holder of my heart (gaia)

Depuis que Tianyi était revenu pour s’excuser à Gaia, les choses avaient légèrement changé dans leur relation. Tianyi ne se cachait plus autant qu’il tenait à Gaia, puisqu’il l’avait dit à voix haute, bien trop montré pour prétendre que c’était faux. Gaia était la personne la plus importante dans sa vie et il comptait faire en sorte que tout le monde le sache, pour que jamais personne n’ose toucher à un seul de ses cheveux. C’était pour ça qu’il surveillerait bien Yujin, ayant supposément un crush sur Gaia (attention aux garçons qui osaient s’intéresser à Gaia, parce que la possessivité de Tianyi le rendait malheureusement excessivement jaloux, aussi, quand bien même Gaia n’était à personne, et surtout pas à lui). Gaia lui avait dit qu’elle pensait qu’il était son soulmate, et il n’avait pas su le nier. Y avait pensé, repensé, encore et encore. Jusqu’à ce que ce soit l’évidence, finalement. Ils ne s’aimaient peut-être pas romantiquement, mais leur amour était plus fort que n’importe quel amour romantique que Tianyi avait pu recevoir, dans sa vie. Il n’avait jamais autant tenu à quelqu’un et dans un sens, ça lui faisait peur, il avait envie de s’enfuir et de se séparer de Gaia, car aimer quelqu’un, c’était terrifiant ((une faiblesse)). Mais il avait vécu dans un monde sans elle, et trouvé que c’était l’enfer sur Terre. Il ne pouvait pas vivre sans elle. Alors quitte à ne pas pouvoir se passer d’elle, autant affirmer leur lien, non ?

C’était pour ça que Tianyi se retrouva devant la porte de Gaia, le cadeau dissimulé dans sa poche. Lorsque Gaia lui ouvrit, Tianyi sourit légèrement, et vint ébouriffer ses cheveux. « Hey, birthday girl. » Il ne se fit pas prier pour entrer, s’assit sur le canapé puis jeta un œil à Gaia, le sourire n’étant toujours pas tombé de ses lèvres. « I’ve got you a present. Guess what it is ? »

---

Cet anniversaire avait la saveur du bonheur, loin de la catabase qu’elle avait vécu presque un an auparavant. Elle n’aurait jamais cru possible d’être heureuse, le vingt-et-un avril d’après, et l’équilibre était encore parfois vacillant, le miroir-épouvantard. Mais Gaia avait trouvé des raisons de vivre, était retournée vivre à la maison, avait une colocataire, et Tianyi était revenu dans sa vie, sans doute pour ne plus la quitter - elle le lui avait interdit. Elle avait passé la matinée dans la cuisine, à préparer la fête, les plats qui s’enchaînaient alors qu’elle ne pourrait même pas en profiter, mais c’était important pour elle, que tout le monde puisse manger à sa faim. Il avait dit qu’il viendrait avant les autres mais elle ne regardait pas l’heure, trop occupée avec la farine, le nez taché de poudre ; et c’est comme ça qu’elle ouvre la porte, un grand sourire sur les lèvres en le voyant, qui s’agrandit en voyant le sien, un peu surprise de ce nouveau Tianyi qui sourit et lui ébouriffe les cheveux. “Hey, birthday girl.” Elle le laisse entrer et vient s’asseoir à côté de lui sur le canapé, regarde la boîte qu’il tient dans les mains avec l’excitation d’une enfant le matin de Noël. “I’ve got you a present. Guess what it is?” Elle fait mine de réfléchir sérieusement, bien incapable de deviner ce qu’il lui a pris. D’habitude, c’est plutôt lui qui devine, pas l’inverse. “Mmmh, I don’t know… a book?” Elle propose sans trop y croire, parce qu’elle sait que ce n’est pas ça, que lui offrir un livre est un cadeau un peu facile, une manière d’être sûr de tomber juste. “I don’t know, I’m terrible at guessing!”

---

Le cœur s’apaisa immédiatement lorsque les yeux se déposèrent sur Gaia, Gaia et son grand sourire, Gaia et ses yeux brillants, Gaia et sa farine sur le nez. Il sourit légèrement en apercevant ce détail, se contenta de lui ébouriffer les cheveux en entrant chez elle comme si c’était chez lui. Il sortit la boîte de sa poche, l’agita sous le nez de Gaia, lui demanda de deviner. Il avait un léger sourire amusé, Tianyi, mais sans aucune malice derrière. Un sourire sincèrement doux, fondu comme de la glace au soleil, réconfortant comme le sable de la plage en été. Ses yeux se baladèrent sur le visage de Gaia, faisant mine de réfléchir sérieusement. « It’s not a book, princess. » Son sourire s’élargit et il plaça son autre main par-dessus la boîte. « Look. » Il ouvrit le boîtier, et voilà deux bagues alignées, enfoncées dans le tissu. Presque une demande en mariage, si on le voyait d’un œil extérieur (et peut-être que c’en était une ; une demande pour être liés à jamais). Il jaugea rapidement la réaction de Gaia, mais impatient comme il était, il fut incapable d’attendre qu’elle réagisse toute seule : il prit alors la première bague (celle de Gaia, il le savait, il avait retenu), reposa le boîtier sur sa jambe de l’autre main, puis se permit de prendre la main de Gaia pour le lui enfiler sur le doigt (l’index ; Gaia et lui n’étaient pas mariés, même si c’était tout comme). « Isn’t it pretty ? There’s a red thread, here. » Il lui désigna le fil rouge sous la surface, coincé entre les deux bouts de métal d’or : signe de leur lien d’âmes-sœurs. Tianyi lui lança un regard, souriant légèrement. Implicitement, il lui disait que c'était elle.
Son âme-sœur.
« Happy birthday, Gaia. » Et du pouce, il vint essuyer la farine sur le nez de Gaia ; se mit même à sourire affectueusement en voyant son expression.

---

Il faut dire que la boîte est petite, forcément trop pour cacher un livre, même si un sortilège aurait pu le dissimuler et la mettre sur une fausse piste. “It’s not a book, princess.” Le surnom fait grandir son sourire, rosit ses joues et fait picoter son ventre, et elle s’apprête à faire une autre proposition pour deviner lorsqu’il pose une main sur la boîte pour l’ouvrir, rompant le suspense. “Look.” Et elle regarde, elle ne peut plus faire que ça parce qu’en voyant les deux bagues d’abord elle ne comprend pas, mais ensuite tout s’arrête de fonctionner, parce que l’écrin ne renferme pas qu’une seule bague mais bien deux, parce que le cœur bat la chamade et qu’elle ne comprend pas. Alors elle regarde, la boîte puis les bagues puis Tianyi, sa main prise délicatement et la bague qui n’est plus dans l’écrin mais à son index. Elle se dit qu’elle n’a jamais vu une aussi jolie bague, la bouche un peu entrouverte de surprise, parce que pour lui, c’est inattendu. Tianyi réussit bien ses cadeaux d’anniversaire, d’habitude, mais celui-là a quelque chose en plus, une dimension sentimentale dont elle ne devine pas encore tout à fait l’ampleur. “Isn’t it pretty? There’s a red thread, here. - what?” Elle penche la tête pour suivre son doigt, aperçoit le fil rouge, et si jusque-là elle était interloquée par la beauté de son cadeau, cette fois elle s’arrête complètement de respirer, de fonctionner, parce qu’il ne lui faut qu’un instant pour comprendre ce qu’il vient de dire en un geste. Interdite, elle ne réagit pas trop, jette encore un coup d’œil à la boîte posée sur sa jambe, toujours garnie d’une autre bague, la même, exactement la même. “Happy birthday, Gaia.” C’est son pouce sur son nez qui la ramène à la réalité, ou plutôt qui rend à son corps toutes ses fonctions ; et aussitôt les larmes montent, troublent sa vue, la silhouette frêle qui s’élance pour le prendre dans ses bras, fondre en larmes, la boîte qui tombe peut-être au sol mais Gaia qui ne pense qu’à le serrer, la tête enfouie dans son cou, à sangloter “I love you so much, this is the best birthday gift ever.” Elle s’arrête une seconde, avant d’ajouter doucement, comme si elle lui disait un secret, “You make my life worth living.”

---

Tianyi ne doutait jamais de lui-même. Il savait ce qu’il faisait, contrôlait toujours tout, rebondissait facilement sur les éventuels imprévus. Mais là, son ventre s’était quand même noué, par peur que Gaia rejette le cadeau, qu’elle ne se sente pas aussi proche de lui que lui ne se sentait d’elle, qu’elle n’aime pas le cadeau, finalement. Étrange. Huang Tianyi ne doutait jamais, mais Gaia Belacqua était l'exception.
Des doutes qui s’évanouirent aussi rapidement qu’ils n'étaient venus lorsque son regard atterrit sur le visage de Gaia alors qu’il lui essuie son nez, élément déclencheur, le tremblement de terre s’activant, la tornade se déchaînant, le tsunami s’écrasant. Gaia explosa en larmes et l’enlaça, la boîte se contentant de rouler sur le canapé, Tianyi serrant son âme-sœur en retour. Il ferma les yeux, se contenta de rester immobile, sentant la présence réconfortante de Gaia contre lui. Il n’aurait jamais imaginé aimer autant quelqu’un et que ce quelqu’un l’aime de la même façon. Il avait toujours trouvé ça stupide. Irréaliste. Tiré des contes de fées les plus fantaisistes. Tianyi n’y avait jamais cru, à l’amour : mais Gaia lui prouvait le contraire. Le contre-exemple qui rebutait son affirmation. Ou peut-être plus, l’exception qui confirmait la règle.
« You make my life worth living. »
Tianyi rouvrit les yeux. Il se rappela du jour où il avait retrouvé une Gaia tétanisée, apeurée d’elle-même, mortifiée à l’idée de vivre. Et aujourd’hui, elle lui disait que sa vie valait la peine d’être vécue, grâce à lui.
Il sourit, affirma son étreinte. « I’m glad, » souffla-t-il d’abord. Et après quelques secondes de silence, « Mine too, » avoua-t-il. I love you.
Ils restèrent comme ça pendant quelques minutes, Tianyi s’occupant de réconforter une Gaia sanglotante dans ses bras, avant que finalement le câlin ne se rompe et que Tianyi ne récupère la boîte, se glisse lui-même la bague sur l’index. Il l’observa, regarda les reflets, le fil rouge à l’intérieur. Lié à tout jamais à quelqu’un d’autre.
L’idée ne le dérangeait même pas.

La bague était magique, pouvait transmettre les touchers d’une bague à l’autre. Tianyi avait tapoté deux fois sur sa bague, Gaia avait écarquillé les yeux, s’était émerveillée.
Et Tianyi avait souri.

---