TROUVE-MOI A MINUIT / rose.

Cœur brisé sans aucun intérêt pour la gente féminine et pourtant, il se préparait à revoir cette fleur aux épines acérées. Le mot date n’était pas inconnu sur sa langue. Trop charmeur pour son propre bien, il s’était déjà retrouvé dans des situations inédites à séduire des filles aléatoires. Ça tenait le temps occupé pour celui qui n’en avait pas, ça lui évitait de philosopher sur sa condition de mortel et à quel point, sa vie était foutue jusqu’aux dents. Rouillé et désintégré, sans aucun potentiel d’avenir, il n’y avait que des chaînes à son cou et des boulets à ses pieds. Rien d’autre pour le fameux Jojo qu’un destin aussi cruel que son passé. L’amour n’y avait pas la place. S’il était généreux alors il s’essayerait à l’affection. Mais ça aussi... Difficile. Sa confiance est enterrée et son cœur absolument mort. Telle une étoile qu’on observe dans le ciel, il brille de mille feux avec latence, et pourtant, il est éteint depuis si longtemps. Pourtant, pourtant, dans son immense imbécilité, il trouve des gouttes de naïveté accrochés à ses poumons parfois. Et peut-être que, peut-être... Lui aussi, il peut.

Alors il attendait cette fille interdite à la couleur d’un coucher de ciel embrasé et au caractère tout aussi tempéré. Après avoir goutté au fruit défendu à deux fois (et jamais deux sans trois) il s’était préparé à se faire lacérer le corps par égoïsme pur et simple. Reyn l’avait prévenu de ne pas jouer avec. Keita aussi avait balancé leur amitié dans des menaces qu’il exécuterait. Et JP ne peut s’empêcher d’ignorer ces voix masculines trop bruyantes. De mépriser cette famille trop unie qui lui sautera à la gorge au moindre faux pas. S’il veut, il fera. Si elle veut, il acceptera. Ça le rend presque malade de voir tant de grands garçons bercer une fille aussi intrépide que les nuages. Il l’aime bien cette Rose ; elle a une saveur à la fois délicate et sauvage qui titille son intérêt. Et ça fait longtemps qu’il n’a pas regardé une fille. En aimer une ? C’est encore s’avancer trop loin. La belle avait poliment refusé son invitation à Woodstick et tant pis pour lui, c’était de bonne guerre. Il trouvera bien quelqu’un d’autre pour y aller (la tradition denki n’allait pas le laisser déambuler les terres sacrées du festival seul) En attendant, il se reposera de son insomnie sans fin sous le manteau de la nuit, attendant que sa silhouette le réveille d’un rêve qui ne s’enclenchera point.

Là-haut, tout là-haut, au cœur de la maison du renard et de ses cachettes fourbes, il patiente. L’été offre un calme palpable au QG toujours si animé. L’arène paratonnerre est morne et les soirées aux étages plus bas sont discrètes, intimes. Tout le monde rentre chez soi pour l’été. Lui ? La chaleur de sa maison est morte avec les femmes qui y gisaient. Ce n’est qu’un vagabond sans lumière. Nul n’a besoin d’un toit sur la tête pour observer un ciel clair. Ce n’est que lorsqu’il est avec l’autre qu’il est le plus seul. Lorsqu’il rit qu’il veut disparaître. Pourtant, pourtant, avec elle, son petit cœur bat ardemment. Et il est certain que Gemma s’en moquerait tant. Etrange cette famille Tolkien, ça le rend à quasi nostalgique de ces moments où il en avait encore une. Il secoue ses pensées avec vigueur car la fleur fait son entrée et un sourire taquin pointe son nez. “I thought for a moment you got lost or maybe the portal struck you.” C’est si déconcertant de maintenir une distance avec elle alors qu’il avait sa langue dans sa bouche quelques jours auparavant. Au final, les rumeurs ont tort : JP n’est qu’un prude des sentiments.

c’est la denkey laissée dans son casier par le préfet des kitsune qui lui permet de s’engouffrer dans leur qg en cette soirée où elle n’a pas à croiser une foule d’étudiants à chaque mètre qu’elle fait - les vacances lui permettent de souffler et de ne pas entendre tout ce que les autres auront à dire sur les récits de la pool party d’il y a quelques jours alors elle en profite, rose, elle profite de la discrétion que lui offre l’été pour se faufiler dans les escaliers et en atteindre le sommet sans avoir à déclencher une émeute sous son insolence et son chill inexistant. parce que si elle se fout éperdument de ce que les autres peuvent bien raconter, rose n’a jamais su tenir sa langue face à ceux qui ne savent pas s’occuper de leurs propres pompes.

alors, quelque part, au creux de son estomac, l’appréhension la gagne sans réellement savoir pourquoi. la raison est pourtant simple, si elle n’a fait que jouer un jeu en tournant autour de jp jusqu’à partager leur premier baiser il y a plusieurs semaines de ça, tout leur appartenait, tout n’était qu’un instant perdu entre le rêve et la réalité sans que personne ne puisse y fourrer son nez. les moments partagés et le souvenir des lèvres de jp étaient les siens et dès lors que ce dernier a décidé de le montrer au monde entier, la gamine a totalement paniqué, imaginant déjà les pires scénarios entre ses frères ((et surtout keita)) qui l’assommeraient de remontrances mal placées. petite dernière si protégée qu’elle aimerait tout garder, absolument tout, pour elle.

malgré ça, la gamine intrépide souffle fort sur le palier, comme pour chasser le stress qui pèse sur sa poitrine en se maudissant de trembler - ce n’est pas la première fois qu’elle se retrouve seule avec jp alors elle ne saisit pas bien ce qu’il y a de différent ce soir. le pouls qui cogne contre ses os est presque douloureux et ça ne lui était jamais arrivé de presque redouter de croiser son regard alors à l’instant T, elle ne sait plus vraiment si c’est une bonne idée.

pourtant, elle finit par pousser la porte qui la sépare du toit pour y apercevoir la silhouette du denki qui l’attend et il suffit de quelques mots énoncés par sa voix pour que ses muscles se détendent et que, déjà, son sourire se fende sur ses lèvres légèrement rougies. “someone told me that a girl should know how to be waited.” la porte fermée derrière elle, elle s'avance alors vers lui avant de s’asseoir à ses côtés. “actually i went to the store to buy some happoshu before coming.” pack de bières qu’elle expose devant ses yeux et qu’elle dépose sur le sol. si ses frères et sœurs la sermonneraient pour cet achat, rose n’aura qu’à passer sous silence sa dépense pour éviter toute leçon de morale - elle évitera même de mentionner cette soirée pour se dispenser d’une crise familiale. les mensonges lui sont familiers et même si natsu a refusé de lui servir d’excuse, rose ne s’avoue pas vaincue. “hope that will be enough for you to not blame me for my delay.” ses mots sont accompagnés d’un bruit de déchirement ; le carton s’ouvre alors entre ses doigts afin d’atteindre une des bouteilles en verre pour la lui tendre et dès lors que son regard attrape celui de jp, elle a déjà oublié toutes ses inquiétudes inutiles.

L’été est salvateur sur sa joue. Tout le berce dans un monde irréel ; de la simple brise qui traverse ses cheveux à la lumière qui allume son regard lorsqu’il l’aperçoit. Sa voix le sort de cette attente intenable. Il a compté les jours, les heures, les minutes, a viré les squatteurs de la nuit étoilée pour l’accueillir, a échappé à des plans passionnants pour une soirée morne à ses côtés. Tout ça seulement, quelques jours après leur spectacle dans l’eau et les rumeurs qui foudroyaient les couloirs : Rose et JP, JP et Rose placardés sur les murs tels des décrets du Ministère. Victime de sa popularité, de son statut vicieux et de ses responsabilités. La vérité c’est qu’il n’y avait rien pour l’instant. Un troc de salive habituel sans préavis romantique. L’histoire débute de la plus ennuyeuse des façons : une conversation, des mots — ainsi commencent toutes les histoires. Car ce n’est que le début.

Le préfet, d’usuel si sobre et stoïque, esquisse un sourire à la réponse de la kasaï. Cette répartie du tonnerre pourrait secouer l’organe de sa cage. Et lui, il est muet. Ne trouve rien à redire à un échange déjà parfait. Il n’a jamais été vraiment bavard, le Jojo. Très tôt il a appris que les actions dépassaient les mots. Alors, lorsqu’elle se pose là où il pourrait la toucher aisément, il s’en veut de mal interpréter le geste. Il détourne le regard sur les bières, reconnaissant de ne pas être seul dans cette aventure. Le petit pack de six lui tiendra compagnie à chaque silence dans l’assemblée de deux. “Oh nice.” est tout ce qu’il trouve à dire. Réaction fade qui n’exprime même pas le quart de sa joie intérieure. Il attrape la boisson tendue sans frôler ses doigts en la remerciant et, inconsciemment, un petit quelque-chose revient sur ses lèvres. “I don’t know if I can ever forgive you. What do you suggest to ease my fury, eh?” L’ironie s’entend facilement (comme la pointe de flirt dont il n’arrive pas à se débarrasser) et est accompagné du liquide qui glisse lentement sous sa gorge. A ça, il ajoute un autre regard insistant. Observateur d’abord de l’ambiance et des humeurs, il laisse les non-dits remplir son verre. Ce quelque-chose toujours dans un coin bien gardé. Et il zieute l’horizon pour s’empêcher de remplir ses pensées de contenu indécent. L’intensité d’un seul contact lui a suffi pour la soirée. “So, how do you like our ship name? I think I heard some first-year something call us Rosao – ugly as fuck, I know, but that can’t outrank what Keita called me though.” Il s’aventure sur le terrain dangereux du small talk avec une touche d’autodérision pour effacer les problèmes qu’ils se sont créés à cette même soirée. Espère que délier les langues l’empêchera de replonger la sienne une troisième fois car il a promis de ne pas jouer au fuckboy avec elle. Pourtant, il présume tout de même que les boutades ne seront pas les seuls choses échangés ce soir. C’était le deal qu’ils ont passé par texto. JP pourrait créer des scénarios complexes, il pourrait préparer des manœuvres de joueur d’échecs et brosser le sombral dans le sens du poil mais il a envie d’organique. Il veut poser son cerveau et laisser ce rêve l’emporter, suivre les aléas du vent et regretter le lendemain avec nostalgie.

son rire transperce déjà son souffle à peine assise à ses côtés, comme s’il suffisait d’entendre sa voix pour calmer instantanément les battements névrosés de son coeur et les accélérer à nouveau pour d’autres raisons - elle aurait même pu rougir à sa question mais se trouve sûrement trop à l’aise désormais pour qu’elle dévie son regard. “sorry i’ve run out of efforts when i bought this pack of beers with my two gallions left.” elle répond à l’ironie par de l’ironie et un sourire qui, lui, répond au flirt qu’elle n’a pas laissé passer d’entre ses lèvres. si la subtilité n’est pas vraiment le fort de la tolkien, elle sait pourtant parfois s’en armer pour éviter que la gêne ne l’envahisse ; stratagème au point pour garder le contrôle en toute situation.

alors elle finit par noyer ses mots dans le goulot de la bouteille en verre apportée contre ses lèvres et laisse le liquide âcre qui n’a plus aucune saveur refroidir son palais. la frustration n’existe pratiquement plus, rose s’est faite à l’idée qu’elle ne pourrait plus rien goûter à part l’hémoglobine et c’est peut-être seulement parce qu’il n’y a que le goût du fer qui l’importe à présent qu’elle n’espère plus un jour découvrir l’infinie de saveurs qui existe. son seul regret, peut-être, est de ne pas connaître celle de ses lèvres.

et, soudain, les mots de jp la rattrapent et lui permettent de regarder enfin ailleurs, ailleurs que sur la bouche humidifiée par la bière, et, à nouveau, c’est son sourire qui lui répond en premier. “rosao is kinda better than some janse or something mixed with jean-paul.” puis c’est son rire qui éclate sous la taquinerie de la kasaï. “but how did my brother call you? can’t be uglier than jean-paul anyway.” l’excès ne veut pas s’arrêter, tout comme son sourire espiègle qui semble figé sur ses lèvres de gamine insupportable. pourtant, l’instant la rattrape violemment et son éternelle assurance lui échappe, la crainte de faire sortir jp de cette bulle calcine brutalement chaque pore puis chaque veine, une part une - sans crier gare, elle prend peur sans raison particulière ((ne veut en fait pas risquer que le préfet se braque et finisse par la laisser à son tour, en écho aux noms de tommy ou de ren)) et se rattrape au seul rebord qu’elle trouve. “just kidding.” qu’elle précise alors. “rosao ain’t that bad after all, what’s your favorite tho?” et cette fois, c’est dans ses yeux qu’elle plonge les siens, juste par besoin de ressentir ce que seul le denki arrive à lui transmettre.

gamine n’est plus sous les étoiles où jp se trouve, gamine s’envole et éclot la chrysalide qui lui sert de bouclier. rose devient la jeune femme qu’elle pourrait être à ses côtés, celle qui n’a plus besoin de ses frères pour la protéger, celle qui peut faire ses choix seule, même s’ils sont mauvais. c’est comme si tout près de lui, elle était capable d’être n’importe qui et que si elle devait tomber, la chute ne semblerait pas si douloureuse. alors elle choisit de ne plus être une enfant, titre qu’on s’obstine à lui coller sur le front quand jp arrive à voir la femme qui danse dans ses yeux et ne demande qu'à sortir.

Observant contre son gré, il remarque l’obstination de ses prunelles sur ses lèvres. Comme si elle essayait d’y déchiffrer un secret. Pas besoin de fixer, a-t-il failli rétorquer. Le Jojo est un livre ouvert pour ceux qui posaient les bonnes questions. Pourtant, au lieu d’user sa voix, elle préféra se noyer dans le goulot. Choix qu’il respecte et suit avec amusement. Il aurait pu, de toute évidence, l’attaquer avec les pick-up lines habituels : like what you see? mais ça manquait gravement de punch à son goût. Ce genre de drague était aussi usante que les tocards qui l’utilisaient. Il gardait ce fanservice pour les premières jpettes gloussant dans ses oreilles. Rien ne vaut l’humour pour solidifier (une relation) ce quelque chose naissant. “Every time you make fun of my name there’s a cute little bird dying somewhere.” Il détourne aisément l’attention d’un sourire, d’une moquerie. Son aptitude de flirteur ressort trop facilement lorsqu’il est acculé avec de tels sentiments.
Et vint le sujet du jumeau-boudeur. “Can’t remember what he said exactly.” Il ment. Avec facilité. Toutes les lettres sont engravées dans sa mémoire. Elle doit être la première à connaître l’extravagance de Keita et pourtant, il ne peut se résoudre à rajouter une couche sur les défauts de son frère. La vérité est qu’il l’a appelé de tous les noms, des plus beaux et des moins beaux parmi l’univers des adjectifs. Ceux qui définissent un homme troublé par ses conquêtes sont ressortis suffisamment de fois pour qu’il épargne Rose de leurs sons. Jean-Paul n’est pas un fuckboy. C’est une idée fausse qui est venue avec sa réputation. Un mec pareil doit forcément se taper toutes les filles, pas vrai ? La vérité est si lointaine des rumeurs. Et maintenant, il a traîné la belle fleur dans ce bas-fond où tous les mensonges ont son nom.

“I’m not really into the whole shipping thing, to be honest.” Petit retour sur Terre obligé. C’est maladroit bien qu’honnête pour se racheter de sa duplicité. Personne n’est surpris de découvrir que JP n’est pas un romantique. Il n’écrit pas le nom de ses crush sur son cahier avec des cœurs dans les yeux. Il ne rêve pas de sa conquête avant de s’endormir. Il a très peu d’estime pour l’espèce humain de manière générale. Se convainc qu’une bonne vie se vit seule (tsundere tsundere tsundere car lorsqu’une âme entre en lui, elle la colle jusqu’à l’oubli) Et il suffit de son regard pour s’apercevoir que ce ne sont pas les bons mots à jeter au large. Il se ravise : “Yeah, I guess Rosao is cute.” Ça passe avec un soupir (ça casse) et soudainement, il se sent pas à sa place. Il comprend pas ce qu’il est en train de foutre là. Qu’espère-t-il de tout ça ? Rien. Il n’imagine pas le reste de sa vie dans les bras de Rose à rire de leur ship name, il n’a cette image avec personne. Il se voit même pas atteindre la trentaine car ce sentiment tragique d’une mort précoce le poursuit. Comme les femmes de sa vie. L’abandon, le rejet, la solitude – c’est tout ce qui l’attend. A quoi bon perdre son temps en niaiserie pareille. Un jour il quittera Mahou et il l’oubliera. Il oubliera toutes ces amitiés qu’il a formé dans le dortoir de la foudre et les soirées grotesques qui l’ont fait rire aux éclats. Il oubliera ces souvenirs rocheux et ces disputes sans sens, les gamins qui lui ont souri et le cœur qui a chaviré. Il en oubliera son nom, son visage et ses lèvres au goût particulier. Celles qu’il se maudit de vouloir regoûter.

le lendemain semble si lointain, presque inatteignable - la gamine ne sait pas faire autrement que de vivre intensément l’instant présent sans penser à après. en réalité, là tout de suite, elle s’en fout d’après. elle s’en fout de savoir s’il y aura une nouvelle fois, si jp lui enverra un sms ou l’invitera ailleurs, un autre jour. elle s’en fout de savoir si ça s’arrêtera ce soir et si demain, tout redeviendra comme avant ; s'il ne restera plus que jp et rose qui se lancent des regards et des piques sans même que leurs lèvres ne veuillent se toucher comme maintenant. elle s’en fout de tout ça même si, quelque part, au fond, l’espoir fait vibrer ses gestes. même si elle aimerait que demain n’existe pas pour ne pas avoir à en découvrir les réponses. alors rose espère seulement profiter de cette soirée, encore plus si ça doit être la dernière. “soz for the cute little birds, i really do like making fun of you.” son sourire colle à ses lèvres à chaque fois que le préfet prend la parole - non, elle ne veut pas que ça s’arrête.

s’il dit ne pas se souvenir des mots de keita pour éviter le sujet, la kasaï lui accorde son silence car parler de son frère ne semble pas être la meilleure idée. turnoff en vue, c’est finalement jp qui semble mettre des distances et rose ne sait même pas comment le rattraper. “actually i don’t really give a damn about shipping names and all either.” tentative hasardeuse lancée pour laisser place au mutisme, c’est peut-être la première fois qu’elle ne sait pas quoi dire de plus face à jp. parce qu’elle dit vrai : elle se fiche pas mal des niaiseries, la tolkien, apporte peu d’importance aux noms doux et c’est d’ailleurs lui qui a commencé à en parler alors rose se sent impuissante maintenant qu’il fait demi-tour. “and i don’t really give a damn about what people think, would be kinda hard to live with the family i have.” les sous-entendus sont nombreux alors elle laisse jp entendre ce qu’il veut. en attendant, ses yeux se lèvent pour mieux observer le ciel et ne peut s’empêcher de penser que ruem doit adorer passer du temps sur ce toit où les étoiles sont si étonnamment visibles.

les mains posées au sol comme appui, elle finit la tête dans les épaules pour mieux admirer l’étendue de poussière qui illumine la nuit - elle n’a pas besoin que jp la suive ou lui parle, apprécie sa simple présence sans que le silence ne lui semble étrange. pourtant, elle va le briser, gamine qui finit toujours par avoir quelque chose à dire. “summer nights are really nice.” il fait encore si chaud mais la chaleur insoutenable des journées d'août redescend pour laisser place à une brise agréable. et, soudain, le sourire de rose fend ses lèvres sans raison distincte - une simple idée qui la fait quitter sa galaxie pour se redresser et s’installer en tailleur face au denki. “ok you wanna play a game?” comme une enfant prête à lui taper dans les mains en chantant, y a cette lueur amusée qui éveille ses pupilles. “we could… ask questions to each other about like… whatever. no limits, no rules. only questions and answers.” pas de place au malaise, la gamine reprend ses habitudes et taquine à la porte de jp. “you in?” le ton employé n’est pas rare, eux qui ne savent que jouer entre eux - elle ne peut permettre au sérieux de ruiner ce moment et se fiche presque de la réponse du préfet qu'elle énonce déjà : “i start : what’s your favorite season?”

Embarqué dans un gouffre de l’overthinking, l’insomniaque ne réalise pas qu’il a entrainé l’ambiance de leur rencontre avec lui. Jojo était un mec charmant d’habitude, quelqu’un qui sait ce qu’il veut et où il va. Il a un plan pour chaque situation et un planning serré pour les dix prochaines vies. A l’opposé du mec spontanée, tout ce qu’il fait vient avec une idée précise en tête. Et là, il lui avait donné rdv sur le toit du QG pour se regarder dans les yeux peut-être ? Pour jouer au scrabble ? C’est d’abord un mec. Un idiot qui apprécie la compagnie de l’idiote. Un indécis qui a ruiné l’humeur de la gamine à ses côtés. Sans doute. Il ignore par quel chemin passer pour ne pas se sentir comme un porc (et ça pourrait être si facile s’il ne jouait pas à la prude, si son petit cœur ne vibrait pas sous son toucher et si elle ne faisait pas tout pour adoucir la situation alors qu’ils savent qu’il a merdé) Alors il se contente d’écouter distraitement (faux ; il en savoure chaque note) et il devient grincheux — snif snif, comme c’est dur d’avoir une famille qui prend soin de toi. Can’t fuckin’ relate.

Il s’éveille d’une oreille intéressée. Le goût de la conversation retrouvé, l’appréhension des questions auxquelles il devra répondre est logé dans un coin de son ventre. “Alright, I’ll play.” Un début de sourire s’avance pour s’effacer aussitôt sans laisser de trace ; à peine perceptible. Les yeux suivent les traits de son visage jusqu’à trouver son ton taquin braqué sur lui. Ça suffit à le sortir de sa léthargie pensive. “Don’t be shy, Tolkien, I’ll know if you lie.” Première question braquée et il retient un rire. Juste ça ? Elle n’est pas curieuse sur autre chose ? Il est pourtant un nid à mystère et ce soir, il lui offre le privilège d’entrer dans son énigme. Quelle chance gâchée. Alors JP prétend cogiter, repasse les quatre saisons en vue et en oublie une dans son analyse. Il doit être le seul être humain à réfléchir autant sur une demande aussi simple. “Winter.” sa réponse, conclut-il. Il est amoureux de l’air qui rend son nez rouge, du vent qui souffle sous ses cheveux et de l’odeur de fêtes qui se pavanent dans les nuages. C’est aussi la solitude. Le silence. La nostalgie et le rappel (( souviens toi du 2 décembre 2013 )) Les moments assis face à soi-même à contempler les paysages habillés de blanc, les familles dans les rues, les guirlandes qui illuminent. Et ce sont eux qu’il voit : ces idiots qui lui tiennent la manche, s’accrochent à lui sans qu’il parvienne à s’en débarrasser (( f·r·i·e·n·d·s )) Qu’ils sont stupides ses amis... comme il les aime au fond, sans jamais leur dire. La légende dicte que Joao ne doit jamais aimer personne et qu'il continuera à jouer le jeu, en vain, jusqu’à sa mort. “Wow, that was easy, I’m actually a bit disappointed. My turn: your favorite sibling?” et son sourire s’étend, canines montrées à la hauteur de son sadisme. Compétiteur sans limite, il a envie de la voir acculée pour qu’il puisse s’octroyer cette victoire et accorder une punition. “I think the loser should have a dare.” On ne change pas les mauvaises habitudes. C’est au tour de ses yeux morts de s’allumer puisqu’il côtoie quelques idées mal placées dans sa tête depuis le début de la soirée.

la lueur dans les yeux de jp la console et la gamine oublie aussi vite que tout est prêt à basculer d’un instant à un autre - et c’est peut-être ça, la grande différence, rose la spontanée face à celui qui ne sait lâcher prise. l’opportunité attrapée à la volée pour tourner la page sur le sujet sinueux qu’est leur potentielle relation, c’est d’une main qu’elle balaye le malaise pour se concentrer pleinement sur la présence du préfet.

l'espiéglerie se mélange à la curiosité piégées au fond de ses prunelles, rose l’observe réfléchir à sa question pourtant si simple et a le sourire amusé qui s’anime. “have you really thought about it?” le rire moqueur, elle aurait pu parier sur la réponse avec aisance, l’hiver n’étant pas un choix surprenant, la gamine ne prend pas la peine de se demander pourquoi. “disappointed? i’ve been here for ten minutes and you already want to tell me your darkest secrets, huh?” parce qu’elle ne veut pas le faire fuir de son indiscrétion, rose, pas juste après qu’il ait failli lui glisser d’entre les mains.

le nez se fronce alors à la question tombée et rose feint de se sentir piéger alors qu’elle devrait choisir un seul membre de sa famille. “is it supposed to be a hard one? everyone knows that koko is the fav sibling of the fam and go for the dare.” les lippes pincées entre elles, la tolkien a les yeux qui annoncent sa victoire en un oops innocent avant que l’air de défi ne remplace son engouement. “okay so imma try a harder one this time mhh…” il suffit de quelques secondes avant qu’elle ne reprenne la parole, quelques secondes pour se faufiler dans les profondeurs de jp. “when did you cry last time and what was the reason?” c’est presque du sérieux qui se lit sur ses traits, la gamine qui est là pour jouer veut lui faire regretter la facilité de sa première question. “i see you coming, i said no rules so i can ask two questions in one.” le menton relevé, c’est comme si elle avait déjà tout prévu, imitant l’élément du denki en s’armant de la malice du kitsune.

Bien sûr qu’il a pensé à ça. Il a cogité et retourné chaque virgule, chaque souffle, de sa vie jusqu’à s’accorder sur une réponse. L’hiver, saison trop évidente qui abrite son cœur. Il pourrait en chanter les louanges tout l’été, se reposer en automne et s’assurer de son retour avec légèreté. Il n’y avait rien d’unique dans tout ça. “Yes.” répond-il simplement, pépites brillantes sous les yeux. Que de mystère qui s’élève dans l’air. JP ne manque pas de poser son regard sur elle, de la scruter avec attention, intensité, de chercher une rougeur sur ses joues et de s’y plaire dessus. “Sharing secrets is hotter than small talk.” Il murmure alors que le jeu vient lui couper le souffle. A son tour de poser une question indiscrète. Sa réponse l’étonne ; il ne s’est jamais suffisamment intéressé aux Tolkien pour savoir que l’aînée était appréciée de tous. Il comprenait les dynamiques et savait comment chanceler autour mais sa curiosité s’arrêtait là. “I see, no dare for you yet.” Il prend du recul, frustré que sa question tombe sans poids sur les épaules de la kasai. Il aurait dû lui demander qui avait volé son premier baiser mais la réponse l’aurait sans doute frustré.

Rose ne perd pas de temps. Chaque pause marquée est attaquée aussitôt. La prochaine question est supposée être dure. Il doit se mordre la langue pour ne pas ricaner. Aucune question ne peut vraiment le déstabiliser. Parler de sa sœur morte ? Hm, c’était y’a longtemps. Son premier amour ? Don’t care. Son travail ou ses notes ? Qui ça intéresse. Aucun sujet n’est tabou et pourtant, peu de gens ose le regarder droit dans les yeux quand ils bafouillent sur leurs questions. Et rien, rien au monde, ne l’a préparé pour ce qu’elle a prononcé ; when did you cry last time and what was the reason?

Il ouvre la bouche, prêt à rétorquer. Infirmer. Contester. S’il est toujours bon en maths, ça fait deux, non ? La première il peut répondre, la seconde est plus difficile à exprimer. Elle lui coupe l’herbe sous le pied et saisit sa voix : il n’a pas le choix. Elle a joué sur les mots et il a acquiescé dans son silence. Il obtempère contre son gré, laissant un mutisme remplir les étoiles avant de délier sa langue. Elles sont belles, ces planètes qui meurent à des kilomètres d’eux. Il pourrait les fixer jusqu’à s’en assécher les rétines et jamais se lasser. Puis, enfin. L’homme parle. “I guess it’s been a while now.” Il pourrait mentir (il le fait très bien) ou donner une réponse sarcastique (il le fait encore mieux) mais imbécile qu’il est, il choisit la vérité. Ce sont les règles du jeu qu’il a accepté de signer. Les termers et conditions générales d’utilisation de cette soirée. “I don’t remember all of it but it was ‘round the night my grandma went into a coma and I begged her to die.” On ne peut faire plus joyeux comme réponse. “And you?” renchérit-il avec le même sérieux, agacé d’avoir dû repenser à ce moment angoissant de sa vie. Honteux aussi, de devoir avouer que son existence est tout aussi pathétique. So, are you having fun? ses yeux semblent demander.

persuadée que les mots seraient difficiles à sortir d’entre ses lèvres, rose s’attend au silence voire à l’abandon lorsqu’elle l'observe perdre sa réflexion dans les astres qui, finalement, semblent lui répondre. étonnement gardé pour elle seule, elle écoute l’aveu se rouler avec facilité sur sa langue mais la kasai ne fait pas tant attention aux conséquences de cette confession, se demande seulement pourquoi, pour quelles raisons et tout ce qui a pu engendrer la violence des mots du garçon qui lui semble peut-être un peu plus comme elle désormais ; elle et sa famille détraquée aux mille secrets, cette famille dont la violence et la rancoeur s’infiltrent aussi régulièrement dans leurs veines que l’oxygène dans leurs poumons. et si la curiosité fracasse sa poitrine, la gamine reste silencieuse dans l’étreinte de sa confiance accordée.

seulement, le revers tombe entre ses mains et rose plaisante une seconde. “actually, i can be a crybaby sometimes.” elle ne s’attend pas à voir de la surprise dans les yeux de jp, se demande même ce qu’il pense réellement d’elle, là, au fond de lui. gamine perdue entre la certitude qu’elle peut tout avoir et la peur de ne jamais en être vraiment capable. cette confiance en demi-teinte qui se peint sur ses traits obscurcis par la nuit lui donne le courage autant qu’elle la paralyse.

et puis, elle se met à réfléchir sérieusement à la dernière fois que les larmes ont noyé ses pupilles mais se heurte brusquement aux souvenirs trop récents d’une soirée partagée avec… tommy. retrouvailles qui ont failli virer au cauchemar, la salive est presque douloureuse lorsqu’elle veut passer sa trachée sous les images qui tournent en boucle sans s’arrêter - comment lui dire, comment tout lui avouer? il n’y a pas que la mention de son ex-petit-ami qui fait soudainement accélérer les battements de son cœur mais surtout celle qui viendrait après. monstre dormant au fond de sa cage thoracique, il n’a encore fait fuir personne de son entourage mais le denki pourrait bien être le premier car qu’est-ce qui le retiendrait vraiment? pourquoi resterait-il à la regarder en sachant tout ce qu’elle est ((tout ce qu’elle est devenue))?

les orbes se dérobent alors, cherchent un rebord auquel s’accrocher, une bouée pour ne pas se noyer. elle a tant de possibilités entre les doigts, pourrait lui décrire les plus beaux mensonges pour ne pas avoir à lui parler de cette soirée qui remonte à quatre petits jours. elle pourrait même prendre la fois d’avant, comme si le weekend d'avant n’avait jamais existé. elle pourrait, oui, mais la règle est scellée à même sa conscience ; comment pourrait-elle lui mentir à ce sujet? “okay…” qu’elle énonce enfin en relevant les paupières pour le regarder. “you win.” aucune autre explication offerte, c’est une défaite amère à laquelle elle n’avait pas pensé car il y a des mots qu’elle n’arrive tout juste pas ((encore)) à prononcer. le jeu qu’elle a elle-même lancé lui semble, tout à coup, si dangereux qu’elle préfère choisir le gage plutôt que de tout gâcher.

Handicapé des sentiments, Joao parvient à fourrer son malaise d’où il l’a sorti. En un instant, tout redevient comme s’il n’avait jamais rien dit et qu’il parlait de ces choses insignifiantes qui font sa vie. Le travail, les matchs, les fêtes, Mastriani qui emmerde son cul et le reste du tableau laissé sans nom. “You do look like a crybaby.” répond-il avec légèreté. Il hausse les épaules et détourne son regard d’elle. Soudainement, elle n’a plus l’air d’être une énigme qu’il souhaite déchiffrer. Elle est devenue incroyablement banale et humaine. Mortellement ennuyeuse au denki qui espérait une réponse plus intrépide. Le silence prend place à nouveau et il s’en tape complètement. Sa cannette d’happoshu en main, il se délecte gorgée par gorgée en attendant qu’elle use sa voix. Il ne laisse même pas un soupir frôler l’air ni un œil las se poser sur sa peau. JP demeure désintéressé dans la nuit. Puis, il se ravit d’entendre ses mots favoris : you win. Comme quoi, n’importe quelle sappy story fait fondre les défenses des jeunes filles frêles en affection. Son sourire s’étend, celui du chasseur convaincu d’avoir piégé sa proie. Il efface la nostalgie et les remords par la victoire qui abrite ses lèvres. “Oh, I won?” vante-il. Il fait mine de chercher mais il sait très bien ce qu’il veut : la frustrer, elle, fillette bercée à la romance. Sa réputation de player sur la table, il ne serait pas lui-même s’il ne jouait pas un peu avec ses attentes. “And what did I win exactly?” Enfin, sa vue retrouve l’objet de son désir. Une odeur de danger mélangé à l’alcool et aux secrets s’instille sous sa gorge tombée rauque. Le prédateur rampe sur l’espace entre eux pour flairer sa rougeur. Ça serait si délicieux d’apprécier ses joues roses et embarrassées. Il imprimerait cette image dans son esprit pour la déstabiliser à jamais. “C’mon, you can tell me, Savage. I won’t make fun of you. Promise.” Sa voix semble chantonner derrière l’oreille de la rose, son nez frôle le début du cou avant de se rétracter. Grand sourire, bien évidemment. Et il attend sa récompense, se retenant de rétorquer à quel point c’était presque trop facile.