in the night,,

Elle est là sans l’être, et ça pourrait se voir au-delà de son sourire feint et de son cœur qui craque à chaque pas, sous le poids d’une rupture dont Pandore ne se remet pas, même après plusieurs mois. Elle est pourtant la première à ne rien remarquer, à se complaire dans le déni d’un bonheur fait de verres de champagne et de danses jusqu’au lever du jour, parce que c’est toujours plus agréable de se mentir à soi-même et de faire comme si les malheurs n’existaient pas, plutôt que de regarder ses sentiments dans le miroir et de se confronter aux besoins de pansements qu’on sait ne pas être suffisants. Elle boit pour oublier, et dans son esprit il n’y a pas que la rupture, il y a des erreurs datées d’un jour ou deux, un baiser volé et Yuko qui l’a repoussée, des sentiments qui ne devraient pas naître et ceux qui n’arrivent pas à partir. Pas un soir sans faire la fête, les yeux fermés et le corps qui se déhanche pour mieux apprécier le volume au maximum, la musique qui résonne et qu’on n’écoute qu’à moitié, guidée seulement par le rythme et l’alcool dans le sang. Ils sont nombreux ce soir à venir pour se changer les idées, et elle retrouve des visages connus avec qui elle trinque, avec plaisir, pansement temporaire pour des maux qu’elle remet à plus tard.
Mais la réalité n’est jamais bien loin, au détour d’un verre, de quelques pas de danse. « Bonsoir. », sifflé plus que susurré, dans un français qui l’oblige à se retourner d’un coup sec, le cœur battant et les yeux qui s’accrochent aux prunelles tendues — certainement pas à la main. Et la musique s’arrête en prenant soin d’arracher les pansements, parce que leur rencontre n’a jamais rien d’agréable. C’est comme si elles avaient raté le coche, que l’amitié s’était dérobée à elles sans qu’elles aient ni le choix ni le temps. Pandore ne la déteste pas, n’a aucune raison de le faire, mais Mazra a trop souvent des airs de vipère, lui en veut à tort ou à raison, quémande son pardon pour des actes qu’elle a l’air de considérer impardonnables. Mais il n’y a pas encore eu de réelle provocation, ni d’explosion, alors depuis le départ Pandore préfère l’indifférence, sauf que s’il y avait un miroir dans la pièce ce soir elle verrait peut-être un autre reflet que le sien, une ombre déformée, une forme plus serpent que femme. « Hey Mazra. » Indifférence mais sourire presque sincère, Pandore persiste à vouloir différer le début de la guerre, sait qu’elle est sortie avec Raffaele après Mazra et que ça ne se faisait pas, accepte ses torts, sans avoir conscience qu’elle s’est trompée en les comptant. « It's been a while. We have so much to talk about. » Mais c’est peut-être déjà trop tard, peut-être que Mazra a déjà creusé les tranchées (c’est le cas). « Do we? Well, I’m all ears, although I’m not sure here is the perfect place to have a chit-chat, with the music and all. » Dernière tentative de médiation, sans savoir que les négociations se sont terminées depuis bien longtemps.