take yourself home (pandore)

Il est de ces soirs où tout semble demeurer en suspension ; où les lumières se confondent sur les visages pour en éclairer les irrégularités, où les sons s’échappent dans l’immensité pour offrir au silence son heure de gloire.

C’est au dortoir de Pandore qu’il s’est vu s’échouer, Naoyu, alors que le soleil se couche et que la ville perd de sa clarté - comme une évidence. Il en a presque pris l’habitude, depuis qu’ils se connaissent ; quand il lui faut faire le vide et elle parler du trop plein, quand leur monde parait s’écrouler mais qu’ils n’y cherchent pas nécessairement de solution.

Les pinceaux trempés de couleurs sont maladroitement maintenus en équilibre, agencés sur un plateau de bois au milieu des draps, recouvert de peinture séchée ; Nao ne l’a probablement jamais vraiment nettoyé, préfère en conserver chaque trace comme un souvenir des œuvres auxquelles il a contribué. Les peaux se parent de multicolore ; tête coincée dans le creux de ses bras et peinant à garder les yeux ouverts, il ne peut que deviner les fils humides glisser le long de son dos à la façon d’une caresse réconfortante. La chose le berce, l’apaise, cloisonne ses maigres maux plus que n’importe quelle autre solution, même si l'immobilité le tracasse vite, généralement.

“Hey don’t fall asleep.” la voix taquine, surprend la conscience qui s’évanouissait ; il sent son cœur se gonfler un peu. “Never! What are you painting ?” Ses yeux s'élargissent, comme pour s'ancrer de nouveau à la réalité, à retrouver le monde qui l'entoure. “And don't think i forgot that you got things to tell me about that Ash honey...”

Elle déplace l’esprit embrouillé sur la toile improvisée, les doigts qui remplacent parfois les pinceaux, abandonnent une seconde la peinture pour caresser sa peau, quand les pensées s’imposent trop, forcent des visages qu’elle préfère éviter. Retourne au dessin, les gouttes d’eau trouble en pleine course ajoutant des nuances involontaires, qu’elle intègre à la peinture en l’adaptant, changeant les formes, un tissu mouillé pour gomme approximative. Parfois ils parlent, de tout ou bien de rien, selon s’ils veulent se changer les idées ou non. Parfois le silence remplit l’espace mais ce n’est jamais désagréable, seulement apaisant, une manière de profiter du moment sans avoir à penser au reste. D’être là sans avoir besoin de l’exprimer.
Concentrée sur la peinture, Pandore ajoute des détails, une main quittant parfois le dos pour se glisser dans les mèches de Naoyu, un sourire au bord des lèvres. “Hey don’t fall asleep.” Il se tortille un instant pour (se réveiller) la contredire, lui prouver qu’il n’était pas en train de s’endormir, les yeux pourtant presque fermés sous l’apaisement des gestes de la denki. “Never! What are you painting?” Elle rit doucement, suit les lignes de son dessin tout en lui expliquant. “There’s a surfer on his board, surfing a huge wave, and birds, and people watching him from the beach.” Elle reprend un peu de bleu, le mélange à du blanc, le fait devenir de l’écume au sein du dessin. “And don't think i forgot that you got things to tell me about that Ash honey…” Les yeux roulés par dépit, elle soupire, hausse les épaules pour forcer l’indifférence, parce que c’est sans doute tout ce qu’il mérite. “Ugh, he’s just an asshole, I don’t even know what there is to say, I shouldn’t have tried anything with him. We were together for like, one month, and he stood me up because he was drunk, high, and kissing I don’t how many else.” Elle penche la tête, la pose sur celle de Nao, ses boucles tombant sur ses yeux, grommelant son désespoir. “Ughhhh love’s so complicated. Please tell me your love life is more at peace than mine.”

l'image proposée par pandore a tout d'un rêve éveillé, alors que ses doigts fins viennent se lover entre ses mèches emmêlées pour rattraper sa conscience. la scène décrite tourne un instant dans sa tête comme une pellicule aux contours cramés, et les caresses du pinceau comblent petit à petit ce qu'il ne peut se contenter d'imaginer. il voudrait lui poser des questions, obtenir plus de détails, mais se retient pour ne pas gâcher de la magie temporaire qu'est leur activité occasionnelle. "is it your way to tell me you wanna go to the beach?" depuis quelques nuits déjà, les courants d'air deviennent doucement chauds, à kanto ; annoncent un printemps qui s'approche et des fleurs qui vont éclore dans un futur proche. si elle lui proposait, il dirait sans aucun doute oui. "i shouldn’t have tried anything with him. we were together for like, one month, and he stood me up because he was drunk, high, and kissing I don’t how many else. - i'm pretty sure that's not the only reason, sweetie. but he does look like a dick." la voix est douce, tente de panser les plaies autant qu'elle le peut. l'envie soudaine de saisir sa main, d'offrir du réconfort autrement qu'à l'aide de mots qui grattent la surface, mais il se ravise ; de peur de gâcher la peinture encore trop volatile sur son dos. pandore ne semble pas s'en soucier autant quand, d'elle-même, elle initie le contact ; au poids ressenti contre sa tête, nao passe sa main tatouée dans ses cheveux aux effluves fruitées, souffle à l'unisson en compatissant à son état. "ughhhh love’s so complicated," de ses lèvres s'échappe un ricanement amusé, à peine audible, puis il enchaîne. "please tell me your love life is more at peace than mine. - il fait mine de réfléchir, avec sa malice habituelle, i'm not dating anyone anytime soon so, yes. absolutely. but come on, that's not true, you seemed happy at first ; with him, i mean. did you two talk about it? or it's a definitive no for you now?" de mémoire, il ne souvient pas d'avoir vu son sourire aussi présent, son cœur aussi gonflé, jusqu'à ce que ash choisisse de le piétiner. "you can still do the same as me for a bit, though. no feelings, just one night stands or friends with benefits, the rest's too complicated, it's time to enjoy your life without getting constantly burned for it. and you already have a lot to deal with, Pando." avoue-t-il, dans l'espoir d'alléger un peu son esprit. elle mérite son coin de bonheur, elle aussi. "are you finished up there? stand up it's my turn."

“Is it your way to tell me you wanna go to the beach?” Elle n’y avait pas vraiment réfléchi mais c’est vrai que le soleil revenu peu à peu appelle aux sorties sur la plage, même si l’eau est peut-être encore trop fraîche pour se baigner (même si un petit pari pourrait régler le problème). “Now that you say it, maybe it is, you know how much I love it.” Elle pourrait rester des heures allongée à bronzer, se laisse parfois même convaincre de faire des châteaux de sable mais finit souvent par abandonner. Il y a un sentiment différent, à la plage, une forme de liberté qu’elle n’a plus le droit de ressentir, qu’elle devine en admirant l’horizon mais qu’elle ne peut plus toucher, seulement tendre le bras pour l’effleurer du bout des doigts.
La peinture n’est pas tout à fait finie, mais Pandore s’est arrêtée, les pinceaux encore dans les mains mais la tête sur celle de Nao, à faire un peu attention de ne pas abîmer le dessin, quoique qu’un mauvais trait d’un geste un peu brouillé pourrait faire une vague crédible. “I'm pretty sure that's not the only reason, sweetie. But he does look like a dick.” Et elle est d’accord, répond un “ugh” approbateur. Ash a tout du fuckboy, elle le savait dès le départ, se trouve bête de lui avoir donné une chance. Elle n’aurait peut-être pas dû écouter son cœur, ça aurait été plus simple de ne rien tenter et de garder le statut quo de leur relation un peu étrange, entre substances et coïncidences d’un passé qu’elle ignore encore. “i'm not dating anyone anytime soon so, yes. absolutely - elle pouffe de rire, lâche un lucky you” un peu râleur. “but come on, that's not true, you seemed happy at first ; with him, i mean. did you two talk about it? or it's a definitive no for you now?” Elle revoit leur dispute, le lendemain, sa déclaration, la douleur qu’elle a ressenti, et même si la rancœur est présente, elle ne peut cacher sa tristesse. “I was, I don’t know why but it felt, strange, strong. Like I was almost already in love with him, know what I mean? I went to see him, the next day, he acted like he didn’t do anything, and he told me he loved me.” La voix vacille un peu, mais elle la durcit volontairement, comme si elle voulait couper nette la déclaration d'Ash, lui donner moins d'importance. “But you know me, I’m not the forgiving type.” Even if it was hard this time, qu’elle ne dit pas mais qu’elle pense peut-être un peu fort. Elle n’a jamais connu que la rancœur et refuse de pardonner, Ash ne fera pas exception. “you can still do the same as me for a bit, though. no feelings, just one night stands or friends with benefits, the rest's too complicated, it's time to enjoy your life without getting constantly burned for it. and you already have a lot to deal with, Pando.” Elle relève un peu la tête, dépose un baiser tendre sur son front pour le rassurer. “Sounds like a perfect plan, and don’t you worry about me, ‘kay? I’m fine, I haven’t drank anything or taken anything since last June”, excepté les pilules d’antidouleur, mais il le sait déjà, et sait sûrement aussi qu’elle ne peut pas faire autrement. “are you finished up there? stand up it's my turn.” Elle se relève pour observer le dessin, quasiment terminé ; il ne resterait que quelques traits pour parfaire les vagues et l’écume, mais la peinture ressemble déjà à quelque chose. “Yep I’m done”, dit-elle en se relevant, enlevant son t-shirt pour s’allonger à sa place, les doigts qui dégrafent son soutien-gorge pour lui laisser plus de place sur son dos. “Do you have a drawing in mind?” Elle sait que son dessin sera encore plus beau que le sien (c’est toujours le cas), ne lui dit pas qu’elle en fera peut-être un tatouage, cette fois.