut cette entrée assourdissante ? “You shouldn’t be here, Savage. I feel like I should tell you this before I report you to your house director.” Il joue la carte de l’autorité. Mâle qui domine par sa carrure et sa personnalité, il prend ce ton innocent patronisant pour la provoquer encore plus. “So get the fuck out.” Un réel petit batard, n’est-ce pas. Sa grippe sur la serviette se serre et il ne voile plus les battements de son cœur en alerte ; il ne lui fait plus confiance. Son instinct de loup solitaire hurle au danger. D’ailleurs, c’est pour ça qu’il recule lorsqu’elle s'avance.

le coeur dégringole violemment jusqu’au sol jusqu’à se fracasser contre le carrelage de la salle de bain, coupant son souffle et même ses mots, lorsque jp fait un pas en arrière - la vigilance dans les yeux qui ferment ses paroles ; il ne lui avait jamais parlé de cette manière avant, si peu personnelle, si lointaine. alors rose se garde à distance par instinct, un peu plus d’un mètre les sépare, comme le creux qui les isole depuis déjà trop longtemps. son souffle se perd dans la rage qui fait bouillir ses veines, s’étreint sur sa mâchoire serrée comme ses poings frustrés et son regard cherche celui de jp, autant pour le fusiller que pour, peut-être, trouver les réponses à ses incompréhensions. mais la gamine a les épaules qui se secouent d’un rire ironique aux mots du préfet. “you wanna call andrea? please do.” elle se moque de lui et de son rôle qu’il prend soudainement à coeur face à elle, comme si elle était n’importe quelle élève, comme s’il ne se connaissait pas assez pour que son état l’alarme juste un peu. la gamine hallucine face à l’indifférence de celui à qui elle a pu un jour faire confiance - c’est donc ce qu’il est quand il décide de ne plus lui parler. “imma leave only if you tell me what the hell’s going on.” déterminée à comprendre, elle ne lâchera pas l’affaire et pourtant, pour une fois, elle prend sur elle pour ne pas lui hurler dessus. le ton de la voix beaucoup plus calme mais tout aussi impatient qu’à son arrivée, camouflant la supplique qui la ronge pour lui faire cracher le morceau. parce qu’elle n’a aucun souvenir, non, aucun petit fragment d’image ne lui reste de cette dernière soirée où les révélations ont été trop difficiles à supporter alors elle ne comprend pas, rose, ne saisit pas la distance que jp a instauré entre eux depuis ce jour où le monstre a tenté de se nourrir de lui.

Les moqueries de la gamine seraient mignons s’il ne craignait pas pour sa vie. La perte de confiance totale. Il n’a plus envie de lui parler, de l’approcher, de la bercer de mots doux comme un bon gars. Ouais, il a envie d’être un connard. C’est ce qu’il fait : rejeter l’autre avant d’être blessé. Tant pis pour les dommages collatéraux. Ici, on survit. Et c’est pour ça qu’il renchérit à son ironie par plus d’insolence. “I said house director, not prefect, dumbass. Not sure what he’d do though, guy’s too busy with a needle in his arm.” Balle perdue pour Andrea qui ne méritait pas ça. Il aimait bien le gars mais là, l'exemple servait à accentuer l’impuissance des kasaï. Elle ne pouvait rien contre lui. A part si elle souhaitait réitérer l’expérience de ce dimanche douloureux et planter à nouveau ses canines dans son cou. Joao, qui avait survécu aux malédictions et à la mort, ne se laisserait pas faire aussi facilement. Pas de féminisme qui tienne ; les filles méritent d’être frappées autant que les garçons lorsque le besoin s’en ressent. Ouais, bien qu’il n’ait aucune envie de vivre, il espérait survivre du duel avec le rokurukobi. Espoirs nonchalants et inespérés de l’homme sans vie. Enfin, elle semble calmée la petite. Enfin, aussi calme qu’elle puisse être après ce ton tapageur et ces fuck you balancés à outrance comme on dirait bonjour (non, elle a même pas dit ça, la racaille) Et putain qu’est-ce qu’il a envie de rire à ce moment. Appelez-ça la folie du condamné ou la nervosité du petit garçon, ça n’empêche qu’un ricanement sec et dénué de toute affection sort de sa gorge. “As you can see, I was about to take a well-deserved hot bath and you barged in there. So, more like, what’s wrong with you?” Le ton est chantonnant, sardonique, pleinement conscient qu’il lui refuse ce qu’elle supplie. Honnêtement, il a rien à lui dire. Aucune envie de discuter du soleil et de ses films préférés quand chaque seconde qui s’écoule en sa présence le mène à une mort prématurée. Ouais, c’est pas encore l’heure pour Joao. Il a un troisième décès à pleurer. Granny attend ses médicaments de la journée et le futur lui a enfin donné le droit de rêver. “So, if you be so kind as to close the door when you leave, please. Yeah, thank you so much.” Et il lui tourne dos pour la faire disparaitre. S’il ne lui donne aucune attention, elle partira de son plein gré, se dit-il. Bonne technique. Baisse ta garde devant la vampire ouais.

un mouvement de recul, presque de surprise quand les paroles de jp démolissent ses tympans. même son visage n'arrive pas à contenir le dégoût face à la violence qu'il emploie — est-ce elle le problème ou juste la légendaire bonne humeur du préfet denki ? elle ne comprend plus réellement la gamine, ne sait plus où elle en est, subit les montagnes russes que jp lui inflige à chaque fois qu'il en a assez d'elle ou à chaque fois qu'il s'ennuie et, finalement, c'était peut-être vraiment la pire des idées que de chercher à lui parler.

aussi bancal que ça puisse être, elle s'ouvre pour qu'il se braque et elle aimerait tant taper du pied comme une enfant gâtée qui n'a pas ce qu'elle veut mais la rage semble pulser encore plus fort dans ses veines quand jp prend ses airs supérieurs sans avoir besoin de redresser le menton. "i don't give a fuck, my uncle is the director of the whole damn school and you think i'd cry for a few days of expulsion?" les yeux roulent de consternation avec exagération mais derrière l'artifice, rose est fatiguée, cherche réponses à ses questions et se confronte à un mur qu'elle veut enfoncer tel un bulldozer. pourtant, elle reste là, à le regarder sans rien faire, sans rien dire. ne sait même plus quel chemin prendre, perdue entre l'envie ardente de lui gueuler dessus et le secouer pour qu'il crache le morceau et celle de partir en claquant la porte trop fort et ne plus jamais lui reparler.

elle se baigne dans l'incompréhension pendant qu'il se fait couler un bain et l'ironie semble bien trop stupide pour ne pas que ça en devienne drôle. elle a les bras ballants, une moue désemparée sur les lèvres et lui est à moitié nu face à elle sans qu'elle s'en soit rendu compte avant. un soupire brûle ses lippes et, par réflexe, la gamine se tourne à son tour avant de pouvoir voir la serviette tomber. et peut-être que c'est plus simple, en fait, de lui tourner le dos, de ne pas le regarder, de ne pas deviner toute la déception, toute la peur, tout le dégoût dans ses yeux. peut-être que c'est plus simple. "'kay... sorry for that but... seriously. can we like... talk?" c'est douloureux à quel point la gamine prend sur elle, à quel point ce n'est pas naturel, tant qu'elle n'envisage même pas une seconde de partir pour remettre cette conversation à plus tard. "why are you running away from me?"

comme tout dans sa vie, c’est principalement la peur qui le motive à avancer. peur d’être laissé derrière, peur du futur, peur de la mort. monsieur joao a toujours peur, comme une petite fille enfermée dans un placard. alors lorsque la petite fille qu’il pensait inoffensif devient son monstre personnel, c’est à son tour de sortir les dents. il n’a pas de superpouvoir, jojo. il n’est pas animagus, godai ou loup-garou comme tous les gars de cette école. c’est un gars lambda nourri à la malchance et aux berceuses de la faucheuse. le sorcier n’a que sa baguette, ses poings et ses mots pour se défendre face aux terreurs. et parfois, ça fait beaucoup plus mal que n’importe quelle morsure de vampire. il n’aime pas ça, mais c’est nécessaire. blesser avant d’être blessé. couper le cordon avant qu’elle ne lui coupe sa tête. mais le monde est contre lui, l’a toujours été. voici devant lui une enfant nourrie aux privilèges (il aurait bien aimé avoir un oncle puissant comme elle mais malheureusement son dernier parent en vie est une vieille dame flirtant avec la tombe) “oh wow, so great for you. must be nice to always have someone covering your back and to never have to pay for the consequences of your acts. i love your life, really.” affirme-t-il avec sarcasme pour poursuivre sa lancée. lui terriblement jaloux car il est : seul. affreusement seul.

il sent la conversation se tempérer. le calme reprend sa place derrière la tempête savage. son cœur se met à battre à un rythme indécent, martelé entre l’inquiétude et le regret. il s’est comporté comme un chien, et elle n’a rien mérité de tout ça. c'est pas sa faute si elle doit s’abreuver depuis des veines, il l'entend bien. et il aimerait, un jour, connaitre l’histoire derrière ça. juste pas aujourd'hui. can we talk? demande-t-elle. non, il veut répondre. sec et franc. et la douleur revient à l’avant-plan. ah, rose, jolie rosie, ne me regarde pas avec ces yeux-là, plaide-t-il.

i’m running away ‘cause i’m a coward, what other reason do you need? i’m running away ‘cause you bore me and i wish you’d leave me alone. people should stop following me, i’m so tired of it. i’m running away ‘cause i’m scared of you. i wanna die but i also really wanna live and you’re the monster in-between.

il ravale sa salive, mâchoire serrée et muscle contracté. puis il s’efface, comme il le fait toujours si bien avec tout et tout le monde : “i’m not running away from you, i’m busy.” dit-il difficilement. le mensonge plus clair que l’eau persillé dans le bassin. et il aperçoit déjà son visage se décomposer et le véritable mensonge serait de dire qu’il n’a rien ressenti. alors il se rétracte avec hésitation. “you don’t remember? that time, you, uh... (il la fixe un instant) ...nevermind.” retour case départ, car jp préférerait crever que d’admettre qu’il n’est qu’un être humain apeuré.

bercée toute sa vie dans les bras de ses frères et sœurs, ça l’a toujours faite rire qu’on pointe du doigt ses gardes du corps lorsque quelque chose n’allait pas. si rose a toujours su se défendre seule, les savage ont toujours réussi à le faire encore mieux qu’elle et c’est pas grave, c’est ce qu’ils sont. famille bancale, déglinguée mais aussi soudée que les racines d’un arbre à la terre. c’était pas grave jusqu’à ce que jp le lui fasse remarquer - son oncle n’a jamais vraiment été là pour elle, pour eux, n’a su qu’être un soutien partiel lorsque son propre fils l’a transformée en ce monstre qu’elle essaie toujours de cacher. c’est qu’une excuse, une arme pour se protéger et, sortis de sa bouche à lui, les mots ont l’effet d’un couteau qui se plante jusqu’au plus profond de ses entrailles qu’elle aimerait arracher d’un coup sec, prête à hurler. i love your life celle qu’il voit ou celle remplie de dettes, de douleurs, de déceptions, de solitude, d’amertume, de faux-semblants, de mensonges, de regrets, de peurs? dis-moi jp, qu’est-ce que tu envies tant?

c’est finalement encore des excuses qu’il lui crache dessus et quand la gamine se retourne à nouveau face à lui, elle est perdue entre l’envie de capituler et celle d’exploser. seulement, la lueur dans les yeux de jp lui fait si mal qu’elle baisse les siens, presque noyés de larmes avec honte qu’elle renifle instantanément pour tout effacer. “don’t play this game with me, i can recognise a liar when i see one.” parce qu’elle est une belle, de menteuse, mais ça ne sonne pas comme un reproche mais plutôt comme une invitation à lui dire la vérité;

you don’t have to lie with me.

“what?” qu’elle demande, incrédule, se demandant là où il veut en venir, se demandant de quoi il parle, de quel moment. les sourcils se froncent et, pendant un instant, elle a peur que sa mémoire déraille, devrait-elle se souvenir de quelque chose?

et c’est la panique qui grimpe dans ses veines et étouffe sa poitrine, la peur lui retourne puis lui bouffe les entrailles, d’un coup. le visage qui tente de garder face, elle attend, quelques secondes, des réponses. toutes les réponses. “that time when what?” qu’elle se répète alors que tout commence à prendre sens. les seuls moments qui s’effacent de sa mémoire, les seuls moments où le dégoût et la peur se dessinent dans les yeux des autres ((l’a-t-elle blessé?)). au plus profond, elle espère se tromper mais alors que le silence est insoutenable, elle ose à demi-mots : “did i hurt you?” la voix remplie d’une tristesse infinie et pourtant si ferme, presque sévère ; elle est prête à faire demi-tour, à fermer cette porte qu’elle n’aurait jamais dû franchir et ne plus jamais le revoir.

la bombe lâchée, il aurait dû savoir qu’il n’était ni suffisamment assez beau ou bon acteur pour qu’elle soit éblouie et oublie tout ce qui venait d’être dit. il observe son visage se contorsionner de doute et de peur, et ça ne fait que valider ses théories. qu’est-ce qu’il se sent con, jp. pendant des mois, il s’est mis en danger et il a cru à ses mensonges alors qu’il prétend lire dans les gens. mais elle l’a nourri à la merde et il est tombé dedans comme un citadin dans une ferme. did i hurt you? elle demande et il veut répondre oui. pas physiquement, car la plaie a déjà guéri depuis. mais elle a contusionné son égo, son déguisement de mâle alpha intouchable. tout ça en le regardant avec des yeux de bambi qui voulaient être sauvée. les femmes sont maléfiques. “yeah, you took my virginity and didn’t call back.” plaisante-t-il d’un sarcasme sec, car c’est sa réponse à tout pour éviter de confronter ses angoisses, se livrer et dire la vérité (dont il a besoin pour s’alléger). il vit de cynisme et d’eau tiède, récoltée à la source du styx où les morts dansent en avance sur sa tombe. “you did the weirdest thing to me.” finit-il enfin par avouer, enfin vaincu par une demi-heure de faux semblants. les flashs de la soirée lui revient et son sérieux avec. “we were at that party, remember. we were gonna make out, but you kissed me in the neck? it was fine by me, i thought it was hot. but then it hurt and i realized you weren’t kissing or licking or whatever... so I’m gonna ask you something, and you’re not gonna lie to me, because i’ll know it and then you’ll go to hell, savage.” en y repensant, oui, ce n’était pas normal du tout. rien n’allait à cette soirée. commençant par l’alcool périmé qu’ils se partageaient à cette intimité étranger, il aurait dû se douter que rien dans la vie n’était si facile. il le savait bien. mais voilà le sceau est brisé, la parole libérée. quitte à tout lâcher, autant préparer le terrain de manière dramatique. “are you a vampire? or what’s that name, rokurokubi is it? you hate me so much you tried to kill me?” et il n’arrive pas à croire qu’il prononce ces mots. sa voix se brise au milieu alors qu’il la regarde avec un air d’incompréhension. il peut s’en prendre qu’à lui-même pour avoir joué avec elle sans n’avoir jamais rien offert en retour. il est donc ce genre de connard : celui qu’on tue.

elle ne souvient pas de toute cette partie, seulement d'une soirée trop mouvementée où les spots lui grillaient la rétine, où les bruits grondaient si violemment dans ses tympans qu'elle est allée s'isoler, juste un instant. elle s'est fourrée dans un coin, près de la fenêtre pour prendre l'air et- black out.
que vient-il de dire?
les sourcils froncés, trop d'informations s'accumulent et finissent par lui échapper alors qu'elle tente de rester concentrée sur le plus important ((vient-il vraiment de faire allusion à une potentielle relation intime entre eux?)) ; la morsure.

c'est la voix plus grave de jp puis le frisson d'effroi qui lui traverse tout le corps qui la font reprendre pieds. les yeux de jp lui rappellent la lueur dans ceux de ren, ce regard qu'elle posait sur elle quand elle murmurait aux autres à quel point elle n'était pas assez bien. ça lui rappelle que personne n'est prêt à lui donner en retour ce qu'elle est prête à offrir quand elle est la première à paniquer dès qu'une once de sentiments se dessine dans sa poitrine. parce qu'elle a beau eu toujours le nier, il est clair que jp s'ajoute à ceux qui ont su soulever son cœur sans qu'elle s'y attende pour finir par le briser. gamine qui n'a jamais cru en l'amour mais qui s'est, finalement, toujours laissée berner.

et plus les mots se déversent et plus rose a envie de partir, de juste lui dire que, oui, elle est ce monstre qui a essayé de boire son sang, qu'elle peut être ce monstre à n'importe quel moment, qu'il devrait se méfier à partir de maintenant et de p a r t i r. pourtant, c'est sa dernière phrase qui la retient. "wow that's not fair." les sourcils haussés sous la stupéfaction, y a quelque chose de trop fort qui gronde à l'intérieur, perdu quelque part entre la peine, la culpabilité et l'injustice naissante. elle prend enfin la parole, rongée par trop de sentiments à la fois. "i mean- i'm sorry. i'm truly sorry i've never told you that part of me but it seems like it was the right thing to do at the end." à nouveau, la gorge se serre et les pupilles se noient sous la douleur de l'évidence mais rose ne s'en rend même plus compte, elle étouffe déjà. "i know you'd look at me the way you are now if you'd known before and-" i was right, it hurts like hell. it hurts so much i barely can bear it. un soupire coupe son élan mais elle reprend. "i don't hate you. i've never hated you, i mean- yeah actually i have when you kissed evie after you took my virginity and didn't call back. that's what we say, isn't it?" les mots ne sont pas aussi tranchants qu'ils résonnent en elle mais l'ironie déforme ses lèvres en un sourire amer, une amertume-délivrance qui s'étale sur le carrelage de la salle de bain en déclaration hasardeuse. la valve est ouverte. "anyway. i actually have a lot of reasons to hate you and yet, i just can't." what have you done to me? à bout de souffle, la rage a rougi ses yeux, la peine dévale désormais silencieusement ses joues jadis bien rondes et la rancœur racle si fort sa gorge que ça fait mal.

le tableau pittoresque dégouline sur les pieds nus de jp ((lui qui doit bien rire d'elle - mais elle ne sait pas, elle ne le regarde plus vraiment)) et rose n'a, en fait, plus la force. elle capitule. "yes, i am a vampire. i am that monster. i'm truly sorry tho, i didn't mean to hurt you, i didn't mean to hurt anyone. i won't- i won't bother you anymore, don't worry." les paumes de main sur son visage essuient la trace de toute l'énergie que ces mots lui ont demandée pour être prononcés et, après un dernier regard, rose se retourne, prête à laisser ça à vif et s'enfuir pour que jp en fasse ce qu'il veut - parce que ça n'a plus d'importance.

Ce n’est pas que JP a peur (il est terrifié), ce n’est pas qu’il a froid et qu’il est fatigué (il veut rentrer chez lui et dormir), ou qu’elle soit en train de pleurer devant lui (ça le met mal à l’aise). Ce n’est pas ces choses là qui le dérange le plus. C’est avant tout le mensonge. Ce petit être malicieux qui se faufile sur les bouches de tous. C’est le manque de confiance. C’est le fait qu’elle soit dos au mur et que sa traitrise ne la perturbe pas.
Il voit bien qu’elle panique, mais lui il est tétanisé, incapable de rétorquer face au flot d’émotions qui se déverse sur lui. Les mots défilent dans l’air, les sons après les autres, les regrets couvrent les mensonges, et rien de tout ça n’a plus aucune importance. Quelque chose en lui est fêlé. Un nœud dénoué, une carte postale déchirée, une confiance brisée. Et il a envie de compatir, il veut réellement, mais aucune inquiétude ne transforme son visage. Il demeure l’insipide, impassible, nonchalant Joao. Elle mentionne Evie et ça lui permet de reprendre son souffle. Regard dégagé pour éviter à nouveau ce sujet. Ça ressasse et ça cogite, elle revit le passé alors qu’il a déjà jeté ces souvenirs dans une boîte, lui trop tourné vers l’avenir. Pourquoi ne peut-elle pas lâcher prise ? Tout de même, il parvient à esquisser un sourire, trop faible pour être réellement vu. Parce que malgré tout, elle reprend ses mots, son sarcasme et ça a l’effet d’une pierre jeté dans le lac. Comment ne pas sourire à ce moment précis ? Mais pour elle il n’y a rien d’amusant ; ce n’est qu’un océan amer et sec qui s’écoule sur ses joues. Devrait-il la prendre dans ses bras ? Il résiste l’envie d’encadrer son petit corps dans le sien, car il ne peut pas céder à son pathos. C’est lui la victime.

JP ne comprend pas. Du moins, il comprend tous les mots qu’elle envoie, mais il ne comprend pas. Pas vraiment, ou il ne veut pas. Les sentiments s’éclaircissent et enfin, son miroir se fracasse. Le visage se tord d’une âpre compréhension. Oh. She doesn’t hate me? Not that much, not a little, not at all? Si ce n’est pas la haine, qu’est-ce donc ?  

La tirade enfin terminée, il exhale. Le poids qui l’empêchait de soulever ses poumons se dissipe. Elle lui tourne le dos, et s’il ne la rattrape pas, elle est partie pour toujours. Comme les autres, comme d’habitude. “You’re not a monster.” finit-il par soupirer, s’en voulant à lui-même pour céder. Elle a tiré, l’a atteint droit dans le cœur, et il n’arrive pas à la dégager. Comme un foutu chewing-gum collé entre ses organes qui entraverait son fonctionnement. C’est Rosie, la petite Rose. La sauvageonne aux lèvres fleuries et aux mots colorés. Les sentiments portés sur les joues, la rage dans le cœur. Kasai flamboyante, jumelle impitoyable, enfant malgré l’effort, avec tant d’années devant elle. Elle pense qu’il ne voit pas mais il sait. JP sait bien qui elle est. Il est terrifié mais il n’a pas peur. “What bothered me that night,” il continue, car il n’a pas fini. Elle ne peut pas crier, cracher, lâcher et s’enfuir. La vie n’est pas si facile. “What bothered me is that I didn’t understand. Maybe if I knew I wouldn’t have freaked out, maybe I would have told you sooner? Maybe I would have let you. Didn’t I deserve at least that? A tiny piece of your trust? I don’t know. Now we’ll never know.” Car elle a décidé pour lui et l’histoire a été écrite ainsi.

les larmes sont essuyées frénétiquement, pas par honte ou par gêne, juste parce que c’est dérangeant de pleurer devant lui. rose n’aime pas pleurer, parce que c’est inconfortable, ça laisse les yeux gonflés et si, parfois, ça fait du bien, ça fait surtout plus de mal encore au réveil. c’est toujours comme ça quand elle pleure, elle ne voit plus rien, ça gratte, ça empêche de parler correctement et en plus, ça crée une douleur lancinante dans la poitrine, aussi lourde qu’un poids au sol qui lui rappelle à quel point elle n’est pas assez forte pour le soulever.

elle était prête à partir la gamine, à déguerpir et laisser tout ça derrière elle - elle s’imaginait déjà le croiser dans les couloirs ou dans les soirées étudiantes et simplement l’ignorer, peut-être même effacer son numéro de son téléphone et, tel un film tragique, marquer le the end de cette histoire qui n’a jamais vraiment eu de sens. mais jp en a décidé autrement, érigeant un mur devant elle qui la stoppe net dans sa lancée. soudainement, ses épaules s’affaissent, libérée d’une charge énorme qui les détende. des mots salvateurs qui lui donnent encore plus envie de pleurer mais rien ne sort, y a juste ses yeux rivés sur la porte face à elle qui n’osent plus se retourner. elle sait pas si elle a bien entendu, peut-être même qu’elle a halluciné et qu’il se demande pourquoi elle ne part plus. puis, il reprend la parole et rose a les poings qui se ferment, dans l’appréhension, elle tend l’oreille, retient son souffle, la lèvre inférieure rongée par les dents nerveuses.

et là, elle ne sait plus. tout se mélange entre l’ironie de la mention de confiance et la peine qui résonne dans sa voix. c’est assez clair mais elle ne sait plus comment lui dire qu’elle est désolée, comme si ça bloquait au fond de sa gorge et qu’elle ne pouvait plus sortir aucun mot. parce qu’elle aimerait lui dire à quel point elle s’en veut autant de ne jamais lui avoir dit que de l’avoir blessé, elle aimerait même pouvoir revenir en arrière si elle le pouvait maintenant qu’elle sait. mais comment pouvait-elle savoir avant de toute façon? bien sûr qu’il est trop tard et elle n’a pas l’impression que ce soit de sa faute. tous ces mois martelés de disputes insensées entre malentendus et égos surdimensionnés, elle aurait tellement eu envie de lui dire si seulement il avait été prêt à l’écouter mais elle n’aurait pu risquer de le perdre pour de bon. “you know why we lie sometimes, why we hide the truth.” ils ont des secrets qu’ils n’osent pas dire à haute voix alors elle laisse sous-entendre celui-là, ne reparlera pas de leurs pères parce que ce ne serait pas le bon moment mais la mention lui sera sûrement assez parlante pour qu’elle n’ait pas à en rajouter. et, désormais, son regard cherche au sol le courage nécessaire pour lui faire face encore. pendant quelques secondes, ses doigts pianotent dans l’air, près de sa cuisse, dessinent une flamme, si petite et si frêle qu’elle fixe pour s’en nourrir.

une longue inspiration lui permet de faire un quart de tour, juste assez pour le voir et poser à nouveau ses yeux sur lui mais pas tout à fait en face pour se laisser une porte de sortie. “i’ve told you things that i could never tell anyone else. not even my family. it’s not about trust, i was just…” ce mot est plus douloureux que les autres. “afraid.” les doigts agités s’emmêlent entre eux et pourtant, rose est bien plus calme, le ton de voix posé, presque solennel. elle prend le temps de respirer entre les syllabes, ça aurait été tellement plus simple si elle était déjà partie. “afraid that you would… leave me.” cette fois, le regard est fuyant, quasi gêné sous tant d’honnêteté. gamine qui n’a pas pour habitude de se laisser parler, elle est aussi gênée que si elle avouait une bêtise - et peut-être que ça l’est, d’espérer qu’il reste près d’elle, même seulement pour l’énerver, quand tous ceux qui ne partagent pas son sang ont finir par partir, eux aussi. “nevermind.” un rire fatigué transperce sa gorge, vidée par les dernières confessions. “i take this on me and now, i should let you rest or… whatever.” la salive fait un peu mal quand elle dévale sa gorge serrée, la main sur la poignée de la porte. “i’m sorry… for everything.” c’est inhabituel tous ces mots qui sortent de sa bouche et rose n’a qu’une envie, c’est de se cacher au fond de ses draps et ne plus jamais en sortir parce que cette solution semble bien plus simple que d’assumer tout ce qu’il vient de se passer.